Pourquoi il vaut mieux rester à l’écart des valeurs suisses pour le moment<!-- --> | Atlantico.fr
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Depuis plusieurs années, la Banque Centrale Suisse (BNS) empêchait le franc suisse de monter par rapport à l’euro.
Depuis plusieurs années, la Banque Centrale Suisse (BNS) empêchait le franc suisse de monter par rapport à l’euro.
©Reuters

Atlantico bourse

La BNS a aboli jeudi 15 janvier le cours plancher du franc suisse face à l'euro, l'axe principal de sa politique monétaire depuis plus de trois ans. Le franc suisse est alors immédiatement monté de 22% par rapport à l’euro, la bourse a dévissé de 15% et les taux suisses sont tous passés négatifs.

Alain Pitous

Alain Pitous

Alain Pitous, Directeur Général Adjoint Associé de Talence Gestion (@alainpitous).

Talence Gestion est une société de gestion de portefeuille indépendante spécialisée dans la gestion sous mandat pour les particuliers et la gestion de fonds commun de placement en actions.

Précédemment, il a été pendant 5 ans (2009-2014) Deputy CIO d’Amundi (850 Milliards d’Euro sous gestion) et gérant du fonds Amundi Patrimoine de 2012 à juillet 2014.

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Les semaines se suivent sur les marchés et apportent leur lot de surprises : cette semaine l’événement est venu de Suisse.

Depuis plusieurs années, la Banque Centrale Suisse (BNS) empêchait le franc suisse de monter par rapport à l’euro. Jeudi matin la BNS a pris tout le monde de cours en décidant de mettre un terme à cette politique sur laquelle elle communiquait, de manière très ferme, quelques jours plus tôt.

La réaction du marché a été immédiate et jamais vue sur une devise aussi importante : le franc suisse a immédiatement monté de 22% par rapport à l’euro, la bourse a dévissé de 15% et les taux suisses, qu’ils soient courts ou longs, sont tous passés négatifs !

La BNS est désormais complètement discréditée aux yeux des marchés et des investisseurs. Le président actuel de la BNS a tenté d’expliquer la décision en déclarant que les mesures destinées à contenir le franc suisse à 1,2 ne pouvaient durer… si on en juge par le montant des achats d’euros effectués depuis 3 ans (plus de 200Mads) effectivement la situation n’était plus tenable pour la Suisse surtout si la BCE lance son Quantitative Easing cette semaine… ce qui aurait pu contraindre la BNS a acheter encore plus d’euros.

Suite à cette décision, qui gagne ? Qui perd ?

Les perdants sont nombreux :

Les traders, les spéculateurs, les Hedges Funds, les courtiers, les banques d’investissements : FXCM, un courtier, à reconnu des pertes de 250M€, Citi Bank et Deutsche Bank ont perdu chacun150M€ ! Et la liste va s’allonger la semaine prochaine.

Les fonds de pension Suisses et la BNS ont vu leurs avoirs en euro baisser de 22%, certaines estimations font état de 30 milliards de pertes pour les fonds de pension et plus encore pour la BNS. 

Les emprunteurs en francs suisses, un peu partout en Europe, vont devoir rembourser une facture 22% plus chère : 700000 ménages polonais, d’autres en Autriche ou en Hongrie vont durement le ressentir. Même chose en France avec des collectivités locales endettées en francs suisse : l’ardoise pourrait atteindre 6Mads€. Un scandale dont nous entendrons reparler.

Les exportateurs suisses vont également être très pénalisés : en effet, l’industrie Suisse ne peut se développer qu’en exportant. L’industrie horlogère, par exemple, exporte 95% de sa production dont les prix viennent de monter brutalement de 22%. Le PDG de Swatch (montres) a parlé d’une catastrophe pour son entreprise.

Les salariés de tous ces groupes vont également pâtir d’une éventuelle délocalisation de production hors de Suisse.

Pour finir, du côté des perdants : l’industrie touristique suisse va également et très rapidement souffrir de la hausse de la devise.

Les gagnants sont moins nombreux : citons les rentiers Suisse qui ont vu le pouvoir d’achat, hors de Suisse, de leur patrimoine progresser de 22% sur cette décision... Les quelques salariés travaillant en Suisse et vivant en zone euro se sont également réjouis.

L’investisseur qui détenait, en francs suisses, des valeurs suisses avant jeudi s’en sort finalement pas si mal : il perd sur la valorisation de ces actions mais se rattrape grâce à la hausse de la devise.

Les entreprises de la zone euro ayant des concurrents directs en Suisse vont voir leurs concurrents Suisses souffrir également.

Beaucoup plus de perdants que de gagnants donc.

Compte tenu de tous ces éléments, faut-il renforcer ou rester à l’écart des actions suisses ?

Selon nous, il est largement trop tôt pour envisager de revenir sur les valeurs suisses : en effet les valeurs Suisses sont pour la plupart assez sensibles à l’effet devise. Cet effet va mettre du temps à se faire ressentir dans les résultats. Les groupes de Luxe comme Richemont, les horlogers comme Swatch,  ou le cimentier Holcim vont tous perdre entre 15 et 30% de leur résultat. Inutile donc de revenir dès maintenant sur ces valeurs.

Pour les groupes plus internationaux comme Nestlé, Roche ou Novartis dont une petite partie seulement de l’activité est générée depuis la Suisse, l’effet devrait être moindre mais leurs cours de bourse n’ont pas trop souffert pour un investisseur international. Or les cours étaient à des niveaux de valorisations "normaux" donc, là aussi, inutile d’acheter ces valeurs ou de renforcer les positions.

En conclusion : pour un investisseur en euro, il y a mieux à faire sur d’autres valeurs de la zone euro qu’acheter des valeurs suisses.

Les décisions de la Banque Centrale Européenne vont être attendues avec impatience cette semaine. La BNS a, pour sa part, clairement anticipé que la BCE allait lancer un Quantitative Easing.

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