Surconsommation de somnifères : pourquoi le déremboursement ne servira à rien<!-- --> | Atlantico.fr
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La commission de la Haute Autorité de Santé préconise un remboursement des médicaments de 65% à 15%.
La commission de la Haute Autorité de Santé préconise un remboursement des médicaments de 65% à 15%.
©Reuters

Coup d'épée dans l'eau

La commission de la Haute Autorité de Santé préconise un remboursement des médicaments de 65% à 15%. Un geste qui ne serait pas vraiment utile. En effet, les addicts aux somnifères réussiront à d'en procurer quand même via le marché au noir notamment.

Dan Véléa

Dan Véléa

Le Docteur Dan Véléa est psychiatre addictologue à Paris.

Il est l'auteur de nombreux ouvrages sur les addictions, dont Toxicomanie et conduites addictives (Heures-de-France). Avec Michel Hautefeuille, il a co-écrit Les addictions à Internet (Payot) et Les drogues de synthèse (PUF, Que sais-je ?, Paris, 2002).

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  • Baisser le remboursement des somnifères n'empêchera pas les patients addicts d'en consommer

  • D'autres moyens de se les procurer apparaitront :  le marché noir

  • Ces produits seront remplacés par d'autres comme l'alcool

Atlantico : La Haute Autorité de la Santé (HAS) propose de baisser le remboursemet des somnifères de 65% à 15%. Cette mesure incitera t-elle vraiment les gens à moins en consommer ? 

Dan Velea : C'est un grand classique. Quand il y a un problème, on adopte des mesures économiques. Cela permettra aux gens de s'interroger sur le coût de l'addiction, mais l'efficacité de cette mesure n'est pas assurée. Les gens trouveront un moyen de se procurer ces médicaments via le marché noir,  ou en faisant appel à des pharmaciens complaisants par exemple. Quant aux autres, ils se rabattront sur des produits dérivés ou aux mêmes effets. 

Comment en sommes-nous arrivés à utiliser des somnifères si addictifs ? 

On sait qu'il existait deux autres molécules dans le passé qui avaient un effet soporifique. Il s'agit du noctran et de la mepronizine qui avaient des effets beaucoup moins addictifs. On les a retiré du marché sans que l'on ne sache vraiment les raisons de cette décision. Les médecins se sont retrouvés face à des patients avec d'un côté  les benzodiazépines et de l'autre des molécules hypnotiques comme le zopiclone et le zolpidem. Ces molécules ont un fort pouvoir d'accoutumance et d'addiction par rapport à celles d'avant. Ainsi, les patients les utilisent régulièrement dans de grandes quantités. Il faudrait un vrai dépistage des troubles du sommeil. 

Quels peuvent être les moyens alternatifs qui permettront aux addicts de détourner cette décision ?

Les gens se tourneront vers le marché noir ou utiliseront d'autres substances. Une partie des personnes qui utilise ces produits commencera à les mélanger avec de l'alcool. Une autre les remplacera totalement par l'alcool. 50% des personnes qui souffrent d'alcoolémie déclarent utiliser l'alcool pour s'endormir. 

Que prévoie la HAS pour éviter ces dérives ? 

La haute autorité de santé préconise un retour aux thérapies brèves et douces. Le problème est que le nombre de thérapeutes les pratiquant est limité et elles ont un coût élevé. Seule une petite partie de la population pourra y avoir accès. Ces méthodes peuvent être beaucoup plus efficaces mais le surcoût initial est important. 

Cette consommation de somnifères est-elle une exception française ? Comment l'explique t-on ?  

Il y a une vraie exception française à l'addiction de médicaments. Nous sommes dans une surconsommation. C'est peut-être un facteur culturel, une facilité de prescription des médicaments. Il y a aussi le rapport à la carte vitale. Les patients ne paient pas directement, n'ont pas d'argent à avancer et donc, dans les cas extrêmes il y a une déresponsabilisation complète. On est dans une société hyper stressée, il y a un culte de la performance à travers les médicaments qu'ils soient de confort ou de repos. 

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