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2021, l’année de la reconstruction, à condition de répondre à 3 urgences : déployer le vaccin, sécuriser les banques et réformer l’administration
Si 2021 est l’année de sortie de la crise et de la reconstruction d’une vie normale, il faudra répondre à trois urgences incontournables : la vaccination générale, le renforcement du système bancaire et la rénovation du fonctionnement administratif.
Jean-Marc Sylvestre
Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.
Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.
Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.
« L’espoir... sauf que... ». Voilà en bref le message d’Emmanuel Macron. Ce message présidentiel du nouvel an ne restera pas gravé dans l’histoire. Mais quoi dire au terme d’une année horrible où rien de ce qui était prévu n’a pu se réaliser. Rien sauf le pire du pire.
D’où le leitmotiv : « S’en sortir et retrouver une vie normale .» De tous les vœux échangés lors de cette nouvelle année, le plus partagé est celui d’un retour à la vie normaleet d’une reconstruction.Surtout, surtout qu’il ne se passe rien. Plus rien.
La grande majorité des Français, mais pas que les Français, ne se souhaitent qu’une seule chose, préalable à toutes les autres ambitions : pouvoir retrouver des conditions de vie personnelle, familiale, professionnelle et sociale tout à fait normales.
En fait, les Français sont dans leur grande majorité revenus à des revendications très basiques... Finies les velléités de révolution émises par les plus radicaux des gilets jaunes, oubliées ou momentanément éteintes les utopies des écologistes qui voyaient dans cette crise l’annonce d’un monde nouveau avec moins de croissance et donc moins de risques climatiques. Même dans la classe politique, le brouhaha des critiques n’a pas cessé, mais on n’entend pas de solutions véritablement alternatives et crédibles. Tous les responsables politiques sont étrangement discrets. Et même à l' extrême gauche ou à l'extrême droite, on attend pour voir et on se souhaite de revenir à la vie d’avant. Celle où il n’y avait pas de masque, pas de test et pas de risque. Celle où on pouvait retourner au théâtre, au cinéma et voir ses amis... « Avant, quand on pouvait s’embrasser » résument les plus jeunes et les moins jeunes aussi.
C’est un vœu partagé, rassembleur, que personne ne peut refuser. La vie normale. Mais ce retour à la normalité va passer par une phase de reconstruction.
La reconstruction matérielle ne sera pas compliquée. Rien n’a été détruit. Il suffit de tourner la clef dans le moteur de la vie et faire le plein de carburant. La crise épidémique n’a rien à voir avec la guerre. Il y a relativement peu de morts, rien n’a été détruit, sauf le rapport de confiance qui nous lie aux autres parce que chacun de nous est porteur d’un risque invisible mais omniprésent.
Le retour à la vie normale passe donc par trois conditions, incontournables et urgentes à régler.
La première condition, c’est évidemment la vaccination générale. C’est le seul moyen d’installer une immunité collective qui permette donc d’immuniser tout le monde et d’empêcher la propagation du virus. Le vaccin est indispensable par ce qu’il protège celui qui est vacciné mais aussi les autres. Le problème, c’est que la généralisation à l'échelle mondiale d’un tel système de protection représente un travail de titan. D’abord, dans la mise au point du ou des vaccins, et cela dans la période la plus rapide qui soit. Ensuite, ça nécessite une organisation et une logistique que peu de pays peuvent déployer rapidement. Enfin, il faut convaincre les habitants de se faire vacciner ou alors, à défaut, rendre l’opération obligatoire ou conditionnelle de telle ou telle activité. Les transports publics vont demander une preuve de vaccination, les entreprises aussi etc. Mais ça n’est pas gagné.
La deuxième condition va être de surveiller et de protéger le système bancaire en général. Pourquoi? Tout simplement parce qu’on a rendu la crise sanitaire et économique indolore avec des amortisseurs sociaux, des moratoires fiscaux, des perfusions et des béquilles pour tous ceux qui en avait besoin. Cette formidable entreprise de secours mutuel a été financée par de la dette. La dette de l’Etat est considérable (120% du PIB) la dette des entreprises est énorme. La première est portée par les banquiers centraux, la dette des entreprises et des particuliers est gérée par les banques, même si beaucoup de prêts sont garantis par l’Etat. Or, plus on va sortir de la crise, plus on va découvrir des entreprises malades.
Les banques sont en bout de chaine. Il leur remonte les Bad-dettes, les bilans et les risques. Il va falloir renforcer les banques pour éviter qu’elles ne craquent. Les difficultés bancaires sont systémiques. D’où la vigilance des banques centrales.
La troisième condition sera évidemment de préparer la remise à plat du fonctionnement de l’appareil d’Etat, parce que si la crise sanitaire a marqué, c’est bien l’incapacité de l’administration française à faire face aux difficultés. Cette administration dont on a souvent vanté les mérites au niveau mondial s’est révélée quasiment en faillite. Ce sont les entreprises privées qui en France nous ont sauvés du désastre. Pour les masques, pour les tests, pour les analyses, pour les vaccins, ce sont à chaque fois, les entreprises privées qui ont, très souvent contre l’Etat, en dépassant les résistances administratives, juridiques et politiques, en se mettant même parfois hors la loi, c’est le secteur privé qui nous a évité l’effondrement total. Et actuellement encore, ce sont les entreprises qui vont tordre le bras des fonctionnaires pour débloquer la question des vaccins.
Alors l’Etat et les collectivité locales ont payé, c’est vrai. Beaucoup d’argent a été dépensé mais l’efficacité n’a jamais été au rendez-vous.
L’éducation nationale et les universités ont fait faillite. L’enseignement privé, lui, a continué de fonctionner.
Le système de santé considéré comme le meilleur du monde et sans doute comme le plus cher, a lui aussi failli devant l’ampleur de la tâche.
On a l’impression qu‘à tous les étages de l’administration, personne n’a réussi à prendre ses responsabilités.
L’Etat dépense un « pognon de dingue » mais ne produit ni service ni procédure efficace. Il ressemble étrangement à l’Etat soviétique quelques mois avant la chute du mur de Berlin
Il faudra donc tout remettre à plat : redéfinir son périmètre, ses fonctions et ses moyens. Revenir sans doute à un état régalien qui remettra la plupart des fonctions opérationnelles à des opérateurs du privé.
Il faudra aussi revoir les personnels, leurs qualifications, leurs chaines de commandement et leurs rémunérations.
Cet aspect du chantier de la reconstruction sera le plus difficile à mettre en œuvre parce qu’il touche à des fondamentaux du modèle français. Et notamment son modèle de gestion paritaire de l’espace social.
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