Quelle ligne économique pour Nicolas Sarkozy ? Ce que révèle l’analyse croisée de son intervention sur France 2 et de son discours de la Concorde en 2012<!-- --> | Atlantico.fr
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Nicolas Sarkozy lors du meeting de la Concorde.
Nicolas Sarkozy lors du meeting de la Concorde.
©REUTERS/Philippe Wojazer

Retour aux fondamentaux

Si son intervention télévisée du 21 septembre est déjà critiquée pour une prétendue absence de fond, sans doute en raison de l’absence de détails, il apparaît qu’une ligne macroéconomique semble bien se dessiner. En effet, à travers quelques phrases clés, l’ancien président revient à quelques-uns de ses fondamentaux de 2012.

Nicolas Goetzmann

Nicolas Goetzmann

 

Nicolas Goetzmann est journaliste économique senior chez Atlantico.

Il est l'auteur chez Atlantico Editions de l'ouvrage :

 

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Dans un premier temps, Nicolas Sarkozy se livre à une critique ferme du pouvoir actuel, en insistant très lourdement sur les hausses d’impôts intervenues depuis l’entrée en fonction de François Hollande. Une politique qu’il résume à ces formules ; "taxer plus", "augmentation des impôts", les mots sont répétés à plusieurs reprises. La conclusion est donnée par cette phrase :

"La seule question qui compte : quel est le système fiscal qui permettra à nos entreprises de créer de la croissance, de créer des emplois ?"


Sur ce point, Nicolas Sarkozy vient donner satisfaction à une majorité d’électeurs de l’UMP, favorable à une telle réduction des dépenses et à une baisse de la fiscalité. Aucune surprise. Une ligne si majoritaire qu’elle forme une sorte de socle commun à la quasi-totalité des personnalités de l’UMP.
Dans un second temps, Nicolas Sarkozy rend hommage à l’Allemagne, qualifiée de "meilleur élève de la classe", ou encore "l’Allemagne est prospère". Jusqu’ici, rien de nouveau. En caressant le grand voisin européen dans le sens du poil, l’ancien Président porte une vision européenne classique.
Mais c’est à partir de là qu’une nouveauté prend forme, lorsque la politique économique européenne est visée : "En revanche ce que je pense, c’est que la zone euro ne peut pas continuer sans croissance".


Et ce constat froid ne vient pas seul, il ne s’agit pas d’une simple incantation. Nicolas Sarkozy propose alors : "On ne peut pas avoir comme objectif de lutter contre l’inflation, alors qu’il n’y a plus d’inflation. On doit avoir pour objectif de créer les conditions de la croissance".
La formule n’a l’air de rien, mais elle a un sens économique. Du moins un sens clair en termes monétaires. Car abandonner l’objectif de lutte contre l’inflation ne signifie rien d’autre que la révision du mandat de la Banque centrale européenne. Un casus belli pour l’Allemagne d’Angela Merkel. Derrière les mots doux, c’est une attaque par la face nord du dogme économique européen qui prend forme ici. Une attaque qui rappelle le discours de la Concorde du 15 avril 2012, lorsque Nicolas Sarkozy indiquait :
"Je veux aller plus loin encore. Après ce que nous avons fait pour sauver l’euro, je veux poser non seulement le problème des frontières, mais aussi celui du rôle de la Banque Centrale dans le soutien à la croissance. C’est une question très importante, que nous ne pourrons pas éluder. Si l’Europe ne veut pas perdre pied dans l’économie mondiale, elle doit absolument renouer avec la croissance."
"Alors sur le rôle de la Banque Centrale Européenne dans le soutien à la croissance, nous allons, nous les Français, ouvrir le débat, et nous allons faire avancer l’Europe !"


"Si la Banque Centrale ne soutient pas la croissance, nous n’aurons pas assez de croissance. La crise, et l’Européen convaincu que je suis veut le dire, nous a montré les limites des règles qui ont été fixées dans le Traité de Maastricht. Je sais les difficultés d’aborder ce sujet. Je connais les obstacles. Mais je dis : nous avons le devoir de réfléchir à cette question. Parce que cette question est un problème majeur pour l’avenir de l’Europe. C’est un problème stratégique pour l’Europe. L’Europe doit apurer ses dettes, elle n’a pas le choix ; mais entre la déflation et la croissance, l’Europe n’a pas davantage le choix. Parce que si l’Europe choisit la déflation, alors l’Europe disparaîtra. Souvenons-nous des années 30. Si les Français me font confiance, j’ouvrirai ce débat".


Il est ici à noter que les références à la déflation sont déjà posées dès avril 2012. Et ces déclarations ne sont pas anodines. Car la forme actuelle du mandat de la BCE, directement héritée de la tradition de la Bundesbank, a été la condition sine qua non du ralliement de l’Allemagne à la zone euro.
De plus, une telle modification du mandat aurait pour effet d’imposer à la BCE de tenir compte du niveau de chômage au sein de la zone euro. Dans la réalité actuelle, c’est-à-dire un taux de chômage de 11.5%, cela signifie l’obligation pour la BCE de mettre en place un plan de relance de plusieurs milliers de milliards d’euros, sous la forme d’un assouplissement quantitatif. De quoi nourrir une  discussion "franche et  sérieuse" avec l’Allemagne. Lorsque Nicolas Sarkozy flatte le "meilleur élève de la classe", l’intention réelle paraît moins docile. Si cette ligne était confortée lors des prochaines interventions du Président, reprenant alors les mesures annoncées à la Concorde, la construction européenne pourrait en être profondément modifiée.

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