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Ultra-droite : Tariq Ramadan président ?
©Reuters

Au secours !

Tariq Ramadan veut devenir français et s'impliquer politiquement. Mais n'avons-nous pas déjà suffisamment d'extrémistes de droite ultra-conservateurs en magasin ?

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Je soupçonne vaguement Tariq Ramadan, un type qui n'a pas beaucoup d'estime pour la France, qu'il voit comme un pays gangréné par l'islamophobie et empêtré pour l'éternité dans ses névroses post-coloniales, de demander la nationalité française dans le seul but de protester contre le risque d'en être déchu comme binational.

Ce serait pourtant du mauvais esprit de ma part en même temps qu'un mauvais calcul de la sienne, puisqu'on s'achemine désormais vers une grotesque "déchéance pour tous" et qu'un naturalisé récent peut déjà se voir retirer son passeport pour accointance avec un mouvement terroriste.

On pourrait même, à vrai dire, lui savoir gré, quand tant de Français allergiques aux impôts tentent de devenir suisses, de vouloir faire le chemin inverse.

Ce désir soudain d'appartenance à un ensemble national si méprisable ne peut donc être que motivé par la volonté de contribuer à sa transformation en une communauté plus "éclairée", à la manière de ces trotskistes qui faisaient, jadis, de "l'entrisme" dans les partis de la gauche modérée histoire d'accélerer l'avènement du Grand Soir.

Une fois français, en effet, Ramadan ne serait plus contraint par son statut d'observateur extérieur et pourrait légitimement intervenir dans le débat politique, voire se présenter à une élection. Et pourquoi pas, après tout, puisque c'est la prérogative de tout citoyen. On est tout de même fondé à se demander pour quelle version du Grand Soir il militerait alors, et en quoi sa présence dans un conseil municipal, au Parlement ou même à l'Elysée, contribuerait pratiquement au "vivre ensemble" et à l'émergence du "nouveau nous" qu'il assure appeler de ses vœux.

Ferait-il progresser la cause des femmes ? Sans évoquer à nouveau sa désormais célèbre proposition de moratoire sur la lapidation, sa façon d'opposer "féminisme occidental" à un "féminisme musulman" où l'on porte le voile pour ne pas tenter les hommes, n'exerce que des activités "conformes à sa nature" et n'avorte qu'en cas de danger de mort permet d'en douter...

Améliorerait-il la condition des homosexuels ? Pas davantage. Il n'interdirait pas totalement les relations entre personnes du même sexe, semble-t-il, mais chercherait surtout à préserver les enfants innocents de ces "comportements anormaux".

Consoliderait-il la liberté d'expression, fondement de la démocratie républicaine à laquelle il veut désormais appartenir ? Vraisemblablement pas, les morts de Charlie-Hebdo, n'étant jamais, selon lui, qu'une bande de racistes gagnant de l'argent en s'en prenant aux "marginalisés de la société".

S'attaquerait-il au complotisme mortifère qui mine la confiance d'une population dans ses institutions ? Non et re-non. A l'antisémitisme qui déchire les banlieues ? Encore moins. Défendrait-il bec et ongles la laïcité dans son acception la plus consensuelle ? Difficile à croire.

Ah, et réglerait-il au moins les questions du chômage et du retour de la croissance ? Là-dessus, je réserve ma position, sa seule contribution au débat économique étant, à ma connaissance, mais je n'ai pas cherché bien longtemps je l'avoue, d'autres font mieux que moi son exégèse, un baratin lénifiant et passe-partout sur l'importance de l'éthique dans le monde de l'entreprise.

Un Tariq Ramadan naturalisé et impliqué politiquement, dont on se demande s'il organiserait une troisième primaire avec l'imam de Brest et l'état-major de l'UOIF (les débats sur LCP seraient assez croquignolets) ou déciderait plutôt de se confronter à Christine Boutin, Ludovine de la Rochère et Marine Le Pen par souci de cohérence idéologique, viendrait en tout cas compléter une collection d'extrémistes de droite ultra-conservateurs et rétrogrades qui n'a guère besoin de l'être.

Bah, ça serait peut-être le meilleur moyen d'amener Libé ("un intellectuel religieux ou un clerc séculier, à la manière d'Emmanuel Mounier"), Médiapart ("un intellectuel respectable") ou les chasseurs professionnels de néo-réacs à redescendre sur terre. Ou pas, évidemment.

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