Comment la résistance s’est organisée en 1941 à l’hôpital des Enfants malades sous l’égide de Robert Debré<!-- --> | Atlantico.fr
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Cécile Tartakovsky publie « Ces médecins qui ont résisté (1940-1945) » aux éditions Flammarion
Cécile Tartakovsky publie « Ces médecins qui ont résisté (1940-1945) » aux éditions Flammarion
©Wikimedia Commons / DR

Bonnes feuilles

Cécile Tartakovsky publie « Ces médecins qui ont résisté (1940-1945) » aux éditions Flammarion. En 1940, rien ne les prédestinait à résister. Et pourtant, au lendemain de la défaite, ils vont user du soin, de la science et de leur courage pour sauver des milliers de vies, au péril de la leur. Extrait 1/2.

Cécile Tartakovsky

Cécile Tartakovsky

Cécile Tartakovsky est journaliste et réalisatrice. Elle a publié « Ces médecins qui ont résisté (1940-1945) » aux éditions Flammarion.

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Fin de l’année 1941, à l’hôpital des Enfants malades, XV e arrondissement de Paris

Robert Debré, lui, poursuit ses actions souterraines auprès du musée de l’Homme.

Avec sa seconde épouse, Élisabeth de La Bourdonnaye de La Panouse – dite Dexia –, ils bravent ensemble le danger, rédigent des articles, ne cessent de diffuser leurs tracts antinazis. Elle, particulièrement, s’investit au sein du réseau, évoquant son appartement rue de Varenne qui, elle l’assure, peut aisément faire office de cache.

« C’était le début de sa compromission dans l’affaire du musée de l’Homme, la première grande affaire de la Résistance et qui devait plus tard provoquer une émotion profonde. »

Car tous ignorent alors qu’un traître s’est infiltré dans le réseau – un Français fiché à la Gestapo – et qu’il s’apprête à dénoncer un à un les membres de l’organisation. Cent vingt. Des savants, des avocats, des médecins, des hommes et des femmes aux horizons multiples, unis autour de la même cause. Robert Debré passe miraculeusement entre les mailles du filet. Ça n’est pas le cas de Dexia qui, une fois arrêtée, est transférée à la Pitié, dans un pavillon isolé, réservé aux prisonniers malades et inaccessible car entouré de fils de fer barbelés.

Robert Debré n’en dort plus. Il se demande pour quelle raison Dexia a été hospitalisée, si ses lésions pulmonaires se sont réveillées. Il réussit finalement à pénétrer dans l’hôpital. De longues heures durant, il erre à l’abord des clôtures dans l’espoir d’apercevoir sa femme.

« J’avais préparé un mouchoir sali par une expectoration sanglante que j’avais enrichie de nombreux bacilles tuberculeux, espérant lui passer ce linge qui lui eût servi d’argument pour être libérée. »

Son projet échoue et il apprend quelques jours plus tard que Dexia a été de nouveau transférée à la prison du Cherche-Midi. Elle est finalement libérée en juillet 1941, mais à peine relâchée, et malgré son statut de prévenue libre, elle se lance de nouveau et à corps perdu dans des actions de sauvetage périlleuses.

« Dans son appartement se succédèrent des groupes d’enfants arrachés aux rafles. Par prudence, il fallait les garder enfermés. Elle les lavait à grande eau savonneuse, les débarrassait de leurs parasites, passait leurs longues chevelures à la tondeuse, leur faisait perdre l’habitude de rester la tête couverte d’une calotte crasseuse et remplaçait leurs pauvres habits. »

Ragaillardis par les soins attentifs et maternels de Dexia, les enfants peuvent à présent être dispersés dans diverses caches provinciales. Robert Debré organise certains de ces placements clandestins à proximité de sa propriété des Madères, en Touraine, dans le petit village de Vernou notamment. L’une de ses connaissances, une infirmière de l’hôpital Rothschild, « volontaire, courageuse et adroite », accepte de défier les Allemands, en conduisant – par le train – les enfants auprès de cultivateurs tourangeaux à qui Robert et Dexia avaient préalablement raconté qu’il s’agissait là de jeunes réfugiés belges fuyant les restrictions de leur pays d’origine. Pas question de dévoiler leur judéité. Le risque aurait été trop grand de se faire dénoncer.

Dans le même temps, à une dizaine de kilomètres de Rothschild, à l’hôpital des Enfants malades, et parce qu’il s’est profondément intégré à la communauté française par son mariage avec une Française d’origine et la création d’une famille française, une dérogation exceptionnelle l’autorise de nouveau à exercer officiellement son métier de pédiatre. L’hôpital devient alors, pour le médecin, une forteresse idéale contre les agressions de l’adversaire et sous son impulsion, et la complicité de son équipe exclusivement féminine, son service se métamorphose en un impressionnant bastion de résistance.

« Mon laboratoire des Enfants malades avait été, grâce à Dexia, à ma surveillante madame Bertrand et aux laborantines, transformé en un atelier de faux. Cartes d’identité, cartes d’alimentation, point de vêtements et de chaussures, ordres de mission, cachets, tampons. C’était une fabrique artisanale de qualité raffinée qui ne fut jamais dénoncée ni découverte. »

Mais à mesure que s’organise la Résistance, la répression s’intensifie.

Les brimades et les humiliations se multiplient et trouvent leur apogée en mai 1942, lorsque les Juifs résidant en zone nord se voient imposer le port de l’étoile jaune. 

Extrait du livre de Cécile Tartakovsky, « Ces médecins qui ont résisté (1940-1945) », publié aux éditions Flammarion

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