Retraites : macronisme, Nupes et LR, un jeu de rôles si vain <!-- --> | Atlantico.fr
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Depuis l’affaire Benalla à l’été 2018, suivie de l’émergence des Gilets Jaunes, la France ne vit pas un instant d’apaisement.
Depuis l’affaire Benalla à l’été 2018, suivie de l’émergence des Gilets Jaunes, la France ne vit pas un instant d’apaisement.
©THOMAS COEX / AFP - EMMANUEL DUNAND / AFP

Vrais enjeux

Plutôt que de se quereller sur la question de savoir s’ils doivent voter en faveur de la réforme des retraites d'Emmanuel Macron ou s'opposer au projet, les députés Les Républicains devraient plutôt s'interroger sur des sujets majeurs comme la retraite par capitalisation et la natalité.

Tarick Dali

Tarick Dali

Tarick Dali est conseiller en communication et porte-parole de La Droite Libre et membre du bureau politique du CNIP, Centre national des Indépendants et Paysans.

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Les désordres autour de la réforme des retraites concentrent tous les maux de la Ve République sous l’égide de Macron. Un pouvoir autoritaire et arrogant, une opposition de gauche phagocytée par une extrême-gauche qui ne s’est jamais reconnue dans la démocratie et une opposition de droite inexistante. Le tout sur fond de jeu de rôles.

Depuis l’affaire Benalla à l’été 2018, suivie de l’émergence des Gilets Jaunes, la France ne vit pas un instant d’apaisement. Les éminences gouvernementales et leurs relais parlementaires n’opposent à cela que déni, mépris et répression. Le paroxysme fut atteint lorsqu’un téméraire osa rappeler au président de la République sa responsabilité dans le fait que la France, naguère exportatrice d’énergie, fût devenue importatrice. C’est pourtant lui, alors ministre de l’Économie et des Finances, qui avait fait voter la loi de 2015 programmant la réduction de la production d’électricité nucléaire et fermé la centrale de Fessenheim. Il s’en dédouana pourtant sans vergogne : « Pas pour ma pomme », rétorqua-t-il grossièrement.

Dans la pure veine macronesque, son Premier ministre, Elisabeth Borne, affirme que son texte n’est pas négociable. Peu lui chaut qu’il dépende de la bienveillance des oppositions, puisqu’elle n’est qu’à la tête d’un gouvernement minoritaire. Mais pourquoi se gênerait-elle ? La Nupes lui fait écho, en n’évoquant jamais le débat parlementaire. Elle ne parle que de faire reculer le gouvernement par ses manifestations de rue. Pis : à la faveur d’une élection législative partielle, elle a fait élire un soutien supplémentaire à la réforme, en faisant battre par une macroniste la député sortante RN, opposée au texte, tout comme elle. On ne saurait mieux dire que la gauche n’a qu’un lien très lointain avec la démocratie.

Pourquoi se gênerait-elle non plus face à l’autre aile de l’hémicycle ? Soutenue par des députés élus contre plus de 83 % des électeurs inscrits, elle a fait passer toutes les lois qu’elle voulait, y compris le budget que l’opposition de droite a, de facto, voté. Laquelle s’est laissée circonvenir en annonçant, à l’avance, qu’elle voterait la réforme des retraites au motif qu’elle a toujours été favorable au retour à la retraite à 65 ans. Ce faisant, elle confirme son insignifiance tout en se faisant l’idiot utile du jeu de rôles entre les troupes de Macron et celles de Mélenchon. Toutes deux dramatisent une réformette anodine, sur laquelle il faudra revenir rapidement. Les premières, désormais privées de nouvelles réserves de voix à gauche, pour tenter de se concilier les électeurs de droite en excipant d’une capacité à réformer et à résister à la chienlit ; les secondes pour se refaire une santé auprès des classes populaires parties au RN.

Faute d’avoir accompli depuis des années son travail d’opposant, consistant à réfléchir et à proposer, la droite LR se trouve embarrassée alors que la vacuité du projet Borne-Macron devrait justifier, à tout le moins, son retrait d’un match de ping-pong où ni elle ni la France n’ont quoi que ce soit à gagner.

Le Haut Conseil des finances publiques, lui-même, affirme noir sur blanc n’être « pas en mesure d’évaluer l’incidence de moyen terme de la réforme des retraites sur les finances publiques ». Le gouvernement, en effet, prétend économiser une douzaine de milliards d’euros à l’horizon 2030. En admettant que ce soit exact… dans sept ans, le texte présenté coûtera tout de suite 400 millions d’euros, du fait des mesures compensatrices pour calmer des opposants qui ne se calment pas du tout. On aboutit au même résultat que depuis 2007 après que Nicolas Sarkozy eut acheté la fin des privilèges des régimes spéciaux à coups de compensations sonnantes et trébuchantes : pendant dix ans, ç’a coûté plus cher que ça n’a rapporté.

La gauche se gargarise des évaluations du Conseil d’orientation des retraites selon qui le régime n’est pas menacé. Il ne le sera jamais tant que l’on ponctionnera les salaires au fur et à mesure des déficits, toujours davantage au détriment du pouvoir d’achat des actifs et de la compétitivité de la France qui se désindustrialise chaque jour un peu plus. En 40 ans, depuis l’anticipation de la retraite de 65 à 60 ans, puis l’instauration de la CSG, les cotisations retraite, de base et complémentaire, ont plus que doublé, passant de 9 à 19 % des salaires bruts. Qui plus est, les projections du Cor ne prennent jamais en compte les 30 milliards d’euros d’impôts de tout le monde qui vont aux fonctionnaires retraités.

Plutôt que de se quereller sur la question de savoir s’ils doivent voter une réforme bidon et rendre de l’oxygène à Macron, ou voter contre et donner l’impression de se déjuger, les députés LR feraient mieux de poser trois questions : 1. À quand une caisse de retraite de la fonction publique ? 2. Est-il possible de maintenir un système par répartition sans relancer la natalité ? 3. Instaurera-t-on, enfin, une part de capitalisation dans les retraites du privé, comme elles existent et fonctionnent très bien pour les fonctionnaires ?

Sur ce dernier point, c’est même un élu LR, David Lisnard, maire de Cannes, qui a ouvert des pistes qui méritent d’être étudiées : la répartition réservée à un minimum de l’ordre de 1 200 € mensuels, complétée par la capitalisation. Ceci devant se faire progressivement sur au moins une génération. Mais il semble que raisonner à l’échelle des générations futures soit au-delà des capacités cognitives des politiciens actuels.

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