Cycles du sommeil : les étapes essentielles pour mieux dormir <!-- --> | Atlantico.fr
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Nick Littlehales publie « L’art de mieux dormir » aux éditions Amphora.
Nick Littlehales publie « L’art de mieux dormir » aux éditions Amphora.
©TOSHIFUMI KITAMURA / AFP

Bonnes feuilles

Nick Littlehales publie « L’art de mieux dormir » aux éditions Amphora. Nous sommes des millions de Français à ne pas dormir suffisamment et à ne pas avoir un sommeil de qualité. Pourtant, les heures que nous passons dans notre lit sont essentielles à notre santé, notre bien-être et à notre efficacité. Nick Littlehales, expert mondial et coach du sommeil, partage les stratégies que nous pouvons tous utiliser. Extrait 1/2.

Nick Littlehales

Nick Littlehales

Coach pour le sommeil de grands noms du sport mondial, des meilleures équipes de football internationales, telles que le Real Madrid, Manchester United ou Arsenal, ainsi que de grands sportifs, comme Cristiano Ronaldo ou David Beckham, Nick Littlehales travaille également dans le rugby, la NBA ou le surf. Président du UK Sleep Council et ancien golfeur professionnel, il a trente ans d'expérience dans le monde de la science du sommeil. 

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Chronotype : sept étapes pour mieux dormir

1 Identifiez votre chronotype et déterminez celui de vos amis proches et de votre famille. En cas de doute, utilisez le questionnaire de l’université de Munich (Munich Chronotype Questionnaire).  

2 Organisez votre journée de manière à être au top aux moments qui importent le plus.

3 Utilisez la caféine comme un booster de performance stratégique, pas par habitude, et sans dépasser 400 mg par jour.

4 Si vous êtes du soir et si vous voulez combattre le décalage social, bannissez la grasse matinée le week-end.

5 Installez des lampes lumière du jour dans les salles de réunion et les bureaux, afin d’améliorer la vivacité, la productivité et le moral des employés.

6 Sachez quand vous pouvez aller au front et quand il vaut mieux rester au second plan : si vous êtes du matin, vous porterez-vous volontaire pour tirer un pénalty lors d’un match qui se poursuit tard le soir ?

7 Apprenez à vivre en harmonie avec votre partenaire si vous n’avez pas le même chronotype.

Dormir en cycles, et non en heures

Vous réveillant dans l’obscurité, vous vous interrogez  : « Combien de temps ai-je dormi ? » Après vous être levé et rendu aux toilettes, vous vérifiez l’heure sur votre téléphone : 3 h 07. Parfait ! Il vous reste plein de temps à passer au lit. Si vous vous rendormez immédiatement, vous resterez aux alentours des huit heures quand l’alarme sonnera à 7 h 30. Une grosse journée vous attend demain, avec beaucoup de travail au bureau. Vous devrez être frais. Il vous faut vos huit heures de sommeil.

Vous vous recouchez donc et restez ainsi allongé un moment. Et puis un moment encore… Un coup d’œil à votre téléphone : 3 h 33. C’est toujours O.K. Il vous reste plein de temps. Vous avez cette réunion à 10 h, bien sûr ; vous devrez être dispos. « Comment cela va-t-il donc se passer ? » Vous vous interrogez, et le trac vous gagne de nouveau  ; presque imperceptiblement, vos épaules se sont contractées. Vous n’êtes plus couché sur le côté  : vous avez basculé sur le dos, les doigts croisés derrière la tête. « Position idéale pour réfléchir », vous dites-vous. Vous regardez l’heure une nouvelle fois  : 3  h  56. À l’approche de 4  h et à l’idée de perdre une heure complète de sommeil justement avant cette journée si importante, cette angoisse si particulière à ce moment de la nuit vous envahit.

Les chiffres intimidants 5 h 53 sont les derniers que vous vous rappelez avoir vus avant que l’alarme ne vous tire de votre sommeil à 7 h 30, la gorge sèche et une douleur de plus en plus prégnante derrière les yeux. Vous êtes très loin d’avoir eu vos huit heures : comment allez-vous tenir le coup aujourd’hui ?

Un gabarit universel ?

Si vous lisiez un ouvrage sur le sommeil et si l’on vous demandait de penser à un nombre, n’importe lequel, entre un et dix, vous répondriez probablement huit. Huit heures de sommeil par nuit est un joli chiffre tout rond, mais c’est l’une des croyances tenaces de la « sagesse du sommeil » qui ne vaut pas pour tout le monde.

La notion des huit heures par nuit est assez récente. Dans la suite de ce livre, nous aborderons le sommeil en plusieurs phases. Dans l’immédiat, cependant, disons simplement que, jusqu’au XIXe  siècle, avec la révolution industrielle et l’apparition de l’éclairage artificiel, les gens ne dormaient vraisemblablement pas huit heures d’une traite la nuit, et il est encore plus improbable que ce temps de sommeil les ait préoccupés.

La durée de huit heures est une moyenne du temps que les gens dorment par nuit, mais on ne sait trop comment, elle semble être devenue un standard recommandé pour tout le monde. Cela fait peser sur les individus qui cherchent à atteindre cette quantité une pression incroyablement dommageable et contre-productive pour dormir le temps dont chacun a effectivement personnellement besoin.

Cette mentalité de gabarit universel ne s’applique pas à d’autres domaines de notre vie. Concernant le nombre de calories quotidiennes requises, par exemple, il existe une norme reconnue par le corps médical qui différencie les deux sexes, sans parler de la distinction établie entre les besoins d’un fan de fitness herculéen et une personne menant une vie essentiellement sédentaire. Des recommandations ont aussi été établies pour la consommation quotidienne maximale d’aliments comme le sucre et le sel, mais être en deçà des quantités conseillées est considéré comme acceptable. On ne trouve aucune durée d’activité physique quotidienne absolument préconisée, mais il est généralement admis que dépasser le temps de pratique recommandé est un bon point. C’est uniquement en matière de sommeil – et, comme nous le verrons ultérieurement, pas seulement sur cet aspect de la durée – que pareille sagesse est acceptée naturellement.

Or en vérité, chacun de nous est différent. Il y a des Margaret Thatcher et des Marissa Mayer, qui se contentaient de quatre à six heures par nuit alors qu’elles étaient à la tête de la Grande-Bretagne, pour l’une, et de Yahoo, pour l’autre. On trouve aussi des gens comme la légende du tennis, Roger Federer, et l’homme le plus rapide de tous les temps, Usain Bolt, qui déclaraient avoir besoin de dix heures par nuit, rien que ça !

Mais même indépendamment de ces extrêmes, notre besoin de sommeil change tout au long de notre vie. Pendant l’enfance puis l’adolescence, il nous faut dormir beaucoup plus qu’une fois adultes. Selon la National Sleep Foundation, organisation américaine à but non lucratif, un ado entre quatorze et dix-sept ans a besoin de huit à dix heures de sommeil, en moyenne, tandis qu’un adulte se contente de sept à neuf.

S’il ne vous faut pas huit heures de sommeil par nuit, mais si vous vous forcez pour essayer d’atteindre ce quota, en allant au lit alors que vous n’êtes pas fatigué et en restant allongé sans dormir, vous perdez votre temps. Il en va de même si vous regardez l’horloge au milieu de la nuit, en calculant avec anxiété combien d’heures en deçà de huit vous serez, tournant et vous retournant, et redoutant de plus en plus de ne pas avoir assez de sommeil : vous gaspillez alors votre temps précieux à ne pas dormir.

Les gens qui travaillent en horaires décalés, les courtiers en bourse, le personnel aérien, les routiers longue distance, etc. ne font pas des nuits de huit heures. Les sportifs dont je m'occupe non plus, et cela ne tient pas seulement à leur emploi du temps très chargé : cela vient aussi du fait qu’ils n’abordent pas le sommeil en heures, mais en cycles.

