Réforme du RSA : et pendant ce temps-là, les Suisses envisagent un salaire universel à 2000 euros par mois pour tous leurs citoyens<!-- --> | Atlantico.fr
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Dans son rapport remis à Jean-Marc Ayrault lundi 15 juillet, le député socialiste Christophe Sirugue préconise de remplacer la prime pour l'emploi (PPE) et le RSA-activité par une prestation unique.
Dans son rapport remis à Jean-Marc Ayrault lundi 15 juillet, le député socialiste Christophe Sirugue préconise de remplacer la prime pour l'emploi (PPE) et le RSA-activité par une prestation unique.
©Reuters

C'est de la dynamite !

Alors qu'en Suisse l'idée de la suppression des allocations au profit d'un revenu universel inconditionnel fait son chemin, le rapport du député Christophe Sirugue remis à Jean-Marc Ayrault lundi 15 juillet préconise de remplacer la prime pour l'emploi (PPE) et le RSA-activité par une prestation unique.

Gilles Saint-Paul

Gilles Saint-Paul

Gilles Saint-Paul est économiste et professeur à l'université Toulouse I.

Il est l'auteur du rapport du Conseil d'analyse économique (CAE) intitulé Immigration, qualifications et marché du travail sur l'impact économique de l'immigration en 2009.

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Atlantico : Dans son rapport remis à Jean-Marc Ayrault lundi 15 juillet, le député socialiste Christophe Sirugue préconise de remplacer la prime pour l'emploi (PPE) et le RSA-activité par une prestation unique. La question du remplacement des diverses allocations par un "salaire universel" accordé sans contrepartie aux citoyens commence à émerger. Cette idée, louable au premier abord, est-elle applicable ? Dans quelles mesures ?

Gilles Saint-Paul : Le problème de l'aide universelle est que de par son caractère universel elle est coûteuse. Supposons par exemple que l'on verse une allocation de 700 euros par mois aux plus de 15 ans et de 400 euros par mois aux moins de 15 ans. Cela coûterait environ 500 milliards par an soit environ 25 % du PIB. Cela représente en gros la totalité des dépenses de la Sécurité sociale et la nouvelle allocation devrait donc se substituer à l'ensemble des prestations sociales existantes : retraites, maladie, chômage, RSA, CMU.... On va donc vers un modèle totalement différent d'Etat-Providence, qui aurait cependant le mérite de créer des incitations considérables au travail en bas de l'échelle des revenus. La contrepartie est que l'allocation serait versée à des ménages qui n'en ont nul besoin, mais c'est le prix à payer pour profiter de ses vertus économiques. 

Quel serait l'impact d'un tel système sur le principe d'Etat-Providence ? 

Les conséquences redistributives sont également complexes. En effet cette prestation n'est pas proportionnelle aux cotisations, contrairement aux retraites et aux allocations chômage. Mettre un place un tel système sans revoir la fiscalité qui finance la protection sociale frapperait donc les classes moyennes puisque, en sus de leur contribution à l'allocation généralisée à travers les charges sociales qu'elles acquittent, celles-ci devraient cotiser à des systèmes privés de retraite et d'assurance-chômage pour maintenir leur niveau de prestation. Cependant, la question n'est peut-être pas aussi délicate qu'il y parait puisque celles-ci percevraient l'allocation universelle qu'elles pourraient, si elles le désirent, consacrer entièrement à l'acquisition d'assurance supplémentaire dans le secteur privé.
Bien que j'aie été traditionnellement sceptique sur ce système en raison notamment de son coût, le poids de l'Etat-Providence a atteint un tel niveau que l'idée ne semble désormais plus tant déraisonnable. De plus, on pourrait non seulement éliminer les distorsions associées aux allocations accordées sous garanties de ressources, mais également s'attaquer à d'autres rigidités telles que le SMIC et les coûts de licenciements, qui seraient moins justifiés dans le nouveau système.

Par ailleurs, le fait d'établir un salaire sans contreparties de service ne remet-il pas en cause les fondements même de l'économie ? Un tel système peut-il tenir sur le long terme ?

L'idée n'est pas contraire aux fondements de l'économie, bien au contraire. Elle consiste à verser une allocation fixe à chaque individu indépendamment de sa situation économique. Il s'agit donc d'une forme d'assurance sociale qui ne distord pas les incitations au travail et à l'épargne puisque l'on ne perd pas cette allocation lorsque son revenu augmente, que ce soit parce qu'on travaille plus ou parce qu'on épargne plus. 

Ce système peut-il devenir une "rustine" face à l'émergence d'un chômage de masse lié notamment à la robotisation croissante des emplois de service ?

On peut effectivement se demander si les progrès de la robotisation et les délocalisations ne rendent pas obsolète une société où la capacité des gens à gagner leur vie repose sur le  travail, dans la mesure où l'on ne peut pas exclure qu'une part croissante de la population n'en soit plus capable du fait de ces évolutions. Bien entendu rien de tout cela n'est prouvé et sur longue période le progrès technique a jusqu'ici accru la productivité et le niveau de vie de tout le monde. On reste donc en principe loin de la "fin du travail" mais le réservoir de tâches susceptibles d'être routinisées et confiées à des ordinateurs est encore grand.

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