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Comment Louis Schweitzer transforme le remplacement d'Olivier Duhamel à la tête de Sciences Po en mauvaise farce
Comment Louis Schweitzer transforme le remplacement d'Olivier Duhamel à la tête de Sciences Po en mauvaise farce
©STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

IEP

Malgré les promesses de transparence après la démission en janvier d’Olivier Duhamel, la procédure de désignation de son successeur s’est opacifiée.

Boutmy Revient

Boutmy Revient

Boutmy Revient est le pseudo d’un fin observateur de la vie politique française et de ses arcanes.

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La candidature de Nonna Mayer a été vivement ce matin vivement rejetée par le Conseil d'administration de la Fondation nationale des Sciences Politiques, avec seulement 10 voix sur 23 en sa faveur, alors qu'il en faudrait au moins 16... 

Face à un tel désaveu de sa candidate, plutôt que de se rallier à l'une des deux autres candidats (le politologue Pascal Perrineau et l'économiste Romain Rancière) pour présider la FNSP, Louis Schweitzer et le comité de recherche qu'il a composé ont décidé de travailler à une autre candidature "en urgence" au motif "que la presse s'intéressait à l'affaire", ce qui semble être un problème pour de tels amateurs de petits arrangements entre amis. 

Face à ces pratiques d'un autre temps on peut se demander ce que deviennent les affirmations de principes de transparence et de déontologie proclamées par sa faculté permanente. Ils avaient présenté leur démarche et la candidature qu’ils soutenaient comme étant les signes d’une volonté de transparence et d’un souci de déontologie renforcée pour lutter contre l’entre soi (cf. texte ci-dessous).

Quelles pourraient être les conséquences de ce nouvel épisode dramatique pour cette grande école qui fit la fierté du modèle d'éducation français ?

Il s'agit en réalité d'une pièce de théâtre dont le metteur en scène est Louis Schweitzer : Les représentants autoproclamés du corps académique de Sciences Po se sont réunis lundi 29 mars au matin pour se mettre d’accord sur une autre candidature que celle qu’ils avaient soutenue dans un premier temps à savoir Nonna Mayer et dont ils pressentaient que le militantisme l'empêcherait de pouvoir réunir à terme une majorité des 2/3 requise pour l’élection à la présidence de la Fondation. 

Dans un premier temps, ils ont imposé au collège des fondateurs du CA de la FNSP un « research comittee » censé piloter le recrutement du futur exécutif de la FNSP sans y associer les représentants du personnel de Sciences Po, ceux de l’Etat et des forces vives, ceux du Conseil d’Etat et du Collège de France, ceux du monde étudiant. L’entre soi après avoir été dénoncé, était donc pratiqué avec ardeur au  prixd’un élargissement aux seuls élus de la communauté enseignante. 

Dans un second temps, ces représentants vont changer leur fusil d’épaule et mettront en scène une nouvelle candidate, Laurence Bertrand Dorléac, dans des conditions de plus en plus abracadabrantesques. Cette dernière non seulement n’a pas candidaté dans un premier temps, elle n’a pas eu à exposer son projet le 12 mars dernier devant le « research comittee » mais elle fait partie elle-même de ce comité de recherche. L’entre soi s’aggrave puisque le comité de recherche prospecte en son sein et a le don d’ubiquité : une candidate aurait le privilège d’être auditionnée mais aussi d’auditionner ses concurrents.

En réalité, plusieurs observateurs se demandent si cet étrange processus de sélection n’aurait pas un autre objectif : derrière la volonté de "nommer une femme à la présidence" se cacherait une raison nettement moins féministe, rendre possible la nomination comme directeur d'un homme, en l'occurrence Laurent Bigorgne, longtemps collaborateur essentiel de Richard Descoings lorsque celui-ci dirigeait l’institution de la rue Saint Guillaume et qualifié lors de la campagne de 2017 de « proche d’Emmanuel Macron » par nombre d’articles de presse. Désormais à la tête de l’institut Montaigne, M. Bigorgne assure pour sa part avec la plus grande fermeté que la page Sciences Po est loin derrière lui et qu’il n’est et ne sera pas candidat à sa direction. 

Avec ou sans cette hypothèse, il s'agirait en fait de barrer la route à Pascal Perrineau qui a déclaré dans la profession de foi  qu'il a rendue publique vouloir nommer une femme à la direction de Sciences Po s'il en devenait le président. 

Il est temps que quelqu'un siffle la fin de la récréation, et que Sciences Po retrouve sa dignité. Ses administrateurs doivent se ressaisir.

• Position de la Faculté permanente de Sciences Po adoptée le 20 janvier 2021 :

Extraits : « Nous ne nous reconnaissons pas dans l’image de connivence sociale, qui a certes pu prévaloir par le passé (…)

Sciences Po est devenue une université internationale de recherche en sciences humaines et sociales, dotée de procédures de recrutement transparentes, ouvertes et exigeantes, fondées sur l’excellence scientifique, la rigueur intellectuelle et l’exemplarité pédagogique (…) Notre bien le plus précieux est la confiance que nos étudiantes et nos étudiants nous accordent. Elle tient à l’exemplarité de nos comportements (…) 

« (Le conseil d’administration de la FNSP) doit revoir son fonctionnement et cesser de reproduire les mécanismes de cooptation sans transparence du passé. L’ampleur de la crise actuelle montre les limites de ce mode désignation et invite à changer les réflexes et à ouvrir davantage, et ce aussi dans le but de renforcer la transparence et l’autonomie de notre institution. (…) Nous attachons également une grande importance à l’amélioration des dispositifs déontologiques de l’établissement, pour qu’ils protègent la dignité, le fonctionnement et la réputation de notre institution. La responsabilité du président par intérim, du nouveau conseil d’administration et de la direction de Sciences Po pour accompagner l’évolution des  pratiques de gouvernance au sein de l’établissement est immense et ne peut en rester à des ajustements cosmétiques. »

(Ce texte a été élaboré de manière collective, suite à un Forum d’échange de la communauté académique de Sciences Po qui s’est tenu le 18 janvier 2021)

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