Les cycles de sommeil

L’approche R90 signifie juste Récupération en 90 minutes. Je n’ai pas juste choisi un nombre au petit bonheur la chance entre un et cent : quatre-vingt-dix minutes correspondent à la durée indispensable à une personne dans des conditions cliniques pour accomplir les différentes phases de sommeil constituant un cycle.

Nos cycles de sommeil se découpent en quatre (voire cinq) étapes distinctes, et il est facile d’envisager l’accomplissement de l’un d’eux comme la descente d’une volée de marches. Quand nous éteignons les lumières et que nous allons au lit le soir, nous sommes en haut de l’escalier. Tout en bas se trouve le sommeil profond, celui que nous voulons atteindre.

Haut de l’escalier : l’assoupissement

Phase NREM 1

Descendant doucement nos premières marches, nous oscillons pendant quelques minutes entre la veille et le sommeil. Vous êtes-vous jamais réveillé soudainement en bougeant brusquement parce que vous vous imaginiez en train de tomber ? Cela se produit pendant cette phase et n’est qu’une simple hallucination, mais qui nous oblige à redescendre ces premières marches. Pendant cette courte période, nous pouvons nous retrouver très vite en haut de l’escalier : il suffit d’une porte qui s’ouvre ou d’une voix dans la rue. Cependant, une fois que nous avons réussi à négocier cette phase, nous poursuivons notre descente…

Milieu de l’escalier : le sommeil léger

Phase NREM 2

Lorsque nous sommes en état de sommeil léger, notre rythme cardiaque se ralentit, et notre température corporelle chute. Nous pouvons alors toujours être ramenés en haut de l’escalier par une personne criant notre nom ou, dans le cas d’une mère – et les femmes sont biologiquement sensibles à cela –, par les pleurs de son bébé. Nous passons la plus grande partie de notre temps de sommeil dans cet état, ce qui peut donner à certains – surtout ceux qui demeurent longtemps en sommeil léger – le sentiment de devoir descendre un très grand nombre de marches. Néanmoins, ce n’est pas du temps perdu si cela s’intègre dans un cycle bien équilibré, puisque c’est à cette phase que l’on associe la consolidation mnésique et l’amélioration des habiletés motrices. Et au fur et à mesure que nous descendons, nous entamons notre passage vers une période vraiment positive.

Bas de l’escalier : le sommeil profond

Phase(s) NREM 3 (et 4)

Félicitations ! Vous avez atteint le bas des marches. À ce stade, il faudra y mettre vraiment les moyens pour vous réveiller ! Si vous avez déjà dû secouer quelqu’un pour le sortir des bras de Morphée, ou si vous avez malheureusement été à cette place de « victime » endormie et vous êtes alors retrouvé l’esprit embrouillé, comme groggy, vous avez compris la puissance du sommeil profond et les effets de l’inertie du sommeil. C’est lors de cette phase que les somnambules se mettent en mouvement.

Pendant le sommeil profond, notre cerveau produit des ondes delta, qui correspondent aux ondes cérébrales les plus lentes, c’est-à-dire de plus basse fréquence, contrairement aux ondes bêta de haute fréquence que nous produisons quand nous sommes éveillés. Nous voulons passer le plus longtemps possible dans cet état, nous y abandonner, car c’est là que les effets réparateurs physiques du sommeil sont les plus importants, notamment avec l’augmentation de la production de l’hormone de croissance humaine (HGH).

Certains d’entre vous connaissent peut-être cette dernière comme un produit dopant interdit dans le sport, mais notre corps en produit naturellement, et elle a des effets puissants. Le Dr Michael J. Breus, psychologue clinicien et expert du sommeil aux États-Unis, la décrit comme « un élément essentiel dont nous avons tous régulièrement besoin pour la croissance de nouvelles cellules, la réparation des tissus, la récupération de l’organisme après les tâches quotidiennes et, surtout, pour nous revigorer (et nous sentir rajeunis).  » Nous aspirons à passer environ 20 % de notre temps non éveillé pendant la nuit dans cet état de sommeil profond.

