Aubaine ?
Un "rebond spectaculaire de l'économie"... mais avec quelques freins très français
Jean Castex a souligné l'excellente santé économique du pays ce mercredi lors d'une conférence de presse. Le Premier ministre s'est félicité du "rebond spectaculaire de l'économie" et d'un taux de chômage au plus bas depuis 2008. Comment expliquer ce rebond et quelles sont ses limites ?
Atlantico : Jean Castex a salué hier le "rebond spectaculaire" de notre économie. Quelle est la réalité de ce rebond ?
Philippe Crevel : Le rebond économique est réel. Il se traduit notamment au niveau de l'emploi. Comme l'Insee l'a indiqué, l'emploi salarié était fin juin supérieur à son niveau d'avant crise. C'est un signe fort du redémarrage de l'économie. On avait perdu 500.000 emplois au cœur de la crise sanitaire au printemps 2020. En 15 mois, on a donc effacé la saignée de la première vague au niveau de l'emploi.
Sur l'ensemble de l'activité, on voit le PIB de la France revenir à son niveau d'avant crise, sachant qu'en 2020, on avait perdu 10 points de PIB. La France était l'un des pays les plus durement touchés l'année dernière, elle est en train de revenir. Compte tenu des moyens qui ont été mis, le quoi qu'il en coûte, c'est l'inverse qui aurait été très inquiétant.
Comment expliquer ce rebond, et pourquoi arrive-t-il maintenant ?
Il s'explique d'abord par le déconfinement de mai-juin et la reprise de la consommation. Les Français se sont remis à dépenser, aller au restaurant, partir en vacances, etc. Il y a un rebond estival manifeste au niveau de la consommation. Il faut également souligner une bonne tenue de l'investissement des ménages au niveau de l'habitat et une bonne reprise de l'investissement des entreprises qui croient à la reprise de l'économie.
Le niveau de vie et le pouvoir d'achat des Français n'ont pas été amputés en 2020, (ils ont même augmenté) ils continuent d'augmenter sur la première partie de 2021. La situation des entreprises est jusqu'à maintenant plutôt correcte, notamment grâce aux fonds de solidarité, au chômage partiel et au PGE. Elles ont de la trésorerie et en profitent pour investir.
Le plan de relance qui a démarré assez tardivement à partir du mois de juillet va continuer à amplifier cette évolution favorable. S'il n'y a pas d'obstacles à la croissance et des goulets d'étranglement dans les prochains mois, on commencera réellement à ressentir le plan de relance à l'automne et début 2022 s'il n'y a pas de problème d'offre. On commence déjà à voir fleurir dans les rues les panneaux indiquant que telle réfection de bâtiment public est financée par l'UE.
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Quelles sont les limites de ce rebond ?
Les limites sont d'abord les faiblesses traditionnelles de la France : une industrie de petite taille, d'où un déficit commercial important. Si les Français consomment plus, ça veut dire qu'on va devoir importer davantage. Ce n'est donc pas très bon pour notre balance des paiements courants. L'Europe pourrait souligner ce déséquilibre manifeste.
Par ailleurs, il y a des secteurs qui sont encore convalescents : l'aviation n'est pas encore complètement sortie de la crise car le tourisme international reste limité, et l'automobile doit faire face à la transition énergétique et à la pénurie de composants.
L'autre faiblesse de l'économie française est cette forte dépendance à la dépense publique. En 2020, les dépenses publiques ont atteint les 62% de PIB. Il faut revenir à la normale, sachant que la normale était déjà très élevée (56% en 2019). A un moment ou à un autre, il faudra bien se poser la question de la réduction du déficit budgétaire et de l'assainissement des comptes publics. Rappelons que le déficit français est deux fois plus élevé que celui de l'Allemagne. A priori on ne se penchera pas sur le problème avant avril 2022.
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