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"Fondation espérance banlieues" : le projet pilote qui tente de redonner aux élèves défavorisés les moyens de leurs ambitions
©Reuters

Bonnes feuilles

30 à 40 % des enfants des banlieues sont en échec scolaire et le risque d'éclatement de la communauté nationale n'a jamais été aussi grand. Extrait de "Espérance banlieues", de Harry Roselmack et Eric Mestrallet, publié aux éditions du Rocher. (1/2)

Eric Mestrallet

Eric Mestrallet

Eric Mestrallet est chef d'entreprise et président de la fondation Espérance Banlieues qui a crée cette école.

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Harry Roselmack

Harry Roselmack

Harry Roselmack est journaliste à TF1. Il est parrain de l'école pilote de Montfermeil.

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HR : Entrons maintenant dans le concret. Qu’est-ce qui distingue votre école des autres ? Je veux dire : quel est le « concept » ?

EM : L’idée directrice est de construire une école adaptée aux difficultés spécifiques des élèves de banlieues à fort taux d’échec scolaire. Nous les avons déjà évoquées : risque de décrochage scolaire, trouble identitaire, manque de confiance dans les institutions en général, ignorance de certains codes sociaux, fort besoin de suivi individualisé, manque de confiance en leur avenir professionnel… Notre réponse, c’est une école à taille humaine (130 élèves grand maximum, sachant que nous en comptons aujourd’hui 108, du CP à la troisième), des classes avec de petits effectifs, des professeurs présents toute la journée, même quand ils n’ont pas de cours à donner ; une relation étroite entre la direction et les parents d’élèves ; une conception ouverte de la laïcité (neutralité mais pas ignorance ni tabou) ; une forte affirmation de l’appartenance à la communauté nationale, un accent particulier mis sur la transmission de la culture et du patrimoine français ; enfin l’entretien d’un fort sentiment d’appartenance à l’établissement.

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HR : Vous décrivez là les méthodes, les moyens, mais quel est l’objectif final ?

EM : Vous avez raison de me ramener à l’essentiel… Par ces moyens, notre objectif n’est pas seulement de lutter contre le décrochage scolaire, à la façon d’une « boîte à bac » junior. Notre ambition est un peu différente : nous ne visons pas forcément l’hyper-excellence académique, nous visons plutôt à la fois la robustesse des fondamentaux et l’épanouissement de la personne tout entière.

HR : Tout entière, c’est-à-dire ?

EM : Eh bien pas seulement sur le plan intellectuel, mais aussi émotionnel, physique, relationnel, psychologique. Notre objectif est de donner à nos élèves l’envie de développer leurs talents, d’aller à la fine pointe d’euxmêmes, de « répondre toujours à l’appel le plus haut », comme disait le directeur de la fameuse école des Roches, André Charlier. Nous voulons que nos élèves aient de l’ambition pour eux-mêmes, pour leur vie, pas l’ambition du pouvoir, de l’argent, de la considération sociale, mais surtout l’ambition d’avoir une belle vie responsable et féconde, l’ambition de contribuer de manière positive et personnelle à la vie de notre pays. Notre perspective n’est pas utilitariste ; elle ne vise pas seulement l’obtention de bonnes notes, de bons diplômes et d’un métier rémunérateur. Notre perspective est humaniste : nous voulons aider les jeunes à devenir des êtres libres et vrais.

C’est pourquoi notre projet pédagogique comprend quatre grands axes : l’instruction, la socialisation, le développement de la personnalité et la préparation à l’insertion professionnelle. Encore une fois, l’objectif final de tout cela est simple : permettre aux jeunes gens de s’insérer librement dans la société, chacun à leur façon, en leur donnant le goût des responsabilités, le goût du service des autres, le sens du collectif.

HR : Tous ces choix pour mettre en oeuvre votre vision, les avez-vous conçus d’emblée, avant même de lancer l’école en vrai, ou bien se sont-ils mis en place progressivement, sur le terrain ?

EM : Vous avez raison de me le faire préciser, c’est un point capital. Les choix éducatifs ne correspondent pas à un plan conçu de toute éternité par nos cervelles fertiles mais bien à une réponse de terrain qui s’est progressivement déployée au regard de ce que l’équipe éducative ressentait nécessaire et pertinent. Certains moyens ont aussi été testés puis abandonnés ; d’autres ne se sont affirmés que progressivement comme pièces maîtresses du modèle, comme la manière de vivre le déjeuner à l’école.

HR : Vous parlez beaucoup du terrain ?

EM : Oui, ce que je veux dire, c’est que les spécificités du modèle de l’école Alexandre-Dumas se sont mises en place petit à petit, sans idées préconçues, et non comme l’application d’un modèle théorique conçu en chambre ou découlant de telle ou telle étude scientifique.

Pour nous, l’éducation se fonde avant tout sur l’observation des enfants sans a priori… Ce n’est que progressivement qu’un modèle s’est affirmé, empiriquement en définitive. Cela nous paraît rassurant et normal car, pour nous, l’enseignement n’est pas une science mais un artisanat. Tout part de l’observation et de la prise en compte attentive du réel : le caractère de tel enfant, les effets incontestables de dynamique de groupe, la synergie que l’on voit apparaître entre tels groupes d’enfants… Observer, analyser, expérimenter… Tel est le processus habituel dans notre école pilote pour choisir les meilleurs moyens, en toute liberté. C’est donc le terrain qui nous dicte ce qu’il convient de faire, pour peu qu’on veuille observer ce qu’il a à nous enseigner.

Extrait de "Espérance banlieues", de Harry Roselmack et Eric Mestrallet, publié aux éditions du Rocher, 2015. Pour acheter ce livre,cliquez ici.

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