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 La mer n'effacera pas sur le sable les pas de Prévert
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Atlanti-culture

Ça démarre un peu lentement mais on se laisse vite prendre, et en sortant de ce spectacle musical on se demande si, au fond, Jacques Prévert ne fut pas le plus grand poète populaire français du 20° siècle.

Serge Bressan pour Culture-Tops

Serge Bressan est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).

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SPECTACLE

« Prévert »

Spectacle musical de Yolande Moreau et Christian Olivier.

Avec Yolande Moreau et Christian Olivier. Et Serge Begout (guitare), Pierre Payan (clavier, cuivres, scie musicale, bruitages) et Scott Taylor (accordéon, cuivres, percussions).

INFORMATIONS :

Théâtre du Rond-Point

2 bis avenue Franklin-Roosevelt

75 008 Paris

Tél. : 01 44 95 98 21

www.theatredurondpoint.fr

Jusqu’au 10 février. Du mardi au dimanche, 18h30.

En tournée : 19 mars, Epinal (88). 20 mars, Lons-le-Saulnier (39). 21 mars, Nevers (58). 22 et 23 mars, Caluire (69). 3 avril, Chenove (21). 4 et 5 avril, Bourg-en-Bresse (01). 23 mai, Portes-les-Valence (26). 24 et 25 mai, Grasse (06).

RECOMMANDATION : EXCELLENT

THEME

Une actrice- réalisatrice, Yolande Moreau, et un chanteur-musicien, Christian Olivier, se rencontrent en Suisse et se découvrent une passion commune pour Jacques Prévert. Ils décident de monter un spectacle musical et de rendre ainsi hommage au « poète populaire », réputé pour son langage familier et ses jeux de mots, pour ses poèmes, ses aphorismes et ses collages. 

Sur scène, donc, d’un côté Christian Olivier (hors du groupe Les Têtes Raides) à la voix chaude et grave, de l’autre Yolande Moreau (loin des Deschiens) à la voix traînante et chaloupée; et entre eux deux, trois musiciens. On y va de l’hommage à ce « tendre anarchiste » qui déroulait des inventaires avec ratons-laveurs. S’enchaînent poèmes, aphorismes et chansons. 

« Grand frère » Jacques est là, tout en mots, en langage déstructuré. Les vers sont libres, clin d’œil à la liberté du poète. « Je suis comme je suis », on est comme on est et puis, il y a le bruit de l’œuf dur cassé sur le comptoir d’étain ou encore les feuilles mortes, celles qui se ramassent à la pelle… On cible le racisme, on célèbre la fraternité, et c’est que Jacques Prévert est grand…

POINTS FORTS

-Quand, par les mots de Prévert l’homme à la casquette et au mégot au coin des lèvres, les vies ordinaires deviennent des chefs-d’œuvre.

-Une mise en scène « a minima » avec fauteuils et tables basses pour seuls décors…

-La version d’une chanson éternelle, « Les Feuilles mortes », absolument étourdissante et furieusement émouvante en duo avec Christian Olivier et Yolande Moreau.

-La bande son impeccable, composée pour l’essentiel par Christian Olivier.

POINTS FAIBLES

Un premier tiers du spectacle, un peu froid, sombre et lent à démarrer, ce qui peut perturber le public…

EN DEUX MOTS

Allez, on oublie le poète de l’école primaire, tout en « Paroles » et en « Histoires » ! Avec « Prévert », Yolande Moreau et Christian Olivier ont composé un délicieux spectacle musical. Et, avec élégance, ils présentent un bel hommage à un poète libertaire et surréaliste, à un conteur aussi féroce que lunaire. Si vous le pouvez, allez-y…

UN EXTRAIT

Ou plutôt deux:

         - « (…) Et puis après / Qu'est-ce que ça peut vous faire / Je suis comme je suis / Je plais à qui je plais / Qu'est-ce que ça peut vous faire / Ce qui m'est arrivé / Oui j'ai aimé quelqu'un / Oui quelqu'un m'a aimée / Comme les enfants qui s'aiment / Simplement savent aimer / Aimer aimer... / Pourquoi me questionner / Je suis là pour vous plaire / Et n'y puis rien changer »

         - « Il est terrible le petit bruit de l’œuf dur cassé sur le comptoir d’étain/ il est terrible ce bruit quand il remue dans la mémoire de l’homme qui a faim / Elle est terrible aussi la tête de l’homme/ La tête de l’homme qui a faim quand il se regarde à six heures du matin dans la glace du grand magasin / Une tête couleur de poussière / Ce n’est pas sa tête pourtant qu’il regarde dans la vitrine de chez Potin / Il s’en fout de sa tête d’homme / Il n’y pense pas / Il songe / Il imagine une autre tête / Une tête de veau par exemple / avec une sauce de vinaigre (…) »

L’AUTEUR

Né le 4 février 1900 à Neuilly-sur-Seine, Jacques Prévert était à la fois poète, scénariste, parolier. A 6 ans, avec ses parents et ses deux frères (Jean et Pierre), il quitte Neuilly pour Toulon avant de revenir à Paris. A 15 ans, il arrête les études, fait quelques larcins et fréquente des voyous. Service militaire à Constantinople (Turquie) où il fait la connaissance du traducteur et futur éditeur Marcel Duhamel. Retour en France, il rencontre des membres du mouvement surréaliste, parmi lesquels Raymond Queneau, et baptise « cadavre exquis » le jeu auquel il se livre avec ses amis. 

En 1929, il publie ses premiers poèmes dans des revues. Trois ans plus tard, à la demande du groupe Octobre, il écrit des textes d’agitation-propagande qui lui assurent un début de notoriété pour sa verve, son humour, son aisance à rédiger très rapidement des textes sur des sujets d’actualité brûlants. 

Puis il y aura le cinéma, avec les scénarios et dialogues de plusieurs grands films (« Drôle de drame », « Quai des Brumes », « Les Visiteurs du soir », « Les Enfants du paradis », « Remorques » ou encore « Le Roi et l’Oiseau »). 

Il confie nombre de ses poèmes à Joseph Kosma qui les met en musique- ils seront chantés par, entre autres, les Frères Jacques, Marianne Oswald, Juliette Gréco, Catherine Sauvage, Serge Reggiani, Yves Montand… Son premier livre, « Paroles », a été publié en mai 1946, suivi de « Spectacle », « La pluie et le beau temps », « Histoires », « Fatras », « Imaginaires », « Choses et Autres »). Le 11 avril 1977, « le maître du réalisme poétique » meurt à Omonville-la-Petite (Manche).

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