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Dans le train entre Paris et Mantes-la-Jolie, il ne fait pas bon être un "sale Blanc"
©Reuters

Insultes au faciès

On peut éviter ça en baissant la tête. Et en se laissant bousculer sans rien dire.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Je suis un client fidèle, et surtout captif, de la SNCF. Mais vu ses performances parfaitement médiocres, je la quitterais volontiers pour un car – Macron. À Évreux où je réside, il n'y en a pas : ce n'est pas une grande ville. Le train reste ainsi, et pour moi, un moyen de transport obligé. Je fais donc des Évreux-Paris et des Paris- Évreux comme on va à l'abattoir.

J'exagère un peu. Mon chemin de croix ne concerne que les TER qui, avant d'arriver à Évreux, marquent un arrêt à Mantes-la-Jolie. Les Intercités, eux, filent direct jusqu'à Évreux : voyage paisible garanti. Je privilégie évidemment ces trains-là. Mais en fonction de mon agenda, je suis parfois contraint d'emprunter un TER.

Et là, jusqu'à Mantes-la-Jolie, la découverte, pour ne pas dire l'aventure, est au rendez-vous. Des mots comme "vivre ensemble" prennent corps. L'expression "mixité sociale" (oui, on doit dire "sociale" !) se fait chair. Au pittoresque de la population voyageuse, il faut ajouter un argument non négligeable. Il n'est pas nécessaire sur ce trajet d'acheter son billet. En effet, les contrôleurs ne se montrent presque pas. Ils n'ont pas envie de se faire insulter et de se faire démonter la gueule…

Il y a un mois, pendant un trajet Paris-Mantes-la-Jolie, j'ai été violemment bousculé. J'ai protesté. On m'a rétorqué : "Ta gueule, sale Blanc !". Ils étaient quatre. Soutenus silencieusement par la majorité du wagon, et j'étais seul. Je n'ai rien dit. Et on s'est gentiment abstenu de me frapper.

Il y a deux jours, manque de pot, j'ai de nouveau emprunté un TER. Suite à une défaillance informatique de la SNCF, le train s'est arrêté pendant une trentaine de minutes dans une petite gare. Je suis descendu sur le quai pour fumer une cigarette. Sur ma place, j'avais laissé ma valise. Quand je suis remonté, mon bagage était par terre, et une jeune fille noire avait pris sa place. Les voisins avaient entrepris de lui expliquer que cette place était occupée. En la priant poliment de se lever.

Elle le fit en hurlant : "Vous me chassez parce que je suis une Noire !". Passant près d'elle, je lui fis remarquer que la couleur de sa peau n'était nullement en cause. Et que je souhaitais juste récupérer mon siège. J'aurais mieux fait de me taire. On me signifia aussitôt que j'étais un "fils de pute" et un "enculé de Blanc". Un incident somme toute banal mais qui est révélateur d'une véritable charge de haine de certains à l'égard d'autres qui ne leur ressemblent pas.

Mais qui est responsable ? Qui est coupable de l'"enculé de blanc" lancé par la jeune fille du train ? Qui lui a fabriqué une mentalité faite de haine et de ressentiment ? Qui lui a appris que le Blanc, le Français, était détestable ? La faute au racisme, à notre racine ? Allons. La France est le pays le moins raciste du monde. C'est bien chez nous qu'on compte le plus de mariages mixtes (unions entre des hommes et des femmes de différentes origines, de différentes races ou couleurs).

Non, la jeune fille du train n'est pas coupable. Des journaux, des associations, des Ligue des droits de l'Homme, des Conseil représentatif des associations noires de France, des SOS Racisme lui ont enfoncé dans la tête qu'elle était une victime. Et que mieux valait pour elle ne pas rester un agneau et devenir un loup. Alors instruite par ce bréviaire de la haine, elle hurle comme les loups.

À ce sujet me revient une histoire éclairante racontée par Victor Klemperer. Ce dernier, un intellectuel juif berlinois, portait l'étoile jaune sous Hitler. Il avait un ami chrétien et plutôt antinazi, Hans, qui lui proposa d'aller voir le film Le Juif Süss, un des sommets de l'abjection antisémite hitlérienne. Ébranlé par les images des horreurs imputées aux Juifs, Hans s'adressa à Klemperer à la fin de la séance : "Vous avez dû quand même faire bien du mal pour qu'on vous haïsse autant ?". Ainsi se forgent les pires des passions haineuses. Et nous, quel mal avons-nous fait pour que la jeune fille du train nous haïsse autant ?

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