Benoist Apparu : "Il est difficile de considérer qu’au nom de nos valeurs Nadine Morano ne peut plus nous représenter aux élections régionales, mais qu’elle continue à nous représenter au Parlement européen" <!-- --> | Atlantico.fr
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Nadine Morano est encore candidate à la primaire du parti "Les Républicains".
Nadine Morano est encore candidate à la primaire du parti "Les Républicains".
©Reuters

Entretien politique

Ancien ministre délégué chargé du Logement, après avoir été secrétaire d'État, Benoist Apparu est désormais député-maire de Châlons-en-Champagne. Il revient notamment sur l'affaire Morano, les enjeux de la primaire des Républicains et la question de l'identité nationale.

Benoist Apparu

Benoist Apparu

Benoist Apparu est un homme politique (UMP). Il est actuellement député de la Marne et maire de la ville de Châlons-en-Champagne. Il a été ministre délégué chargé du logement de février à mai 2012

 

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Atlantico : Qu’avez-vous pensé du discours de François Hollande devant le Parlement européen, qui a dit à Marine Le Pen : "La seule voie possible pour celles et ceux qui ne sont pas convaincus de l’Europe, c’est de sortir de l’Europe tout simplement. Il n’y a pas d’autre voie. Celle-là est terrible, mais elle est celle de la logique. Sortir de l’Europe, sortir de l’euro, sortir de Schengen et même". Certains pays doivent-ils sortir ? Est-ce en effet la seule voie ?

Benoist Apparu : François Hollande s'adresse à Marine Le Pen et lui dit en substance : "Arrêtez de dire que vous voulez inventer une autre Europe. Ce que vous voulez c'est une Europe sans euro, sans Schengen, etc. Il a raison. Ce que souhaite Marine le Pen c’est la fin de la construction européenne. Il y a effectivement plusieurs façons d’aborder la construction européenne : y mettre fin comme le souhaite madame Le Pen, continuer à considérer que l’UE est le cœur de l’Europe ou bien d'intégrer beaucoup plus la zone euro, d'en faire le cœur de l'Europe.

Historiquement la construction européenne c’est avant tout l'Union européenne et non la zone euro. Peu à peu deux cercles se sont constitués : la zone UE avec 28 pays et la zone euro, plus restreinte, avec 19 pays. La tradition, c'était de renforcer la zone UE. Aujourd'hui, il me semble qu’il faut inverser les choses et partir du principe  que le cœur de l'Europe doit être la zone euro pour se doter de compétences renforcées en matière économique et fiscales. Je crois impossible de sortir de l’Euro et donc de la construction européenne. C'est la ruine assurée de la France de retrouver avec le Franc dans la société mondialisée que l'on connait. Quel serait notre poids avec 65 millions d'habitants et 1 ou 2% du PIB mondial. Ce serait la relégation en 18ème division ! Seul l'euro représente l'avenir mais pour éviter des déséquilibres internes il faut aller plus loin en mettant en place une harmonisation fiscale et sociale beaucoup plus forte.

François Hollande a ajouté : "Si vous pouvez, sortir de la démocratie, parce que parfois, en vous entendant, je me pose cette question." Pensez-vous, comme lui, que la Présidente du FN soit tente de sortir de la démocratie ?

Je ne ferai pas de procès d'intention de ce type-là. Parlons plutôt du fond.

Concernant "l'affaire Morano", vous avez plaidé pour son exclusion pure et simple, pour quelle(s) raison(s) ? Elle ne fait que poser une question, elle ne prône pas non plus l’inégalité des races. Que lui reprochez-vous ?

Deux sujets très différents. Commençons par le deuxième qui est le plus important. Quand Nadine Morano dit que  "La France est de race blanche", elle définit la nation française par la race. Ce n'est pas ma conception de notre nation qui est tout sauf une race. Deuxième point, il n’y a qu’une race, c’est la race humaine. Ce sont des désaccords structurels. Ce n'est pas juste un petit désaccord sur les 35 heures ou sur une stratégie électorale. On est là sur une autre échelle...

Second point. Je n'ai pas demandé son exclusion des Républicains. J'ai demandé qu'elle soit démise de ses fonctions pour les élections régionales. Puis la question m'a été posée, par un de vos confrères  s’il fallait qu'elle soit également exclue de l'UMP. J'ai répondu que ce n'était pas mon exigence première puisque ce n'est pas l'actualité du moment. L'actualité c'est la tête de liste aux élections régionales. Ensuite j’ai suggéré de la cohérence. Il est difficile de considérer qu’au nom de nos valeurs Nadine Morano ne peut plus nous représenter aux élections régionales, mais qu’elle continue à nous représenter au Parlement européen ou à la vice-présidence de la commission nationale d'investiture. Si on est cohérent, on doit alors en tirer des conclusions. Prenons un exemple plus caricatural encore. Nadine Morano ne peut plus nous représenter aux élections régionales mais elle serait à même de se présenter aux primaires au nom des Républicains.

Vous l'avez dit, elle est toujours vice-présidente de la Commission Nationale d’Investiture. Comprenez-vous cette décision de Nicolas Sarkozy ?

Je vois mal comment on peut prendre une moitié de décision. Je comprends la position de notre Président car la question d'actualité c'était celle des régionales mais il faudra sûrement qu'on en rediscute. Je reprends l'exemple que j'ai cité plus haut. Dans moins d'un an maintenant les membres des Républicains qui veulent se présenter aux primaires, vont devoir obtenir un certain nombre de parrainages de militants et d'élus. Elle a annoncé son souhait de participer aux primaires. Autrement dit elle pourrait potentiellement se porter candidate à l'élection présidentielle en notre nom mais pas aux élections régionales ?

