Budget 2014 : le gouvernement en pleine opération maquillage des comptes publics <!-- --> | Atlantico.fr
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"L’annonce d’une diminution des dépenses à hauteur de 14 milliards en 2014, sans le moindre plan détaillé pour y parvenir, n’est pas crédible."
"L’annonce d’une diminution des dépenses à hauteur de 14 milliards en 2014, sans le moindre plan détaillé pour y parvenir, n’est pas crédible."
©Reuters

Plus c'est gros, plus ça passe

Jean-Marc Ayrault a annoncé mercredi 11 septembre en Conseil des ministres que le gouvernement entendait économiser 15 milliards sur ses dépenses publiques, au lieu des 14 milliards initialement prévus.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Les amateurs de propagande politique vivent de très belles heures en France, et, après les roulements de mécanique dignes d’une cour d’école auxquels nous avons assisté sur la Syrie, les annonces sur le budget 2014 les ont portés au pinacle de la jouissance communicationnelle. Depuis l’invention de la science prolétarienne par Lyssenko, en Union Soviétique, et l’enfumage des armes de destruction massive en Irak, rarement un gouvernement a osé mentir avec un tel enthousiasme.

Après avoir annoncé un budget "sérieux" pour 2014, fondé sur 14 milliards de réductions de dépenses, le ministre des Finances Pierre Moscovici a en effet reconnu, sans pouffer, que le déficit budgétaire atteindrait 4,1% du PIB en 2013. Manifestement, cette annonce n’a gêné personne. Elle en dit pourtant long sur le peu de cas que le ministre des Finances fait de la sincérité budgétaire.

Rappelons en effet les annonces triomphalistes faites en 2012 sur le budget 2013 : le gouvernement parlait alors de ramener le déficit 2013 à 3% du PIB, au nom d’un redressement historique des comptes publics. Avec la gauche, on allait voir ce qu’on allait voir : le solde budgétaire devait s’améliorer de 22 milliards!

Et on voit. Avec malice, le gouvernement se réfugie derrière quelques pourcentages aseptisés, abstraits, pour cacher comme il peut une misère qui soulève quand même de vraies inquiétudes sur la situation financière du pays.

Rappelons quelques ordres de grandeur : en 2012, l’Etat avait encaissé 286 milliards d’euros de recettes. En 2013, le gouvernement en projetait, à force de hausses d’impôts, 307 milliards. Soit une augmentation historique, pour le coup, de 21 milliards d’euros. A ce stade (au 31 juillet), il a d’ores et déjà perçu 176 milliards, contre 162 milliards à la même époque l’année précédente. Les 2/3 du chemin sont parcourus.

Du côté des dépenses, le gouvernement avait prévu, pour 2013, presque 371 milliards de dépenses, soit 3 milliards de moins qu’en 2012. Une baisse de 1% des dépenses, cela paraissait réaliste. Las... Le gouvernement se révèle totalement incapable de réussir cette réduction de dépenses de 1%.

Au 31 juillet, les dépenses de l’Etat sont en effet passées de 226 à plus de 235 milliards d’euros en un an (à période égale donc). C’est pas beau ça ? Là où le gouvernement avait annoncé une baisse des dépenses, il a réussi la prouesse de les relancer de plus de 4%.

On connaît les mauvaises raisons invoquées par Bercy pour justifier ce dérapage majeur : des dépenses exceptionnelles, qui ne devaient pas peser sur le déficit final. Là encore, pipeautage manifeste : les dépenses exceptionnelles pèsent bien sur le déficit final. Et, de toute façon, elles n’expliquent qu’une partie du naufrage. En réalité, en chiffres bruts, les dépenses de fonctionnement de l’Etat ont méchamment glissé de plus de 20% en un an.

Face à ce mur qui s’approche à la vitesse d’une astéroïde, Bercy tente bien des manœuvres d’urgence, comme le redressement mystérieux des comptes selon des techniques que l’on aimerait connaître. Au 30 juin, le déficit avait augmenté de 3 milliards par rapport à l’an dernier. Au 31 juillet, il a diminué de 5 milliards. Cela sent l’opération "poussière sous le tapis" bien connue de la direction du Budget.

Il n’en demeure pas moins qu’avec une augmentation des dépenses de près de 10 milliards, là où l’on s’attendait à une diminution d’un milliard, le gouvernement a démontré sans conteste son incapacité à gérer l’Etat. L’annonce d’une diminution des dépenses à hauteur de 14 milliards en 2014, sans le moindre plan détaillé pour y parvenir, n’est donc nullement crédible.

Ce que Moscovici a annoncé, c’est en effet un cost-killing de 5% sur le budget de l’Etat. Soit un retour à la situation laissée par Nicolas Sarkozy. Une affaire qui ne manque pas d’être cocasse. Et un budget, bien évidemment, de propagande.

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