Rama Yade, Rachida Dati, Eric Besson etc. : que reste-t-il des étoiles de la Sarkozie ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Rama Yade, ancienne secrétaire d'Etat sous Nicolas Sarkozy.
Rama Yade, ancienne secrétaire d'Etat sous Nicolas Sarkozy.
©Reuters

Complexe d'Œdipe

Rama Yade sort cette semaine un livre intitulé "Carnets du pouvoir". L'ancienne protégée de Nicolas Sarkozy a récemment rejoint l'UDI de Jean-Louis Borloo.

Jean Garrigues

Jean Garrigues

Jean Garrigues est historien, spécialiste d'histoire politique.

Il est professeur d'histoire contemporaine à l' Université d'Orléans et à Sciences Po Paris.

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages comme Histoire du Parlement de 1789 à nos jours (Armand Colin, 2007), La France de la Ve République 1958-2008  (Armand Colin, 2008) et Les hommes providentiels : histoire d’une fascination française (Seuil, 2012). Son dernier livre, Le monde selon Clemenceau est paru en 2014 aux éditions Tallandier. 

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Atlantico : Rama Yade, ancienne secrétaire d’Etat et étoile du quinquennat Sarkozy publie un livre dans lequel elle dresse un inventaire de ces années. Dans cet ouvrage, elle estime que sans Nicolas Sarkozy elle ne serait pas en politique. Pourtant, la conseillère régionale d’Ile-de-France a aujourd’hui rejoint les rangs de l’UDI. Que reste-t-il des protégés de Nicolas Sarkozy sur la scène politique française ?

Jean Garrigues : Ils ont eu des sorts différents les uns des autres, ce que l’on peut observer c’est que certains s’en sont servis comme tremplin pour s’installer dans la vie politique, c’est le cas de Rama Yade ou de Nathalie Kosciusko-Morizet (NKM). Cette dernière avait néanmoins une trajectoire qui semblait déjà bien entamée. Aussi, Rachida Dati, avant d’être la porte-parole de campagne de Nicolas Sarkozy n’était pas une personnalité de premier plan à droite et est devenue vice-présidente de l’UMP, maire du 7ème arrondissement, candidate à la candidature pour la mairie de Paris, député européen… Il y a eu incontestablement un effet d’accélération grâce à Nicolas Sarkozy. Il en est de même pour Rama Yade. Un certain nombre de ces "protégés" n’ont pas été fidèles à Nicolas Sarkozy. Rama Yade est partie au parti radical (aujourd'hui l’UDI), et a suivi Jean Louis Borloo. Martin Hirsch a appelé à voter François Hollande, de même pour Fadela Amara.

Pour les ministres d’ouverture l’effet a été plutôt négatif. Bernard Kouchner a quitté la vie politique active pour créer une agence de conseil.  Si son statut d'ancien ministre des Affaires étrangères lui a été utile pour sa carrière privé, cela été la fin de sa vie politique, puisqu’il a été rejeté par les deux camps. Jean Marie Bockel, qui était le maire de Mulhouse et avait créé un courant La gauche moderne au sein du Parti socialiste (PS), a été laminé, mangé par son expérience sarkozyste. Fin  provisoire puisqu’il est Sénateur du Haut-Rhin, mais cela reste un échec. On pourrait en dire autant pour Eric Besson, il a pris le risque de quitter le PS pour rejoindre Nicolas Sarkozy. Il était pourtant une figure du PS en 2006. Son désaccord avec Ségolène Royal l’a conduit vers Nicolas Sarkozy et aujourd’hui vers une impasse politique. Bien qu’il soit maire de Donzère dans la Drôme mais reste à l’écart de la vie politique. Pour la plupart des ministres d’ouverture ça a été l’impasse. Finalement certains sont retournés à gauche. 

"Les personnalités de l'ouverture" ont été plus fidèles que certains proches de Nicolas Sarkozy. Que ce soit Eric Besson ou Bernard Kouchner, ils n’ont pas pris parti au moment de l’élection 2012, n’ont pas gêné la campagne de Sarkozy. Cette fausse ouverture les a conduits dans l’impasse politique. Car l’ouverture n’est valable que si elle s’appuie sur des accords entre partis.

Rachida Dati ou encore Rama Yade pourraient être qualifiées "d’étoiles filantes", aujourd'hui beaucoup plus effacées de la vie politique et médiatique que NKM par exemple. Comment expliquer ce phénomène ? 

Ce sont des personnalités précisément qui doivent leur notoriété politique à leur image médiatique. Ce sont des fruits de la surmédiatisation de la vie politique et elles n’ont pas d’encrage politique réel, de légitimité, tant dans leur formation politique qu’aux yeux de l’opinion… L’une comme l’autre projettent des images d’artifice. Sur le plan politique Rachida Dati a perdu la bataille de la candidature car elle était moins politiquement ancrée que celle de NKM. Quant à Rama Yade c’est un parcours assez trouble avec quelques histoires (condamné pour diffamation à l'encontre du maire de Colombe et de plagiat dans le cadre de son précédent ouvrage). Ce sont des gens sur lesquels plane une atmosphère de scandale, de bling bling qui font d’elles des ovnis en politique, des gens qui ne sont pas du sérail politique. C’est quelque chose qui est interne à la vie politique mais qui transparaît dans l’opinion. On est aux antipodes d’une carrière d’un Alain Juppé, qui est d’une grande longévité politique.

Rama Yade déclare dans une interview au Parisien à propos de Nicolas Sarkozy : "Je suis dans le registre de l’admiration ". Nicolas Sarkzoy lui-même avait regretté en 2012 ne pas avoir "suffisamment protégé" Rama Yade et Rachida Dati, respectivement évincées du gouvernement en 2010 et en 2009. Ces personnalités parviendront-elles à exister tant que Nicolas Sarkozy sera présent ? Doivent-elles "tuer le père" ? 

Je pense qu’effectivement elles apparaissent comme des créatures de Nicolas Sarkozy. La potentialité d’un retour, la présence très forte de Nicolas Sarkozy dans le paysage politique font qu’elles n’ont pas d’existence autonome. A la différence d’une NKM qui a réussi à  exister de manière autonome,  notamment parce que pendant la campagne électorale elle avait émis des réticences vis-à-vis des inflexions à droite et depuis s’est rapproché de François Fillon  Elle a choisi un positionnement plutôt critique. Cela dit Rama Yade aussi mais il y a une question ici de cursus politique. NKM était ancrée en politique avant Nicolas Sarkozy.

Propos recueillis par Carole Dieterich

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