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A un mois des élections, les démocrates suédois (extrême droite) aux portes du pouvoir grâce aux questions migratoires
©Reuters

Europe

Pour autant, rien ne dit qu'ils seront en mesure de gouverner du fait du jeu des coalitions.

Jean-Yves Camus

Jean-Yves Camus

Chercheur associé à l'Iris, Jean-Yves Camus est un spécialiste reconnu des questions liées aux nationalismes européens et de l'extrême-droite. Il est directeur de l'Observatoire des radicalités politiques de la Fondation Jean-Jaurès et senior fellow au Centre for the Analysis of the Radical Right (CARR)

Il a notamment co-publié Les droites extrêmes en Europe (2015, éditions du Seuil).

 

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Atlantico : Selon un sondage Yougov relayé le 13 août, les "Démocrates de Suède"  seraient en tête des intentions de vote des prochaines élections qui se tiendront en septembre prochain. Dans un pays ou le taux de chômage est inférieur à 6%, faut-il voir la thématique de l'immigration comme totalement structurante du débat politique suédois ?

Jean-Yves Camus : Les sondages donnent à minima les membres du parti populistes "Démocrates de Suède" bien au-delà de la barre des 20% et dans certains cas en tête des intentions de vote devant les socio-démocrates. Le scrutin est fait de telle façon qu'il faut regarder les projections en termes de coalition. D'un côté ce que ferait la coalition des socio-démocrates, des verts et du petit parti de gauche radicale, de l'autre les divers partis de droite et de centre droit et en troisième ce que feraient les démocrates suédois.

Il existe un consensus très large en Suède sur le fait qu'il n'y aura pas d'alliances avec ce parti. Ce qui fait qu'une des hypothèses si ces derniers arrivent au-dessus des 20 %, c'est que l'on ait un parlement qui soit bloqué et que l'on retourne assez rapidement aux urnes à moins qu'émerge une sorte de consensus national à minima que reposerait sur le refus de coopérer avec ces derniers. C'est donc un scrutin qui n'est pas joué.

Ensuite c'est bel et bien l'immigration et l'identité qui constituent la pierre angulaire du programme des "Démocrates de Suède" et de leur succès. En Suède comme dans les autres pays scandinaves, le chômage existe. La situation économique n'est plus aussi florissante qu'à l'époque. Mais même si ces pays sont en bonne santé économique,il y a quand même des formations de droite populiste anti-immigration qui soit sont au gouvernement (Norvège et Finlande) soit détiennent au Parlement un pouvoir de faiseurs de rois (Danemark) ou s'apprêtent à être dans cette situation. C'est bien que le problème ne se résume pas à la sphère économique (même si ces partis refusent les politiques néolibérales) mais englobe aussi l'identité. Identité face à la globalisation, face à l'Europe, mais aussi identité des Suédois face aux minorités du pays.

Quelles sont les racines de ce parti et quels ont été les moteurs de sa progression ? Quels sont les partis européens pouvant lui être assimilés ? 

Il y a une hétérogénéité dans les groupes populistes de droite scandinaves avec une spécificité suédoise. Le Parti du progrès norvégien, le Parti populaire danois, ou encore le parti Vrais Finlandais sont des formations qui sont issues de droites qui se sont radicalisés. Leurs dirigeants sont en fait des gens qui ont milité dans des formations conservatrices modérées et qui, à un moment donné sur la question de l'Europe, de l'immigration, de l'identité nationale se sont radicalisés pour monter leur propre parti.

En Suède, c'est un peu différent. Dans les années 90 les démocrates suédois étaient une formation qui admettait en son sein des individus qui appartenaient à l'extrême droite la plus "dure" qui, fin 90, sont carrément passés aux actions terroristes (attentats visant des policiers, des journalistes…). Ils ont été bannis du parti et ce dernier s'est ensuite focalisé sur ce qui commençait à émerger comme la contestation de la tradition d'accueil des réfugiés et des immigrés.

Quel pourrait être l'impact, au niveau européen d'une victoire des Démocrates de Suède ? 

Ce sera un nouvel électrochoc qui viendra continuer la série de ceux qui sont survenus à chaque victoire politique d'un mouvement populiste en Europe.

Le problème c'est qu'à partir du moment où il est probable que se dégagera au final un consensus pour laisser les Démocrates Suédois en dehors de toute formule de gouvernement, une fois de plus, il y aura la tentation de se rassurer à bon compte en pensant que la démocratie a gagné. Mais c'est un raisonnement à court terme. L'année prochaine nous avons des élections européennes et presque simultanément nous aurons beaucoup de scrutins nationaux à travers l'Union européenne. Cela risque d'être une année particulièrement compliquée. D'abord il y aura les élections en Suède, puis les législatives en Lettonie, en novembre les élections municipales en Pologne (avec l'objectif clairement annoncé du gouvernement de reprendre les grandes villes polonaises)... C'est une année à risque.

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