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Le 22 mai, durant la manifestation à Paris du collectif "Osez le féminisme", on a vu surgir une pancarte : "Nous sommes toutes des femmes de chambre".
Le 22 mai, durant la manifestation à Paris du collectif "Osez le féminisme", on a vu surgir une pancarte : "Nous sommes toutes des femmes de chambre".
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Degage, vieux naze !

La semaine des bourdes barbares aura permis de déciller pas mal de Français sur le "bonheur" d'être molestée à tous les étages en France, et aux blogueuses féministes de montrer à quel point elles voyaient juste. Merci les filles.

La révolution égyptienne a eu son slogan, né d'une page Facebook contre la torture dédiée à une victime de la police de Moubarak  6 mois avant la révolution sur la place Tahrir: 'Nous sommes tous Khaled Said". Le 22 mai, durant la manifestation à Paris du collectif "Osez le féminisme" contre le sexisme des politiques et des médias, on a vu surgir une pancarte: 'Nous sommes toutes des femmes de chambre". "Ce qui laisse à penser que l'affaire est sérieuse et va durer.

Slogan de "Osez le féminisme", le réseau d'associations féministes organisateur du rassemblement à Beaubourg, Paris, le 22 mai 

La pétition "Sexisme: Ils se lâchent, les femmes trinquent" a atteint 20 000 signatures[mise à jour: 25 000 au 25/5, dont un mail de soutien de Carla Bruni-Sarkozy] pour cette déclaration : "Les personnalités publiques qui véhiculent des stéréotypes qu’on croyait d’un autre siècle insultent toutes les femmes ainsi que toutes celles et ceux qui tiennent à la dignité humaine et luttent au quotidien pour faire avancer l’égalité femmes-hommes".. Une protestation minimaliste, pour 2011, mais nous en sommes toujours là. 

Osez le féminisme fait partie de ces nouveaux mouvements féministes français punchy, populaires, activistes, qui fédèrent la jeune génération autour de différentes revendications, mais font tous bloc contre la loi du silence et les iniquités subies par les victimes de violences sexuelles. Les nouvelles féministes françaises étaient là, depuis longtemps, et personne n'avait rien vu venir, pas plus qu'en Tunisie. Leur Ben Ali a été  DSK. On découvre aujourd'hui que c'est toute la planète femmes qui dit "Dégage !" à trop d'imbéciles et de "séducteurs", partout.

En France, ce sont ces blogueuses féministes et elles seules qui ont dès le jour 1 de l'affaire DSK réagi contre le tsunami de commentaires délirants. Clémentine Autain, avec cet appel sur son  blog "Une pensée pour la femme de chambre' (200 commentaires sur son blog)  restera pour toujours la voix et le visage du sursaut, et on comprend pourquoi elle a aussitôt pensé à la femme de chambre.  Sinon, qui connait le site d'infos LesNouvelles News?  A peu près personne en France. Mais c'est le post d'Isabelle Germain du 16 maique le quotidien britannique The Guardian a choisi de traduire et publier, pour ses quatre vérités sensées,  introuvables ailleurs dans les médias français au lendemain du tsunami :."Cette affaire confirme une nouvelle fois que, de ce côté-ci de l’Atlantique, en cas de viol ou de harcèlement sexuel, le coupable présumé est vite transformé en victime et vice-versa".

Toutes les blogueuses féministes ont rappelé ce jour-là tout simplement les fondamentaux, c'est à dire la possibilité d'un crime, le viol, et les égards minimum dus à la plaignante. Olympe, l'une des plus connues, qui blogue d'abord sur le "plafond de verre" que rencontrent les femmes dans leur progression professionnelle, a aussi saisi ce que la saga DSK impliquait, dans son postLes biches :

Tant que cette vision perdurera, les femmes qui essayent d’accéder aux chasses gardées des hommes, et notamment aux terres de pouvoir, auront toujours pour obstacle essentiel de ne pas être considérées comme des partenaires légitimes. Elles ne peuvent pas être dans le camp des chasseurs puisqu'elles sont le gibier.

