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"Terra Nova se trompe de cible, le PS doit avant tout séduire
les salariés et les ouvriers"
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Vox populi

Lors de sa visite sur les chantiers de Saint-Nazaire lundi, François Hollande a rappelé que l'électorat populaire avait sa place chez les socialistes. Si cette conviction ne fait pas l'unanimité à gauche, elle n'en demeure pas moins un élément fondamental et historique du Parti socialiste...

Laurent Baumel

Laurent Baumel

Laurent Baumel est membre du Parti socialiste. Il est notamment l'un des fondateurs du mouvement "La Gauche Populaire"

 

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Atlantico : François Hollande, en visite lundi aux chantiers de Saint-Nazaire, a déclaré : « L’électorat populaire a sa place avec nous ». La victoire de la gauche en 2012 passe-t-elle forcément par une reconquête d’un électorat populaire, aujourd’hui plus enclin à voter FN ?

Laurent Baumel : A l’évidence oui. Le PS doit reconquérir les « couches populaires intégrées », c’est-à-dire ces millions de salariés, employés, ouvriers, qui travaillent mais subissent depuis bon nombre d’années la précarisation, la stagnation salariale, le déclassement… C’est une question centrale pour la campagne de 2012, au regard notamment des défaites électorales des années 2000.

Par quoi passe cette reconquête ?

Par un agenda qui réponde à leurs attentes. Il faut que, dans l’offre politique des candidats socialistes, et on voit d’ailleurs que François Hollande a commencé à se positionner dans ce sens, il y ait des réponses lisibles et mobilisatrices sur des sujets tels que le pouvoir d’achat, la sécurité économique, la valorisation du travail, la réaffirmation du pacte républicain…

A contrario, Terra Nova a invité le PS, dont il est proche, à se tourner vers un électorat sensiblement différent de l'électorat populaire traditionnel (la note du think tank évoquait un électorat plus jeune, féminin, diplômé et immigré). La gauche n’a-t-elle pas besoin de se renouveler un peu ?

Non, Terra Nova a tort pour deux raisons. La première est d’ordre éthique et moral, voire identitaire. La gauche a vocation à mobiliser le monde du travail, les salariés et ouvriers. Si elle perd cette vocation elle perd une partie de sa raison d’être historique et philosophique. En outre, ils ont tort d’un point de vue stratégique, parce que la coalition qu’ils proposent est en réalité déjà celle qui vote pour le Parti socialiste. Et les années 2000 ont montré que cette coalition était minoritaire.

Être majoritaire dans la fonction publique, dans les centres villes intellectualisés, dans la population féminine, chez les gens issus de l’immigration… c’était déjà le cas en 2007. Ces couches-là votent souvent pour la gauche. Mais elles ne sont pas majoritaires. On ne peut pas gagner une élection présidentielle s'il on ne fait pas de meilleurs scores que ce qui a été fait par le passé dans les couches populaires intégrées, dans le monde ouvrier…

Alors comment expliquer que le Parti socialiste ait perdu cet électorat qui faisait son identité ?

Il ne l’a pas totalement perdu, mais il a été minoritaire dans le vote de ces classes-là lors des derniers scrutins nationaux importants. Ces couches n’ont pas eu le sentiment, dans les années 2000, que la gauche avait des réponses suffisamment claires à leurs problèmes. Elles ont aussi été trompées, illusionnées en 2007, par un mot d’ordre démagogique de Nicolas Sarkozy, sur le fait qu’elles pouvaient attendre de lui une amélioration de leur pouvoir d’achat. La gauche n’a donc pas été assez attractive, et elle a de plus été confrontée à des réponses alternatives démagogiques de ses concurrents.

Peut-être y a-t-il aussi un problème d’identification. A savoir que l’électorat populaire ne se retrouve pas vraiment dans le programme ou les candidats du PS ?

Pas forcément. François Hollande est un élu de terrain, honnête, proche des gens. Il a la capacité personnelle de nouer cette relation avec les classes populaires. Le sujet est plutôt que l’homme et le programme se rejoignent. Ce sera le cas en janvier de manière assez nette.

C’est cette cohérence qui a manqué aux socialistes lors des scrutins précédents ?

Sans doute, il y a une alchimie à trouver entre une personnalité, un parcours, une orientation politique et des propositions concrètes. J’ai le sentiment que François Hollande, qui a bien compris cette question, est en train de se donner les moyens de résoudre l’équation.

Un sondage Ifop/Atlantico, fin novembre, montrait que 37 % des catégories ouvrières souhaitaient voter pour Marine Le Pen, contre 17 % seulement pour François Hollande. N’est-il pas trop tard pour récupérer cet électorat ?

Non, l’élection n’a pas encore eu lieu. La campagne est une dynamique, avec des confrontations d’arguments. Pour ma part je persiste à penser que la reconquête des couches populaires, même si elles se tournent aujourd’hui vers le Front National, reste tout à fait possible. 

Propos recueillis par Romain de Lacoste

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