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Ce budget 2012 qui ne sera jamais exécuté en l'état...
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Rigueur

A un an de l'élection présidentielle, alors que la crise fait des ravages et que le Sénat vient de basculer à gauche, le budget présenté ce mercredi en Conseil des ministres a peu de chances d'être exécuté tel quel. Les luttes d'influence entre partis ont déjà commencé...

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Sur le papier tout est limpide : le gouvernement a mis fin à l'augmentation continue des dépenses de l'État pour la première fois depuis 1945 ; il s’agit donc d’«un changement historique». Ce budget serait, selon les ministres, un modèle d’équilibre puisqu’il va réduire les déficits, (en le ramenant de 7,5 à 4,5% en 2012), grâce à la réduction des dépenses mais aussi à des taxes et des hausses d’impôts ciblées, «qui ne pèseront pas sur la croissance». Les yeux rivés sur le « triple A » de la France, Nicolas Sarkozy appuie : «L’objectif sera tenu à l’Euro prêt ».

La journée de présentation du budget 2012 (au Conseil des ministres, aux commissions des Finances de l’Assemblée et du Sénat, en conférence de Presse et enfin par la bonne parole de François Baroin et Valérie Pécresse portée dans les journaux du 20H), a offert un condensé des débats qui vont nourrir l’actualité au cours des prochains mois. Si mercredi on n’a pas beaucoup entendu la gauche (le débat des primaires ne portait pas sur le budget 2012 !), dans les couloirs de l’Assemblée, ses élus ont commencé à tempêter contre des « coupes aveugles brutales » et promis une véritable réforme fiscale, (lorsqu’ils arriveront au pouvoir, ce dont ils ne doutent plus guère), avec l’instauration d’une tranche supérieure de 45% de l’impôt sur le revenu.

Au milieu, les centristes veulent également se faire entendre : oui, il faut une tranche supérieure de l’impôt sur le revenu, et pour ces champions de l’orthodoxie budgétaire le gouvernement peut mieux faire : la réduction des déficits résulte davantage de la pression fiscale que de la réduction des dépenses ; or, pour eux ce devrait être l’inverse.

Un contexte exceptionnel avec un Sénat à gauche

S’il est un budget qui ne sera sans doute jamais exécuté en l’état, c’est bien celui de 2012. Faut-il rappeler que nous sommes en année électorale, qu’il est présenté dans un contexte de crise financière de la zone euro, elle aussi sans équivalent depuis 1945, avec l’épée de Damoclès d’un défaut de la Grèce ? Et puis le Sénat vient de basculer à gauche (autre évènement historique), ce qui va obliger le gouvernement et la majorité à une gymnastique parlementaire inédite. Il faut donc avoir la foi chevillée au corps ou du moins faire comme si, pour le défendre, expliquer que le déficit baisse mais que la dette augmente, et faire adopter le projet.

Car, aussi bizarre que cela puisse paraître au premier abord, c’est avec sa majorité que le gouvernement aura le plus à batailler lors de ce débat qui va débuter le 18 octobre. Jusqu’à présent , sous les gouvernements de droite, on coupait la poire en deux pour les concessions aux parlementaires. Le gouvernement gardait toujours une petite réserve pour le Sénat ; ces derniers temps, avec des lois votées à la hussarde à l’Assemblée, (en raison de l’urgence décrétée et du temps législatif programmé qui n’existe pas au Sénat ), on peut même dire que c’est la Chambre Haute qui affinait les projets de loi. Dorénavant les compromis devront être trouvés et conclus à l’Assemblée, comme sous les cohabitations, lorsque le gouvernement était à gauche, et le Sénat à droite. Les sénateurs votaient soit contre les textes, soit les détricotait complètement ; ce sera à nouveau le cas.

Le Nouveau Centre, indispensable pour une majorité présidentielle

Alors, dès mardi dernier, Christian Jacob, le président du groupe UMP a annoncé des réunions de travail internes pour cadrer le débat budgétaire. Logique, car c’est à l’UMP, puis entre l’UMP et le Nouveau Centre que les problèmes vont se poser. Au sein du parti présidentiel, les points de vue des tenants de la Droite Populaire et ceux des gaullistes et des ex-centristes à la fibre sociale, sont déjà difficiles à concilier. Mais un nouveau sous-groupe est en train de se former, celui des élus ruraux ; ils vont être obligés « d’avaler » le gel des dotations aux collectivités locales sans forme de compensation. Indispensables pour une majorité présidentielle, les élus du Nouveau Centre vont constamment faire pression sur le gouvernement pour faire encore plus d’économies.

Ils se sont déjà lancés dans une surenchère pour la définition d’un haut revenu, celui qui sera soumis à la taxation exceptionnelle de 3%, à la suite de la supplique lancée par quelques grands patrons. Valérie Pécresse a indiqué que le seuil de 500 000 euros pour une personne seule est indicatif. Le gouvernement est ouvert à la discussion, ce qui signifie qu’il laissera aux députés le soin de l’abaisser, et de prendre ainsi la responsabilité de la fixation du couperet. Les centristes, eux, veulent abaisser ce seuil à 150 000 euros, l’UMP le verrait plutôt à 250 000.

Quant à la gauche, elle veut pérenniser cette taxation pour le moment exceptionnelle. On n’a pas encore entendu les arguments des uns et des autres sur la future taxe pénalisant les industries polluantes. Ce sont, avec le rabot des niches fiscales, les mesures emblématiques mais aussi symptomatiques de ce budget où il n’est plus question de ne pas augmenter les impôts. Après, ce ne sera qu’une question de dosage, en fonction du vainqueur de la présidentielle et de l’évolution de la crise internationale.

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