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Six ans après avoir été accusée de commettre un “crime contre l’humanité”, l’UE a finalement renoncé à soutenir les biocarburants.
Six ans après avoir été accusée de commettre un “crime contre l’humanité”, l’UE a finalement renoncé à soutenir les biocarburants.
©Reuters

Decod'Eco

L’Union européenne vient de faire un demi-tour complet sur la question des biocarburants en décidant de ne plus les soutenir. Un changement de cap qui a déclenché la colère de certains industriels mais qui ouvre des opportunités à d'autres.

Florent Detroy

Florent Detroy

"Florent Detroy est journaliste économique, spécialisé notamment sur les questions énergétiques, environnementales et industrielles. Voir son site."
 
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L’Union européenne a mis le temps, mais elle aura finalement admis sa faute. Six ans après avoir été accusée de commettre un “crime contre l’humanité”, l’UE a finalement renoncé à soutenir… les biocarburants.

Le 10 juillet dernier, le Comité environnement du Parlement européen a voté pour un plafonnement de la part des biocarburants dans les réservoirs des véhicules européens. Six ans après que Jean Ziegler, rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation pour l’ONU, a accusé l’UE de participer à la sous-alimentation mondiale en accaparant des terres destinées à l’origine à la culture alimentaire, le paquebot européen vient de virer de bord.

Ce virage, s’il a plongé dans le désespoir de nombreux industriels européens, ouvre des opportunités intéressantes pour les autres producteurs, spécialistes des biocarburants de deuxième et troisième génération. Cette fois, l’avenir est entre les mains de la recherche.

L’Union européenne brûle ce qu’elle a adoré

Pour vous situer l’ampleur du changement, en 2008, l’UE ne parlait que de betteraves, de céréales et d’oléagineux pour remplir nos réservoirs d’essence. Le baril de pétrole flirtait alors avec les 150 $ et le monde occidental cherchait désespérément une porte de sortie.

Les biocarburants étaient considérés comme le Graal. Historiquement, l’Union européenne avait commencé à s’intéresser aux biocarburants quelques années auparavant, avant tout pour se débarrasser des surplus agricoles générés par la Politique agricole commune (PAC). Par la suite, la poursuite des objectifs environnementaux de l’UE (règle des 3X20) a renforcé l’importance de cette énergie. Il s’agissait de “verdir” l’essence et le gazole de la communauté.

L’UE décidait ainsi qu’elle incorporerait 10% de biocarburant dans le transport d’ici 2020. Alors que le taux avait déjà atteint 4,5% en 2012, les députés européens de la Commission environnement ont décidé début juillet de plafonner cette part à 5,5%. Cette directive doit encore être validée en septembre par l’ensemble du Parlement.

Le biodiesel plus polluant que le diesel

Nocifs pour l’alimentation, les parlementaires emmenés par Corinne Lepage soulignaient également depuis des années que ces carburants n’étaient pas moins polluants que les carburants classiques. Depuis 2008, ils expliquaient qu’en prenant en compte le CASI, le changement d’affectation des sols indirect, pour la production de biocarburant, leur bilan carbone était à relativiser.

C’est finalement une étude de l’organe de recherche européen qui aura porté l’estocade. Le Joint Research Center (JRC), le centre de recherche de la Commission européenne, a confirmé dans une étude récente que le biodiesel fait à partir de cultures comme le colza était plus polluant que le diesel lui-même.

Un CASI belli ?

L’UE n’est pas la première à s’intéresser au sujet. L’année dernière, en pleine flambée des prix historiques des prix alimentaires, le directeur général de la FAO, José Graziano da Silva, avait demandé aux Etats-Unis dans une tribune publiée dans le Financial Times de suspendre leur production de bioéthanol à partir de maïs afin d’éviter une crise alimentaire.

Pourtant, les Etats-Unis n’ont pas modifié leur politique, de peur que l’arrêt des subventions ne fasse chuter les cours des cultures. C’est déjà ce qui est en train de se passer avec la chute des cours du colza en Europe.

Surtout, cette nouvelle réglementation va fragiliser les industriels des biocarburants en Europe, dont le marché pèse pas moins de 13 milliards d’euros. Les industriels considèrent la prise en compte du CASI comme une attaque directe contre leur business model. Sofiprotéol, le géant français des huiles, a d’ailleurs annoncé depuis quelque temps qu’il allait fermer deux de ses usines du fait de l’absence de débouchés à sa production. Une troisième usine pourrait fermer à l’automne.

Sur quel biocarburant faut-il miser ?

La réponse est simple. Les biocarburants de deuxième génération, à partir de matière première non alimentaire, et de troisième génération, à base d’algues principalement, portent les nouveaux espoirs des écologistes. D’ailleurs, les premières discussions de la Commission en 2012 sur le sujet avaient évoqué un soutien à la recherche sur les biocarburants à base d’algues et de déchets.

[Pour y voir plus clair sur les marchés du carburant et des céréales, continuez votre lecture : tout est expliqué ici...]

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