Toboggan en spirale : le sommeil paradoxal

Dans leur morceau Helter Skelter, les Beatles chantent qu’ils remontent en haut de ce toboggan en spirale présent dans certains parcs d’attraction, s’y arrêtent, se retournent et repartent pour un tour. Ce schéma n’est pas si loin de la phase de sommeil qui nous intéresse ici. Nous remontons l’escalier, nous retrouvant pendant un temps en sommeil léger, avant d’atteindre une phase de sommeil connue d’un bon nombre d’entre nous : le sommeil paradoxal (ou sommeil REM, Rapid Eye Movement, mouvements oculaires rapides).

C’est là où notre esprit divague. En effet, c’est lors de cette phase pendant laquelle notre corps est temporairement paralysé que nous faisons la plupart de nos rêves, et on estime que le sommeil paradoxal aurait des effets bénéfiques sur la créativité. Nous devons remonter vers le haut de l’escalier, nous arrêter, nous retourner et repartir pour un tour autant que nécessaire pour arriver au bas des marches, puis recommencer, notre objectif étant de passer environ 20  % de notre temps dans cette phase. Cette dernière représente plus de la moitié du temps de sommeil des nourrissons. Quand elle se termine, nous nous réveillons – sans nous en souvenir, généralement – avant de commencer le cycle suivant.

Chaque cycle nocturne est différent. Dans les premiers, le sommeil profond compte pour une plus grande part de notre sommeil, car atteindre cet état le plus tôt possible est alors une priorité pour notre corps. La part du sommeil paradoxal devient plus importante dans les cycles tardifs. Cependant, si nous avons dormi moins que la normale, notre cerveau bascule en sommeil paradoxal plus longtemps dans des cycles plus précoces, ce qui montre à quel point cet état est important pour nous.

C’est notamment l’une des raisons pour lesquelles vous gaspillez votre temps si vous cherchez à « rattraper votre retard » de sommeil en allant au lit plus tôt que d’habitude ou en y restant plus tard. Le sommeil perdu ne se retrouve pas. Néanmoins, notre organisme excelle tout particulièrement à compenser ce manque pour nous.

L’idéal est de passer une nuit au lit en effectuant en douceur la transition d’un cycle à l’autre, selon un schéma sommeil-éveil-sommeil-éveil… avec un temps de sommeil profond qui se réduit peu à peu et un temps de sommeil paradoxal qui s’allonge au fur et à mesure que l’on avance dans la nuit, jusqu’à notre réveil final le matin. C’est là que réside la clé pour avoir la qualité de sommeil requise : tout le sommeil léger, profond et paradoxal dont nous avons besoin en une succession de cycles qui nous semblent constituer un long sommeil nocturne ininterrompu.

Cependant, toutes sortes d’obstacles se dressent sur notre chemin : le bruit, l’âge, le stress, les médicaments, la caféine, les dérangements physiques – comme être touché par la jambe de notre partenaire –, la respiration par la bouche plutôt que par le nez, les ronflements, l’apnée du sommeil, la température ou la nécessité d’aller aux toilettes peuvent nous ramener en haut de l’escalier et nous condamner à rester une trop grande partie de notre nuit dans les phases de sommeil léger, voire nous déconnecter complètement de nos cycles.

Les contre-coups peuvent alors aller d’une plus grande fatigue en journée à des conséquences fatales. Notre organisme peut nous plonger brusquement dans un micro-sommeil en journée au moment où nous nous y attendons le moins, par exemple lorsque nous sommes au volant d’une voiture ou que nous manipulons une machine.

Si nous sommes piégés dans un schéma de sommeil léger, peu importe le temps que nous dormons : il ne nous sera pas pleinement bénéfique. L’approche R90 s’attaque aux obstacles qui nous empêchent de poursuivre la descente de l’escalier, avec, en tête de liste, nos alarmes qui retentissent au petit matin.

Extrait du livre de Nick Littlehales, « L’art de mieux dormir », publié aux éditions Amphora

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