"Mein Kampf, histoire d'un livre" : qui sont ceux qui achètent (et parfois plébiscitent) encore par milliers le brûlot antisémite de Hitler ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
"Mein Kampf, histoire d'un livre" : qui sont ceux qui achètent (et parfois plébiscitent) encore par milliers le brûlot antisémite de Hitler ?
©DR

Bonnes feuilles

C'est un des livres politiques les plus vendus de tous les temps. Un des plus terrifiants aussi. Diffusé à 12 millions d'exemplaires en Allemagne, à des centaines de milliers dans une vingtaine de pays avant 1945, Mein Kampf se vend, aujourd'hui encore, dans le monde entier, y compris en France. Extrait de "Mein Kampf, histoire d'un livre", de Antoine Vitkine, publié chez Flammarion (2/2).

 Antoine  Vitkine

Antoine Vitkine

Antoine Vitkine, né en 1977, est un journaliste et écrivain français. Il est également réalisateur de documentaires français.Il est diplômé de Sciences Po et titulaire d'un DEA de relations internationales.Il a réalisé une quinzaine de films documentaires pour Arte, Canal Plus, etc... Parmi lesquels: "Mein Kampf, c'était écrit", "Les esclaves oubliés", "Dati l'ambitieuse"... Il a également travaillé pour France 2 et l'INA.En 2005, il est l'auteur d'un essai intitulé les Nouveaux imposteurs, traitant des théories du complot, depuis le 11 septembre 2001. En 2006, il publie La Tentation de la défaite, un ouvrage de politique-fiction sur l'islamisme radical et la politique étrangère française.

Voir la bio »

Les milliers d’exemplaires de Mein Kampf vendus ne le sont certainement pas qu’à des étudiants en histoire ou à des chercheurs. Les commentaires laissés sur le site de vente par les acheteurs, en anglais pour la plupart, reflètent leurs motivations. Ils évoquent le livre comme une curiosité, comme un objet « fascinant ». Une minorité, par provocation peut-être, affirme se trouver en accord avec certaines idées de l’auteur. Plusieurs s’avouent surpris de « l’intelligence et de la capacité à comprendre les autres » de Hitler. Un autre explique que ses idées sur la « démocratie et la vie parlementaire » lui ont ouvert les yeux. Une autre que ses conceptions de la « propagande politique » s’appliquent encore aujourd’hui. Un lecteur écrit que le livre constitue une mise en garde contre des « sentiments qui continuent à animer de nombreuses personnes, sous le vernis de la civilisation ». D’autres encore font part de leur « ennui » à la lecture de ce texte « long et redondant ». Un lecteur a même fait ce commentaire : « Ce sont les absurdités les plus perverses que j’aie jamais lues. Cet homme est vraiment diabolique, plus encore même que Skeletor. » Skeletor est le personnage, très antipathique, d’un dessin animé pour enfants diffusé dans les années 1980…

Sur le site américain d’Amazon, Mein Kampf est l’un des livres les plus commentés par les lecteurs. Cent quarante-sept d’entre eux donnent leur opinion, permettant à d’autres internautes de voter pour les commentaires qu’ils approuvent. Trois d’entre eux se voient ainsi plébiscités et affichés sur la page d’accueil. Le plus populaire fait un résumé assez fidèle du livre, notant cependant qu’il « n’est pas aussi antisémite qu’on aurait pu le penser », et concluant placidement que le système médiatique américain n’est pas si éloigné du « système de propagande et contrôle des individus » prôné par Hitler. La fiche de son auteur nous apprend qu’il est tout juste diplômé d’une université en sciences politiques. Le deuxième « suspecte la plupart des gens de lire ce livre pour savoir ce que Hitler dit des Juifs ». « Je m’attendais à voir un monstre, j’ai vu une bête politique avec parfois des idées lumineuses », affirme-t-il. Enfin, le troisième commentaire est politiquement le plus sain, expliquant que la lecture du livre est un moyen unique de mieux comprendre la situation allemande des années 1930, et « comment Hitler a réussi à influencer des millions de personnes et quelles étaient ses idées, pour que plus jamais on n’en arrive là ».

>>>>>>>>>>> A lire également : "Mein Kampf, histoire d'un livre" : qui sont ceux qui achètent (et parfois plébiscitent) encore par milliers le brûlot antisémite de Hitler ?

«The most satanic book ever written », proclame pour sa part un site Internet américain qui propose une version de Mein Kampf pour baladeur MP3 ou téléphone portable. Mein Kampf devient ainsi, pour le grand public occidental, un pur symbole, déconnecté d’une réalité historique de plus en plus méconnue, quand elle n’est pas fantasmée. En ce début du troisième millénaire, cet emblème de l’entreprise hitlérienne résonne comme l’écho assourdi, lointain, excitant, fascinant d’un film à grand spectacle qui aurait le « mérite » d’avoir été réel. Sans sous-estimer le fait que des ultranationalistes, des néonazis, des radicaux de toutes chapelles voient en ce livre un manifeste politique, Mein Kampf est en passe d’entrer au musée des horreurs, devenant un objet plus spectaculaire que proprement politique.

Extrait de "Mein Kampf, histoire d'un livre", de Antoine Vitkine, publié chez Flammarion, 2015. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !