Réduire plus nos émissions tout en créant des emplois industriels : l’équation périlleuse d’Emmanuel Macron<!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron lors de la présentation des objectifs de la France pour 2030.
Emmanuel Macron lors de la présentation des objectifs de la France pour 2030.
©Ludovic MARIN / POOL / AFP

Et en même temps

Les milliards d’euros qui seront investis dans la transition énergétique et pour la protection de l’environnement par Emmanuel Macron ne vont-ils pas nuire au développement industriel du pays ?

Damien Ernst

Damien Ernst

Damien Ernst est professeur titulaire à l'Université de Liège et à Télécom Paris. Il dirige des recherches dédiées aux réseaux électriques intelligents. Il intervient régulièrement dans les médias sur les sujets liés à l'énergie.

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Atlantico : Emmanuel Macron s’est exprimé ce lundi 24 juillet dans le cadre du journal de 13h. Lors de cette interview, il s’est confié sur les engagements du gouvernement et sur sa politique en matière d’environnement. Le chef de l’État souhaite mettre en place ses plans de transition énergétique, fixer des objectifs clairs tout en se donnant les moyens qui vont avec. Le choix de réduction des émissions n’est-il pas contradictoire avec les objectifs du chef de l’État pour l’industrie ?

Damien Ernst : C’est complètement contradictoire. Développer une grosse entreprise en réduisant les émissions de C02 tout en restant compétitif au niveau international, cela me paraît impossible. Déjà que les prix du gaz et de l’électricité restent élevés en France pour les entreprises, si en plus les entreprises ont des contraintes de décarbonation trop fortes, elles vont continuer de délocaliser. Il faut faire attention à ça, si on impose des taxes à une entreprise pour qu’elle décarbone, il faut que tous ses concurrents soient imposés afin que la première ne soit pas lésée. Lorsque les entreprises exportent des produits à l’étranger, la taxe CO2 ne doit pas être appliquée sur ces produits.

Quelles sont les principales difficultés auxquelles sont confrontés Emmanuel Macron et la France pour concilier protection de l’environnement et emplois industriels ? La politique de l’UE met-elle par exemple des bâtons dans les roues d’Emmanuel Macron ?

Il y a eu à un moment de la part d’Emmanuel Macron la volonté de faire une pause environnementale, l’industrie française, déjà en lambeaux si je puis dire, ne pouvait plus se permettre de supporter une législation plus lourde, ce qui la rend moins compétitive par rapport aux industries étrangères. En revanche, si Emmanuel Macron veut continuer avec une législation environnementale contraignante, il doit faire en sorte qu’elle ne soit pas un handicap par rapport à des entreprises localisées dans d’autres pays qui elles ne subissent pas cette législation. Sinon, cela conduit à une désindustrialisation encore plus importante de la France pour un même niveau de pollution, car les entreprises touchées vont délocaliser.

Quelles sont les forces et les faiblesses du modèle français sur les enjeux de la réindustrialisation et de l’environnement ?

La France reste un État jacobin, fort centralisé. Il y a toujours des outils industriels qui contrôlent directement le travail, ce qui constitue une force, au même titre que le nucléaire, sur lequel le chef de l’État doit s’appuyer durablement.

En revanche, au niveau industriel, les fragilités d’approvisionnement au niveau de l’électricité sont toujours là, avec un prix du gaz qui est significativement plus élevé en France qu’aux États-Unis.

Les milliards d’euros qui seront investis dans la transition énergétique et pour la protection de l’environnement ne vont-ils pas nuire au développement industriel du pays ?

Cela dépend de l’usage fait des milliards d’euros d’investissement. Aux Etats-Unis, Joe Biden a baissé les impôts pour les entreprises vertueuses sur le plan écologique. Cela ne pénalise pas les entreprises car ce ne sont pas des taxes mais des baisses d’impôts. Il ne faut plus aller vers des taxes, mais prendre le parti de flux d’argent distribués vers les entreprises si celles-ci respectent les contraintes environnementales.

Les objectifs d’Emmanuel Macron sur la réouverture d’usine, la relocalisation de certaines entreprises (notamment pour les médicaments) et dans le cadre de la réindustrialisation sont-ils compatibles avec les objectifs de réduction de CO2 ?

Il est difficile à l’heure actuelle de promouvoir une industrie plus verte. Tous les composants verts nécessaires pour la transition écologique coûtent plus cher que les composants fossiles. Peut-être que dans dix ou quinze ans, la réflexion sera tout autre.

Quelles seraient les mesures idéales à adopter pour concilier les deux domaines (l’industrie et les objectifs pour la protection de l’environnement) pour la France ? Emmanuel Macron serait-il susceptible de les adopter ou de les suivre ?

En donnant des crédits d’impôts aux entreprises vertueuses comme aux États-Unis, cela permet la réindustrialisation. Il faut arrêter avec ce mode de pensée européen qui consiste à taxer toujours plus. 

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