Elle tenait récemment des propos flatteurs sur Alain Juppé, si elle décidait de le soutenir accepteriez-vous ce soutien ?

Vu les déclarations d'Alain Juppé sur elle actuellement, et vu ses déclarations sur lui, j'en doute fortement. Les probabilités étant infinitésimales je ne vois pas l'intérêt de m'arrêter sur ce type de probabilités.


Existe-t-il une difficulté de la part du parti à se situer sur ces questions d’identité nationale ? Y a-t-il encore une pensée commune chez vous sur cette thématique ?

Je ne le crois pas. Preuve en est d'ailleurs puisque qu’il y a une unanimité sur son exclusion de la liste des régionales. Du président des Républicains en passant par Alain Juppé, Bruno Le Maire ou François Fillion, tout le monde a condamné les propos de Nadine Morano qui s'est retrouvée totalement isolée sur le fond. Il y a eu une condamnation unanime de la prise de position considérant que ce n'était absolument pas la nôtre.

Sur les questions d'identité nationale, il peut parfois y avoir des nuances par ci ou par-là mais globalement je pense bien qu'on a à peu près, les uns et les autres, sur la même définition de ce qu'est la nation française et de ce qu'elle doit être. On a pu avoir le sentiment qu'il y a un débat conséquent entre Nicolas Sarkozy et Alain Juppé sur l'utilisation des termes d'intégration défendu par Alain Juppé et celui d'assimilation évoqué par Nicolas Sarkozy. Quand vous regardez le contenu réel des propositions des uns et des autres les différences ne sont pas si énormes que cela. Là où il y a une différence c'est sur la façon d'aborder les sujets et l'utilisation que l'on veut en  faire. Pour certains, ce sujet-là, est le plus important du programme que l'on doit porter devant les français. Pour d'autre, il reste très important mais il y en d'autres qui sont tout aussi conséquents. Cette dernière position est la nôtre. Il y a ce type de différences qui sont plus des différences de tactique que des différences idéologiques.

Concernant la primaire des Républicains, Nicolas Sarkozy est en train de rédiger un socle commun qu’il entend imposer à tous les candidats à la primaire, Alain Juppé va-t-il s’y conformer ? N’est-ce pas la parade contre ces risques d’implosion ?

Nicolas Sarkozy a réaffirmé en bureau politique que ce socle ne s'imposerait pas aux candidats à la primaire. Il l'a dit et je n’ai aucune raison de ne pas le croire. Il y aura un projet des républicains et c’est bien normal.  Que dirait-on s'il n'y avait pas de projet des Républicains ? Il est indispensable que le président des Républicains prépare le projet politique du parti. Il est plus que légitime qu'il le fasse voter par les militants, il s'y est engagé au moment de l'élection interne. Par contre ne peut obligatoire pour tous les candidats à l'élection présidentielle parce que dans notre histoire et dans notre République ce ne sont pas les partis qui font les programmes des candidats à l'élection présidentielle.

Existe-t-il toujours un risque pour qu’Alain Juppé se présente hors du parti si les primaires ne sont pas convenablement organisées ?

Nous sommes confiants mais vigilants. Confiants parce que les discussions, les négociations se déroulent bien pour l'instant. L'ensemble des grandes questions – primaires ouvertes/pas ouverte, qui peut voter/qui ne peut pas voter – sont validées d'une façon qui convient à tout le monde, Nicolas Sarkozy en tête. Il reste des milliards de questions plus techniques à régler. Notamment la question financière qui est une question non négligeable. Pour l'instant tout se déroule plutôt bien. Je suis confiant, parce que les choses se passent bien, et je suis vigilant parce qu'il reste des questions complexes à traiter.

Sur la question de savoir si Alain Juppé se présente hors du parti Les Républicains, c'est autre chose. Pour l'instant j'insiste, tout se passe bien et je ne vois pas pourquoi ça se passerait mal dans 6 mois. Si nous commençons à chercher la petite bête et à s'imaginer que les choses vont mal se passer nous sommes mal barrés. Mais si c’est le cas on en tirera les conséquences, évidemment.

Sur quoi Alain Juppé entend il accélérer dans les 6 prochains mois pour la primaire et faire la différence avec Nicolas Sarkozy ?

Nous allons mettre en œuvre notre stratégie et notre timing, sans accélérer ni ralentir avec une montée en puissance au fur et à mesure que la primaire se rapprochera. Il y a eu un premier livre en Septembre sur l'éducation, il y en  a un deuxième sur le rôle régalien de l'Etat fort – sécurité, immigration, laïcité – qui sortira en janvier. Un troisième qui sortira sur l'économie au printemps. Un quatrième à l'automne prochain, juste avant la primaire, qui ramassera l'ensemble des préconisations faites jusqu'alors plus l'Europe et l'international. On maintient ce calendrier là et il n’y a aucune raison d'en changer. Concernant le terrain nous sommes en ce moment concentrés sur les élections régionales et Alain Juppé se déplace pour soutenir des candidats en campagne. Chaque chose en son temps. Aujourd'hui ce qu'attendent les militants, les électeurs et les candidats, c'est qu'on les soutienne pour les élections régionales.

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