Ce qui a beaucoup changé depuis le siècle dernier, chez les féministes, c'est qu'aujourd'hui, on s'y amuse bien, et on parle cash.  Regardez Les poupées en pantalons,  Humour de dogue, Les 400 culs.Les plus espiègles sont les nanas deLa barbe, un "groupe d'action féministe" qui s'amuse bien, du côté économique et social.  Elles font probablement  des diners de filles, avant ou après, mais pendant, elles plombent les conseils d'administration du CAC40, les remises de médailles et de distinctions et autres sauteries d'hommes sérieux en débarquant en commando, le menton orné d'une fausse barbe. Elles ont promis, la main droite sur leur manifeste  que "Partout ou les hommes se croient en terrain conquis, les femmes surgiront, arborant les attributs du pouvoir et jouant le jeu de la masculinité". Les nouvelles peuvent découvrir le "kit d'action" de La Barbe sur leur site.

Pendant ce temps, en Arabie Saoudite

Le vieux monde d'hommes lourds, nuls, et pire, ça ne passe plus, aujourd'hui. Nulle part. Le 17 mai, exactement deux jours après l'explosion de l'affaire, Mme Najla Hariria fait à Jeddah l'impensable : munie de son permis de conduire passé aux États Unis, elle a pris le volant pour accompagner ses enfants à l'école. Conduire est interdit aux femmes en Arabie Saoudite, ce qui les oblige à être chaperonnées partout d'un chauffeur, et contrairement à ce qu'on lui avait juré, les hommes ne se sont pas ruées sur elle, elle n'a pas été agressée. Elle a même reçu des félicitations sur Twitter. Les choses changent partout. Un groupe de Saoudiennes a ouvert une page Facebook: "Teach me how to drive" (Apprends moi à conduire), une cause humanitaire, car comment faire en cas d'urgence médicale, si le chauffeur a pris son jour de congé, ou si vous n'avez pas les moyens de salarier un chauffeur ? Et au bout d'une semaine vraiment très particulière, c'est une autre Saoudienne, Manal al Sherif, qui s'est lancée, seule, au volant, en demandant à une amie de la filmer. 

Manal al-Sherif se fait filmer conduisant

L'histoire s'est terminé au commissariat pour quelques heures [Mise à jour 13h, le 24/5 : elle vient à nouveau d'être arrêtée]. Mais elle pourrait reprendre le 17 juin, jour où est prévue la journée d'action Women2Drive, encourageant les Saoudiennes à ne plus attendre et à prendre le volant.

Slutwalk, FEMEN : les nanas incontrôlables

Slutwalk, photo PaDumBumPsh sur Flickr, publiée sous licence CC

A l'Ouest comme à l'Est, les femmes en ont marre.  A l'Ouest, à Toronto, sont nées les "Slutwalks", qui se propagent au Canada, le long de la côte Est des États-Unis et même à Londres.  Là, les femmes revendiquent de pouvoir s'habiller comme des trainées (slut), même à 3 heures du matin, si ça leur chante, et ont organisé des Slutwalks (Marches de salopes). Elle défilent dépoitraillées, agressives, bas résille,  ventre,  cuisses et le reste à l'air. Mais pourquoi ? Là encore, le détonateur a été  l'agression sexuelle, le viol, le "vous l'aurez bien cherché, habillée comme ça'  prononcé par un policier de Toronto, avec une question en écho : "Pourquoi est-ce au violeur de me dicter ce que je porte ?" Elles disent : "Nous voulons récupérer le mot  "salope" qui a été trop longtemps utilisé comme une arme contre les femmes. Si vous vous l'appropriez, vous lui volez son pouvoir."  Un blog a été créé pour que les participantes expliquent leurs motivations. L'une d'elle titre :  "Personne ne me dira plus ce que je dois faire". Elles ont un manifeste, elles aussi. "Le fait d'être agressée n'a rien à voir avec une tenue vestimentaire; ça n'a également rien avoir avec le sexe. Cependant, le fait d'utiliser un terme péjoratif afin de justifier une conduite inexcusable crée un climat où il est acceptable de faire porter le blâme aux victimes."

Photo du site officiel du mouvement FEMEN

A l'Est, en Ukraine, elles ont des sœurs, les filles de FEMEN. Elles aussi veulent choquer, exprès, et montent torse nu au front. "En vertu du principe qui veut qu'on préfère toujours regarder une femme que l'écouter, montrer ses seins reste le meilleur moyen de se faire entendre" constate la blogueuse Olympe, peut-être pas convaincue. Leurs messages et leurs causes,  contre le tourisme sexuel, les violences faites aux femmes, ont fait le tour du monde, passés en contrebande dans les photos. A Vladimir Poutine, en visite à Kiev, elles ont dit : "On ne couchera pas avec les nabots du Kremlin".

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