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Diminution du nombre de parlementaires : pourquoi Juppé, Sarkozy, Bayrou se livrent à une mauvaise surenchère
©Reuters

Tribune

La France comptant un élu pour 109 habitants - soit deux fois plus qu'en Suède et vingt fois plus qu'au Royaume-Uni - les responsables politiques sont de plus en plus nombreux à réclamer la réduction de nombre des parlementaires, ce qui constituerait une mauvaise réforme.

Michel Guénaire

Michel Guénaire est avocat et écrivain. Il est l’auteur du Génie français (Grasset, 2006) et Après la mondialisation. Le retour à la nation (Les Presses de la Cité, 2022). Vous pouvez retrouver Michel Guénaire sur Twitter : @michelguenaire

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Revenons sur une proposition qui a enflammé l’imagination politique ces dernières semaines. Nicolas Sarkozy veut diminuer le nombre de parlementaires de 15 %, François Bayrou de 30 %, Alain Juppé de 50 %. Dans une période de crise de nos finances publiques et de défiance à l’égard de la représentation politique, la proposition lave plus blanc.

Elle a sans doute pour objectif de rationaliser le fonctionnement du Parlement : moins de parlementaires, c’est une meilleure procédure de vote de la loi. Il faut s’en féliciter, mais il ne faut pas oublier qu’un parlementaire a deux qualités : il est législateur, et il est aussi représentant. L’idée de la réduction du nombre de parlementaires est seulement une proposition pour avoir de meilleurs législateurs, non de meilleurs représentants. Nos responsables se livrent à une mauvaise surenchère.

Diviser par deux le nombre des députés et des sénateurs engagerait d’abord une économie annuelle non réellement significative par rapport au déficit de l’Etat. Elle se monterait en effet à 100 millions d’euros, ce qui est tout de même loin des 2.000 milliards d’euros de la dette publique, mais surtout les indemnités parlementaires sont prises en charge par le budget propre des Chambres et non celui de l’Etat. Si l’on voulait tailler dans les dépenses du Parlement, il y aurait mieux à faire, en supprimant, par exemple, la réserve parlementaire. En 2014, elle se sera élevée, pour la seule Assemblée Nationale, à 90 millions d’euros, et pour le Sénat à une somme équivalente, soit au total le double du gain escompté de la diminution du nombre de parlementaires.

Se séparer de la moitié de nos parlementaires serait ensuite priver nos institutions de relais utiles dans les territoires. Un parlementaire a une fonction de représentation qui l’engage à écouter les gens et exprimer leurs attentes. C’est la fonction représentative qui fut centrale dans l’édification du libéralisme politique. Voudrait-on se passer de députés et de sénateurs, comme on veut se passer par ailleurs des huissiers, des notaires, des avocats et des pharmaciens ? Le pays a besoin de liens qui passent par des hommes et des femmes présents dans ses collectivités. Le gouvernement que souhaitent nos responsables voudrait-il se priver d’entendre la voix du pays ?

Enfin, c’est la mauvaise réforme. La vraie réforme est le renouvellement de la personne des parlementaires, non la réduction de leur nombre. C’est dans ce sens qu’il faut privilégier l’interdiction d’exercer plus de deux mandats parlementaires, mais également plus de deux mandats d’élu local, successivement dans le temps. La représentation doit reposer sur un aller-retour incessant entre société civile et représentation politique. On aura un meilleur Parlement, comme d’une manière générale une meilleure classe politique, si nos représentants sont renouvelés. Le nombre n’est rien, la qualité des hommes est tout.

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