Rentrée scolaire : les punitions à l'école sont-elles vraiment efficaces ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Pour que la punition soit reconnue comme juste, elle doit impérativement être expliquée à froid à l’élève.
Pour que la punition soit reconnue comme juste, elle doit impérativement être expliquée à froid à l’élève.
©Reuters

Au piquet !

Proportion et fermeté. Tels doivent être les maîtres mots d'un professeur face à ses élèves. Pour Nathalie Anton, une punition efficace est avant tout une punition juste. Extraits de "L'art d'enseigner" (1/2).

Nathalie Anton

Nathalie Anton

Nathalie Anton est enseignante depuis treize ans. Elle a travaillé en collège et lycée et a intégré durant trois ans une équipe chargée de prévenir et de lutter contre la violence en milieu scolaire. Elle est également psychologue clinicienne. Nathalie Anton anime par ailleurs depuis 2008 un blog destiné aux parents d'élèves, intitulé "Conseil et accompagnement scolaire".

Elle est l'auteur du livre "L'art d'enseigner" chez Ixelles éditions.

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Les élèves se plaignent très souvent du caractère arbitraire des punitions reçues, et les recherches menées par l’Observatoire international de la violence à l’école font de ce sentiment d’injustice l’un des principaux facteurs de violence en milieu scolaire.

Une punition juste est tout d’abord une punition inscrite au règlement intérieur ; elle répond à un manquement aux devoirs qui y sont également mentionnés. Comme l’explique Eirick Prairat, professeur en sciences de l’éducation à l’Université de Nancy II, « la sanction vise à rappeler la primauté de la loi et non la prééminence des adultes ».

Ensuite, cette punition doit être individualisée et prendre en compte le cas particulier de l’élève incriminé, un même fait commis par deux élèves pouvant conduire le professeur à donner deux punitions distinctes :

« On ne sanctionne pas uniquement en fonction de l’acte commis, mais également et surtout s’agissant de mineurs, en considération de la personnalité de l’élève et du contexte de chaque affaire. Mais la réponse apportée en fonction de la gravité des faits reprochés ne doit pas aboutir à une «tarification» des sanctions, car il serait alors porté atteinte au principe de l’individualisation des sanctions. »

De même, la punition doit rester proportionnelle au manquement constaté, et non pas aux antécédents de l’élève en matière d’indiscipline. Ce n’est pas parce qu’un élève est notoirement perturbateur que le professeur lui infligera une punition lourde au moindre écart à la règle constaté.

Enfin, pour que la punition soit reconnue comme juste, elle doit impérativement être expliquée à froid à l’élève, voire à ses parents, de manière à éviter «l’incompréhension et le sentiment d’injustice qui contribuent à fragiliser la notion même d’autorité ». Il s’agit de permettre à l’élève de prendre conscience de ses actes et de devenir plus responsable. Quant à l’information aux familles, le Bulletin officiel du 28 octobre 2004 rappelle fort à propos que « la punition sera d’autant mieux suivie d’effets que les parents auront été avisés et convaincus des motifs de celle-ci. »

Une punition efficace est donc une punition pensée, mesurée et expliquée. Si elle doit constituer une réponse rapide à l’acte constaté et faire l’objet d’une reprise à l’issue de sa réalisation, Eirick Prairat conseille cependant de « se garder du désir d’efficacité immédiate qui est toujours, qu’on le veuille ou non, désir de soumission et de domination [car] bien souvent, chez l’enfant ou l’adolescent, le sens advient après, plus tard».

Rappelons encore que si l’adulte punit pour contraindre, il risque d’encourager chez les jeunes les attitudes d’opposition. Constatant ainsi que 80% des élèves punis sont des garçons, le docteur en sciences de l’éducation Sylvie Ayral met en lumière un terrible paradoxe : « La sanction consacre ce qu’elle prétend combattre : une identité masculine caricaturale qui s’exprime par le défi, la transgression. »

L’important est donc de veiller à un sens éducatif à la sanction donnée, pour permettre à l’élève de modifier ses représentations, et de repartir à zéro en retrouvant, après l’action réparatrice que représente la punition, la confiance dont il bénéficiait avant le manquement puni.

Pour conclure, n’oublions pas que les élèves sont des enfants, des adolescents ou des jeunes adultes en pleine construction affective, intellectuelle et sociale, et que l’école est l’un des lieux majeurs de cet apprentissage : un droit à l’erreur doit ainsi être accordé et réfléchi, au même titre que l’erreur dans le cadre didactique. C’est parce qu’il convient de protéger les élèves des autres mais aussi d’eux-mêmes que des règles sont posées. Et plus les élèves se sentiront protégés par les adultes qui les encadrent, plus ils sauront les respecter.

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Extrait de "L'art d'enseigner" chez Ixelles éditions (22 aout 2012)

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