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7 milliards d'êtres humains : le défi que nous ne pourrons relever sans changer nos modes de vie
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Démographie

Selon l'ONU, c'est ce lundi que la planète passe le cap des 7 milliards d'êtres humains. Mais entre l'Occident et les pays du Sud, les soucis démographiques ne sont bien-sûr pas du même ordre...

Gilles  Pison

Gilles Pison

Gilles Pison est démographe, professeur émérite au Muséum national d’histoire naturelle, conseiller de la direction de l’INED (l’Institut National d’Etude Démographique). Gilles Pison a publié « Atlas de la population mondiale » aux éditions Autrement. 

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Atlantico : Nous sommes désormais 7 milliards d'êtres humains sur la planète. Est-ce supportable pour la Terre ?

Gilles Pison : La population mondiale s’accroît, ce n’est pas nouveau. Elle a été multipliée par sept au cours des deux derniers siècles, et devrait continuer à croître jusqu’à atteindre environ 10 milliards d'habitants à la fin du XXIe siècle.

Est-ce que sept milliards d'habitants aujourd'hui, ou dix milliards, demain, c’est trop ? Les avis divergent, car nul n'est capable de dire quel est le nombre optimal d'individus que notre planète est capable d'accueillir. Il y a deux siècles, nous n'étions qu'un milliard et la proportion de personnes qui mourrait de faim était beaucoup plus importante. Sans doute pourrons nous nourrir 10 milliards d'habitants demain aussi bien, voire mieux, que 7 milliards aujourd'hui.

La question est plutôt de savoir comment vivront-ils ? Le milliard d'individus vivant dans les pays industrialisés du Nord est en effet, à lui seul, à l'origine de l’essentiel du réchauffement climatique survenu jusqu'ici. Très gourmand en ressources énergétiques et très polluant, son mode de vie n'est pas applicable à une population de 7 milliards.

Il est illusoire de penser pouvoir réguler la population mondiale à l'horizon des cinquante prochaines années. Paradoxalement, si le nombre d'habitants de la planète augmente, c'est à un rythme décélérant. Les hommes ayant fait le choix d’avoir peu d’enfants, et de s'assurer une vie plus longue et de qualité. L’humanité n’échappera toutefois pas à un surcroît de 1 à 3 milliards d’habitants d’ici un demi-siècle en raison de l’inertie démographique, que nul ne peut empêcher. Il est possible d’agir en revanche sur les modes de vie, afin de les rendre plus respectueux de l’environnement et plus économes en ressources. La vraie question, celle dont dépend la survie de l’espèce humaine à terme, est finalement moins celle du nombre des hommes que celle de leur mode de vie.

Al Gore proposait en juin dernier de "faire moins d'enfants" pour encourager la stabilisation démographique. Assistons-nous à un retour de la problématique malthusienne, soit la nécessité d'instaurer un contrôle des naissances par des politiques de quotas ?

Si la population continue d’augmenter, la croissance démographique décélère. Elle a atteint un maximum de plus de 2% par an il y a cinquante ans, puis a diminué de moitié depuis (1,1% en 2011), et devrait continuer de baisser jusqu’à la quasi stabilisation de la population mondiale dans un siècle.

Cette décélération de la croissance tient à la diminution de la fécondité, 2,5 enfants en moyenne par femme aujourd’hui dans le monde, contre le double (5 enfants) en 1950. La fécondité devrait continuer de baisser dans les prochaines années.

La moyenne mondiale de 2,5 enfants par femme recouvre cependant de grandes disparités selon les régions et pays. La fécondité est la plus basse à Taïwan (0,9 enfant par femme) et la plus élevée au Niger (7 enfants). Parmi les régions du monde où la fécondité est encore élevée, soit supérieure à quatre enfants, il est question en 2011 de presque toute l'Afrique subsaharienne, d'une partie des pays de la péninsule arabique, et des régions allant de l'Afghanistan jusqu’au Nord de l'Inde, en passant par le Pakistan. C’est là que l’essentiel de la croissance démographique mondiale aura lieu dans l’avenir.

Les politiques démographiques ont donc un rôle à jouer dans ces régions du monde, notamment en offrant aux femmes qui le souhaitent la possibilité d'espacer ou de limiter les naissances. Mais ces politiques ne peuvent pas imposer un taux de fécondité, sachant qu'elles ne sont efficaces que quand elles s'accompagnent du souhait des familles d’avoir moins d’enfants.

La croissance de la population mondiale est-elle un problème sous-estimé par les politiques et gouvernements actuels ?

L’horizon des politiques, ce sont les prochaines élections, soit une réflexion sur le court terme. L’horizon des démographes, une ou deux générations, soit un regard sur le long terme. D’où sans doute une difficulté pour les politiques de prendre en considération les évolutions démographiques.

Yves Cochet, député Vert de Paris, met en avant l'idée que le sujet démographique est tabou en Europe. Selon lui, pour l'esprit européen, la croissance de la population équivaut à la croissance économique. Existe-t-il une part de vérité dans son propos ?

Concernant les pays développés, vouloir réduire leur fécondité déjà basse paraîtrait étrange. Les pays à très basse fécondité, comme l'Allemagne, le Japon, la Corée du Sud, cherchent plutôt à relancer leur natalité, car ils craignent un vieillissement démographique trop marqué et un manque de main d’œuvre à long terme. L'immigration peut en partie compenser la faible natalité, mais ne résout pas indéfiniment le problème.

Par ailleurs, les familles nombreuses sont devenues rares dans les pays développés. En réduire encore le nombre ne changerait guère le cours des choses. D'après ce constat, la suppression des aides de l'État dans leur cas n'est d'aucune utilité, et n'encourage pas à leur disparition. En revanche, cela les enfonce encore un peu plus dans la pauvreté.

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