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Le berluconisme 
survivra-t-il au Cavaliere ?
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Désarçonné

Silvio Berlusconi affronte deux procès ce lundi 18 juillet, l'un pour recours à la prostitution de mineure, l'autre pour corruption. Alors que le premier ministre italien a annoncé sa retraite politique après les élections de 2013, l'occasion pour la gauche de tourner définitivement la page du berlusconisme s'approche-t-elle ? Ou faudra-t-il compter avec Angelino Alfano, le dauphin désigné du Cavaliere?

Philippe Foro

Philippe Foro

Philippe Foro est directeur du département d'histoire de l'université de Toulouse.

Spécialiste de l'Italie contemporaine, il est l'auteur de L'Italie de Mussolini à Berlusconi, avec Alberto Bianco (Milan, 2005).

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Atlantico : Comment s'explique la décision de Berlusconi de ne pas se représenter en 2013 : usure du pouvoir, affaires judiciaires ou revers électoraux ?

Philippe Foro : Sans doute un peu des trois. L'usure est accélérée par le fait qu'il est dans une situation politique difficile, suite aux camouflets des municipales et des référendums de mai et juin dernier : cela a sûrement joué dans sa décision. Mais il est vrai qu'il aura 77 ans en 2013 et qu'il est sur le devant la scène politique italienne depuis près de vingt ans.

Par ailleurs, la situation politique de sa majorité est très précaire : la Ligue du Nord pourrait lui retirer son soutien d'ici les élections du printemps 2013.

Enfin, sur un plan personnel, l'issue défavorable du procès Mondadori, son divorce et ses frasques sexuelles n'arrangent rien à la situation.

Le successeur qu'il a désigné, le Ministre de la Justice Angelino Alfano, est-il un vrai berlusconiste ?

Pendant longtemps, il n'a pas fait figure de favori pour la succession du Cavaliere : on parlait plus volontiers de l'actuel Ministre de l'Economie et des Finances, Giulo Tremonti, mais celui-ci s'est éloigné de Berlusconi, et il est affaibli par une affaire de financement d'appartement.

L'avantage d'Alfano est sa jeunesse (il a 41 ans), et le fait qu'il soit une créature du berlusconisme : il peut donc assurer une certaine continuité, même si au niveau de la personnalité son mentor est irremplaçable.

Toutefois, il est pour l'instant difficile de savoir si Alfano sera téléguidé par Berlusconi à la tête du Parti des Libertés (PDL) car, bien souvent, les dauphins politiques échappent à ceux qui les ont créés. Ce serait dans son intérêt de s'émanciper.

Comment caractériser le "berlusconisme" ? Peut-on dire que le PDL est un « parti berlusconiste » ?

Le berlusconisme est né dans des circonstances bien particulières, à la faveur de l'effondrement du système politique italien en 1992-93. Sans cela, le Cavaliere n'aurait certainement jamais fait cette carrière.

Le berluconisme est aussi le résultat des évolutions sociologiques de la société italienne, avec la disparition progressive des grandes structures de masse qui encadraient la société italienne depuis 1945 - le Parti communiste, la Démocratie chrétienne, l'Eglise, les grands syndicats... Il y a eu une tendance à l'individualisation des électeurs : la réussite individuelle, dont Berlusconi était le symbole, est devenue de plus en plus importante.

Enfin, le berlusconisme repose sur des qualités personnelles : s'il a des défauts, il est indéniable qu'il est un meneur et qu'il est le champion des trouvailles politiques ; il sait être le premier, même quand il est dans l'opposition.

Cela va-t-il lui survivre ? Peut-être, mais sans homme charismatique pour le porter, car je ne vois actuellement aucun leader capable d'avoir son envergure.

Les Italiens sont-ils prêts à tourner définitivement la page du berlusconisme, avoir y avoir succombé à deux reprises, en 2001 et 2008 ?

Tout dépend de l'alternative qui leur est proposée. Aujourd'hui, la majorité de centre-droit de Berlusconi a éclaté, car Gianfranco Fini lui a tourné le dos.

Quant au centre-gauche, elle a peut-être trouvé un leader en la personne de Pier Luigi Bersani, mais a-t-elle un programme ? On peut même se demander si elle aurait intérêt à arriver rapidement au pouvoir, au vu de la situation économique et financière actuelle. Il lui faut travailler son programme pour plaire autant aux anciens communistes qu'aux anciens démocrates chrétiens, et il n'est pas évident qu'elle ait les moyens de gouverner comme elle le souhaite si elle retrouve le pouvoir.

Tout dépendra en fait de la date des élections, qui sont censées avoir lieu en 2013, mais pourraient être avancées à l'automne. Pour l'instant, la majorité PDL-Ligue du Nord n'y aurait aucun intérêt, au regard de sa situation électorale. Mais l'Italie a aujourd'hui besoin d'un pouvoir clair et fort pour faire les choix drastiques que sa situation économique lui imposera.

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