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Mais qui sont donc les Qataris ?
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Foot business

Le Qatar sur de retour sur le devant de la scène sportive. Après l'organisation de la Coupe du Monde, le fonds souverain du pays a racheté le PSG. Robert Ménard, fondateur de Reporters Sans Frontières, a vécu dans ce pays. Il nous livre son point de vue sur les Qataris.

Robert Ménard

Robert Ménard

Robert Ménard a été journaliste et fondateur de Reporters Sans Frontières (RSF).

Président de l'association de 1985 à 2008, il a dirigé un centre d'accueil pour les journalistes à Doha (Qatar) de 2008 à 2009.

Il a été élu en avril 2014 maire de la ville de Béziers

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Atlantico : Vous avez vécu au Qatar. Quel bilan tirez-vous de cette expérience ?

Robert Ménard : J’y suis allé parce que j’ai rencontré la femme de l’Émir Sheikha Mozah. J’étais alors patron de Reporters Sans Frontières. Elle nous a proposé d’ouvrir là-bas un centre pour défendre la liberté de la presse. Je savais quelle était la réalité des droits de l’homme au Qatar. J’en ai parlé avec elle. Elle m’a dit que nous étions là pour changer cela. Vous pouvez penser que j’ai été naïf, mais j’y suis donc allé pour changer un certain nombre de choses. Le problème, c’est que j’avais confondu le Qatar et la femme de l’Emir : même si elle a beaucoup de pouvoir, elle n’est pas toute seule et un certain nombre de gens au Qatar n’ont aucune envie de voir changer quoi que ce soit dans leur pays. Cela s’est vite détérioré et mal passé, la situation est devenue menaçante pour les gens qui travaillaient avec moi, alors nous sommes partis.

Que pensez-vous de la façon dont les médias français ont traité le rachat du Paris Saint-Germain par le fonds souverain du Qatar et le choix de ce pays pour organiser la Coupe du monde de football en 2022 ?

Un certain nombre de faux-culs ont l’air de découvrir que l’argent fait la loi dans le milieu du football. Pourtant, c’est une réalité de tous les jours : quand on voit le mercato et les joueurs qui vont d’un club à un autre, quand on voit le quotidien d’un club de foot, l’argent fait la loi dans ce sport depuis déjà longtemps ! Imaginez-vous un seul instant qu’au moment où l’on négocie pour tel ou tel pays la Coupe du monde, l’argent que le pays peut mettre dans la balance ne pèse pas dans la décision ?

Reste que ce pays n’est pas un modèle de démocratie…

C’est certain ! Quand vous êtes Philippin, Sri Lankais ou Indien et que vous arrivez à l’aéroport de Doha, la capitale du Qatar, vous ne disposez d’aucuns droits. Votre employeur se charge de garder en main propre votre passeport et vous ne pouvez donc pas sortir définitivement du pays sans son accord. Les conditions de travail sont extrêmement dures car il fait très chaud et il est certain qu’au Qatar, les droits sociaux sont peu respectés.

Mais cela ne concerne pas que ce pays, cela concerne l’ensemble des pays du Golfe. Et cela ne touche pas qu’au football : c’est le quotidien. 75-80 % des habitants du Qatar sont de travailleurs immigrés qui ont peu de droits et sont presque considérés comme des esclaves.

Bien-sûr, la question des manquements démocratiques se posent. Mais est-ce bien raisonnable de demander à l’Emir du Qatar de payer les rançons des infirmières bulgares en Libye ? Est-ce bien raisonnable de demander systématiquement au Qatar de régler tel ou tel problème à coups de millions ? Comment pensez-vous que la paix (relative) s’est faite au Liban ? Est-ce l’argumentaire du Qatar ou son carnet de chèque qui a permis que les Libanais se retrouvent autour d’une table ? Même chose pour le Darfour. On semble donc découvrir seulement aujourd’hui que ce pays n’est pas une démocratie.

Pourtant les Occidentaux et la France en particulier le courtisent. J’ai pu voir des hommes politiques français, de droite comme de gauche, arriver au Qatar pour faire des affaires. Le Qatar est un pays qui possède beaucoup d’argent et qui est prêt à le mettre dans tout un tas de domaines à condition que cela fasse de la publicité au pays (c’est pour cela qu’ils investissent dans le sport). Ils ont tellement d’argent qu’ils savent que tout est permis pour eux. En plus, ils disposent Al Jazeera qui est la chaîne de télé qui fait la pluie et le beau temps dans certains pays…

Quand je me trouvais au Qatar, j’ai entendu des discours à tomber par terre, notamment de Jacques Chirac ou de Bertrand Delanoë. Le premier disant que le Qatar était intrinsèquement démocratique et le second présentant le Qatar et la France comme deux pays de grande culture. Franchement, les Qataris ont beaucoup de qualités, mais pas celle d’avoir une grande culture historique…

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