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Comment éviter l’écroulement de l’économie française, quand la confiance n’est pas réunie et que la BCE est attaquée par la justice allemande sur son programme anti-récession
©ludovic MARIN / POOL / AFP

Atlantico Business

Les risques d’écroulement de l'économie dépendent moins du virus que de la qualité du déconfinement. L’enjeu est de faire redémarrer l’économie sans réveiller le Covid-19. L'opinion française se méfie de tout.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Bien qu‘Emmanuel Macron se refuse à utiliser des grands mots, il reconnaît que le choc économique est terrible et que le redémarrage de la machine est maintenant absolument indispensable. L’exercice est évidemment compliqué, mais il est partagé par la plupart de pays touchés par le virus, qui se retrouvent dans la même situation. Certains comme l’Allemagne a plus de moyens que d’autres comme la Grande Bretagne, n’empêche que tous ont ouvert leur chantier de déconfinement.

L’objectif est évidemment d'éviter l’effondrement des systèmes économiques. Actuellement, la France est à l’arrêt. Les systèmes de production ne sont pas détruits mais ils ne tournent pas pour cause de confinement.

Au premier trimestre, la production a baissé de 5,8% par rapport à l’année dernière. Le deuxième trimestre sera catastrophique avec une chute de 30 à 40 %. Des pans entiers de l’économie sont figés. La totalité de l’industrie du tourisme (hôtels et restaurants), la totalité des industries culturelles et évènementielles sont sinistrées. La totalité du commerce (hormis l’agro-alimentaire) a été fermée. Il n’y a guère que les professionnels de la santé, l’industrie digitale et les banques qui n‘ont pas cessé de tourner.

C’est donc l’Etat qui a pris le relais dans tous les secteurs en payant le salaire via le chômage partiel pour une bonne moitié des salariés. C’est l’Etat qui a maintenu hors d’eau, les entreprises qui sont privées de chiffre d’affaires à coup de subventions, d’aides fiscales et sociales et de prêts garantis.

Parallèlement, l’Etat ne perçoit plus aucune recette fiscale et sociale nette. Entre ce que l’Etat dépense et ce qu’il perçoit moins ou plus du tout, l’ensemble représente une facture de 180 milliards d’euros, d’où un déficit budgétaire abyssal de 10 % financé par de l’emprunt.

La France (comme l’Italie, l’Espagne, la Belgique, la Grande Bretagne) est donc en risque de faillite, c’est à dire dans l’incapacité de couvrir ses dépenses, si ces préteurs venait à abandonner la partie. D’un côté plus d’impôts, de l’autre, pas d’emprunts.

La crise sanitaire a provoqué une crise économique. Si on ne réussit pas à contrôler et enrayer cette crise économique, le pays va tomber dans une crise sociale avec un chômage de masse et une misère qui va entrainer une nouvelle crise sanitaire et miner la cohésion sociale.

Le redémarrage de l’économie est donc une condition de la survie. Et ce redémarrage dépend principalement de la confiance. C’est le moteur incontournable de la reprise économique. Actuellement, la confiance n’est pas au rendez vous. L’opinion publique doute de la résilience des systèmes de santé dont on disait qu’ils étaient les meilleurs du monde. L’opinion publique doute même de la capacité des dirigeants politiques qui ont accumulé les retards, les incertitudes et même les contradictions à redresser la barre.

Le retour de la confiance, nécessaire à la reprise, dépend de trois chantiers :

Le premier est sanitaire. Il est évident que tout dépend du virus. En l’absence de traitement et de vaccin, la disparition du virus dépend du succès du confinement et maintenant du déconfinement. Il faut que l’économie reparte sans réveiller le Covid 19, avec la possibilité de contrôler sa circulation. C’est la condition nécessaire, d’où la prudence nécessaire dans les modalités d’un retour à la liberté de circuler, de bouger et de travailler en paix. D’où la frilosité de certaines professions, l’inquiétude et la réserve de certains syndicats qui ont la main sur le bouton du « droit de retrait ». Une situation difficile à gérer surtout quand s’ajoutent à la prudence sanitaire des arrières pensées politiques ou syndicales.

Le deuxième chantier concerne tout se qui va se passer à l’étranger. Pour l’instant, les frontières sont fermées, les aéroports et les ports sont donc neutralisés et les avions restent au sol, comme la plupart des trains, autocars et camions sont en gare ou au parking. Les échanges commerciaux de par le monde représentent 30% du PIB. Les économies sont totalement interconnectées et dépendantes. Il faut donc que l’ensemble des économies mondiales redémarrent, ça va demander entre 6 mois et un an. A condition d’ailleurs que les gouvernements ne mettent pas des freins ou des obstacles politiques. Les rapports de force géopolitiques n’ont pas été bouleversés par le Covid 19, les ambitions des uns, les projets des autres, les antagonismes culturels et religieux vont évidemment réapparaitre.

Le troisième chantier va porter sur les changements engendrés par la crise sanitaire, et la reprise va dépendre de la capacité à gérer ces changements qui vont sans doute modifier le cahier des charges de la mondialisation ou l’organisation du travail dans les commerces et dans les entreprises en général.  Moins de voyages, moins de transports, plus de relocalisation et de souveraineté industrielle... Même si les changements seront très certainement beaucoup moins importants que ce que prophétisent différents responsables politiques qui se sont précipités sur cette pandémie et qui y ont vu les effets de la mondialisation et du capitalisme international, bref,  de tout ce qu’ils combattent.

Mais si la pandémie n’annonce pas de changements radicaux de modèles, il y aura néanmoins des évolutions notables dans le management de systèmes.

Mais la reprise va dépendre aussi de la refondation inévitable de l’Europe, si les Européens veulent sauver l’Union. Or, cette Europe n’a pas été à la hauteur du défi sauf la BCE, la banque centrale européenne, qui a compris très vite l’ampleur du désastre si elle n’ouvrait pas les robinets de la liquidité. La Commission et les dirigeants politiques n’ont pas ou peu réagi. Les plans d’aides et de soutien ne sont pas négligeables, mais ils sont loin de donner un élan politique à une construction politique qui aurait la force de négocier avec les deux acteurs mangeurs de la planète : la Chine et les USA.

La BCE, en plus d’avoir pris des initiatives très importantes pour organiser le sauvetage des économies européennes, se retrouve prise à partie par les Allemands, dont une partie des dirigeants voudraient que la banque centrale revienne à des comportements plus orthodoxes. La Cour constitutionnelle de Karlsruhe ne remet pas en cause le programme d’urgence contre la pandémie qui fut annoncé en mars pour un montant de presque 1000 milliards d’euros. Mais les réserves que font les juges allemands sur la politique de la BCE de rachats systématiques de dettes d’Etat est évidemment de nature à freiner les initiatives de Christine Lagarde pour réponde à la récession.

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