"Quelques minutes de vérité" : pourquoi Nicolas Sarkozy prend toujours Laurent Wauquiez pour un centriste<!-- --> | Atlantico.fr
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Nicolas Sarkozy prend toujours Laurent Wauquiez pour un centriste.
Nicolas Sarkozy prend toujours Laurent Wauquiez pour un centriste.
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Bonnes feuilles

Anna Cabana publie chez Grasset "Quelques minutes de vérité", livre dans lequel elle raconte ses mésaventures de journaliste et autres anecdotes croustillantes. Extrait (2/2).

Jusque- là, quand il proclamait cela : " Je ne suis pas centriste !", nul ne le croyait. Sarkozy ne le croit toujours pas, du reste. " Ça l’amuse, que ce soit un centriste qui lance ces débats ", me raconte Wauquiez. Il marque un temps d’arrêt. " Dire que Sarkozy me prend pour un centriste ! "

Quand je lui fais remarquer qu’il a tout fait pour ça, depuis qu’il s’est jeté dans l’arène politique, voilà presque sept ans, il fait mine de se plonger… dans la carte. Hèle le maître d’hôtel, commande des pâtes. Répète : " Je ne suis pas centriste ! " Hésite entre un sourire et un soupir. " Sarkozy finira par le comprendre. " Et de vider son verre de jus de fruits. On est juvénile ou on ne l’est pas.

" Fillon va trop loin contre moi. Sarkozy ne peut pas dire “Laurent a tort”, parce qu’il a vu les sondages. " Il sait qu’il leur doit, auxdits sondages, le fait d’être encore ministre. Il sait aussi que Fillon est convaincu qu’il a été téléguidé par Patrick Buisson. Wauquiez hausse les épaules. " C’est moi qui ai bassiné Patrick sur le mode : “On ne peut pas faire que du régalien. Il faut revenir sur le thème de l’assistanat et parler des classes moyennes.” Chez moi, c’est une conviction ancienne. Ça fait un an et demi que je bosse dessus. "

Avait- il informé Buisson de ce qu’il allait dire ?

" Yep !

— Mais encore ?

— Patrick était au courant, il m’a toujours encouragé à sortir là- dessus. "

J’avais appelé Buisson avant de retrouver Wauquiez, le politologue venait de finir une réunion à l’Elysée : " Le Premier ministre est désagréable avec moi. Il pense que je suis derrière tout ça. Je ne sais pas pourquoi il voit “la main” derrière ce qu’a fait Laurent. La main. Hi hi hi… "Ça ne déplaît pas à Buisson, de passer pour le grand marionnettiste. Même si, dans le cas d’espèce, ce n’est pas tout à fait vrai. Il se garde bien de me le dire. Il m’assure " approuver totalement les propositions de Laurent " mais désavouer les vices de forme : il juge que Wauquiez n’aurait pas dû employer le mot " cancer " et pas davantage reprendre la phraséologie lepéniste " je dis tout haut ce que les gens pensent tout bas ".

Je le raconte à Wauquiez, qui bondit : " Qu’on ne me dise pas que je fais la course derrière le Front national ! Madame Le Pen a dit : “Il n’y a pas de problème d’assistanat en France.” Il faut arrêter avec les faux procès ! " Il est énervé. La seule autre fois du déjeuner où il le sera, c’est quand je reviendrai sur ce qu’il a dit de pire, depuis que je le connais : sa saillie sur Dominique Strauss- Kahn, deux mois plus tôt, en mars, quand il a accueilli Sarkozy au Puy- en- Velay. Tandis que les journalistes le pressaient de questions pour savoir si le but de la visite du chef de l’Etat dans ce haut lieu de la chrétienté était de se différencier de DSK, l’encore héraut du PS, Wauquiez avait répliqué : " Ce n’est pas la même approche, Dominique Strauss- Kahn est à Washington, il a sûrement une très belle maison qui donne sur le Potomac. Ce n’est pas la Haute- Loire, ce n’est pas ces racines- là. " Comme il ne saurait être soupçonné de ne pas connaître son histoire de France, nul n’a pensé qu’il avait employé le mot " racines " au hasard… Cela doit être la dixième fois que je lui en fais le reproche. " Je me suis excusé, j’ai le droit d’avoir fait une erreur, non ? " bouillonne-t-il. Il n’est pas habitué à être pris en faute. Il est penaud. " Je ne suis pas pervers. Cette case- là me manque. " Mais à force de tout faire pour pallier ce " manque ", il a réussi à passer pour le pire des cyniques.

Il aurait moins d’ennemis s’il l’était vraiment.

Extrait de Quelques minutes de vérité, de Anna Cabana, publié chez Grasset. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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