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La France se donne-t-elle les moyens d'un plan pour répondre à une attaque brutale des marchés ?
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Chute libre

Que l'on conteste ou non l'utilisation politique par Nicolas Sarkozy de la menace d'une tempête financière post élection de Francois Hollande, peut-on oublier que le poids de la dette française affaiblit gravement le pays ?

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Certaines autruches font mine de découvrir, le bec enfariné, que la dette française est un flanc que nous prêtons à la spéculation des marchés.

Les mêmes autruches, dont des journalistes, s’empressent de démentir les rumeurs de prochaine attaque financière contre la France, en les taxant volontiers d’opération destinée à fragiliser la candidature de François Hollande. On appréciera le raisonnement implicite: si Nicolas Sarkozy est élu, les marchés n’attaqueront pas la France. C’est un pari que je ne prendrai pas.

De façon assez significative, François Hollande lui-même est l’un des premiers à avoir personnellement donné foi à cette rumeur, il y a quelques semaines. Il aurait d’ailleurs mandaté des proches (l’une d’entre eux en particulier) pour faire une tournée discrète de popotes auprès des «zinzins», les investisseurs institutionnels, afin d’en savoir plus. Il a semble-t-il été majoritairement répondu que ni en Grande-Bretagne ni en Allemagne, les investisseurs institutionnels n’avaient reçu de quelconque consigne en ce sens.

En revanche, les fonds privés ont flairé la bonne affaire: pourquoi prêter à la France à moins de 4%, quand on pourrait tout aussi bien prêter à 7 ou 8% ? Voilà une bonne occasion de se refaire quand on a subi des pertes sur le marché actions.

L’avantage avec la spéculation sur les dettes souveraines, c’est qu’on gagne au tirage et au grattage. Non seulement les taux d’intérêt permettent un bon rendement, mais les gouvernements en place mettent tout en oeuvre pour honorer leur dette. Un placement lucratif et sûr, que demander de mieux?

Bref, selon toute vraisemblance, le regain de tension déjà perceptible sur les dettes espagnoles et italiennes ne devrait pas tarder à nous atteindre, à la faveur d’un lendemain d’élection présidentielle où les candidats partisans d’une réforme financière en profondeur ont été unanimement marginalisés ou moqués par l’opinion. L’hypnose française sous cocaïne démagogique se termine, place à la gueule de bois.

La France est-elle en ordre de bataille pour affronter ce gros temps? C’est là que le bât blesse, quelle que soit la personnalité qui sera élue le 6 mai.

La seule réponse crédible prévue par Bercy est, en préparation secrète derrière l’écran de fumée d’une loi de finances 2013 dite «électorale», une loi de finances prévoyant 20 milliards d’euros de réduction de dépenses. Il semblerait qu’un tiers de cette somme serait prélevé sur le budget de l’Etat et des collectivités, notamment en supprimant des niches fiscales. Les deux tiers restants relèveraient de la loi de financement de la sécurité sociale, et toucheraient tous les postes de dépense.

La couverture maladie universelle, notamment, ne serait pas épargnée.

Au fond, la stratégie de Bercy pour apaiser les marchés financiers est de continuer la politique menée sagement depuis quelques années: on saupoudre les efforts, en tapant plus fort là où ça résiste le moins (sur les pauvres, donc), mais en préservant l’illusion d’un effort partagé, avec quelques mesures à l’encontre des plus aisés.

20 milliards, c’est l’effort maximal que Bercy considère comme socialement supportable. Au-delà, les analystes publics pensent que le pacte social français est rompu et que l’aventure commence.

Or, le déficit de l’Etat est supérieur à 80 milliards. On est donc loin du compte.

Toute la question est: 20 milliards d’euros d’économies pour 2013 suffiront-ils à éteindre un incendie spéculatif? L’inconnue commence ici.

Beaucoup d’analystes considèrent que ce chiffre devrait suffire à rassurer les marchés en cas de chauffe. La situation serait maîtrisable, donc, et, même si la perspective ne réjouit personne, elle ne devrait pas susciter de grogne sociale majeure.

Mais il existe une situation beaucoup plus gênante: début mai, la France est attaquée. En grande pompe, le nouveau président de la République (il paraît acquis qu’une femme ne sera pas élue à cette poste cette année), sortant ou non, explique qu’on va faire des efforts, etc. Le projet de loi de finances à 20 milliards d’économies sort,... mais la spéculation continue.

Que faire?

Visiblement, personne ne le sait, ce qui est bien gênant. Il n’existe pas de plan B. On appellera Angela Merkel à la rescousse et puis advienne que pourra.

Alors que les banques et les assurances se voient imposer (à juste titre) de nouvelles normes comptables qui les obligent à cartographier et maîtriser leurs risques financiers, l’Etat n’a pas jugé utile de s’appliquer cette règle à lui-même. Moyennant quoi, le déficit public atteint 30% des recettes. Sans stratégie de sécurité en cas de panique des marchés.

Que les autruches remettent leur tête dans le sable,... «Encore un instant», avait demandé Louis XVI sur l’échafaud.

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