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Printemps Arabe : An II
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Souviens-toi l'hiver dernier

Il y a un an jour pour jour, un vendeur de fruits anonyme de Sidi Bouzid en Tunisie, en s’immolant par le feu, déclenchait le vent de liberté le plus irrésistible qu’ait jamais connu le monde arabe. Un an après, entre tentation islamiste, démocratisation et repli sécuritaire, que reste-t-il de l’héritage de Mohamed Bouazizi ? Tour d’horizon des « printemps arabes ».

Abdelmalek Alaoui

Abdelmalek Alaoui

Abdelmalek Alaoui est directeur général du cabinet de communication d'influence Guepard Group.

Il est l'auteur du livre Intelligence Economique et guerres secrètes au Maroc (Editions Koutoubia, Paris).

 

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Face à la montée de la contestation populaire qui s’est peu à peu généralisée à partir de janvier dernier au Maghreb, il faut d’abord constater que l’ensemble de la palette de la communication de crise a été déroulé par certains régimes à bout de souffle. Entre discours grandiloquents et promesses de réformes pour le Tunisien Ben Ali, harangues exotiques au parfum de science-fiction pour le défunt Mouammar Kadhafi, ou encore tribunes paternalistes pour Moubarak l’Égyptien, les gérontocrates aux commandes de l’est du Maghreb auront tenté par tous les moyens de se maintenir au pouvoir.

Avec leur départ, c’est un système de rente sur fond de corruption généralisée qui a été dévoilé. Il a laissé la place à un immense espoir pour les peuples qui vivaient sous le joug de ces autocraties. Cependant, la transition s’est avérée peu à peu plus complexe que prévu, car l’autorité de l’Etat ayant disparue, c’est une véritable "page blanche" que se devaient d’écrire désormais des révolutionnaires qui n’avaient jamais été préparés à exercer le pouvoir.

S’en suivront donc un printemps et un été pour le moins paradoxaux, où est apparue la nécessité pour la révolution de "composer" avec certaines personnalités historiques du pouvoir, comme le Maréchal Tantaoui en Egypte, Mohammed Ghannouchi ou Béji Caïd Essebsi en Tunisie. En Lybie, le chef de la rébellion et patron du CNT n’est autre que l’ancien ministre de la justice du "guide" de la révolution, Moustapha Abdel Jalil, reconverti rapidement en icône révolutionnaire, bien qu’il ait été l’homme de la condamnation des infirmières bulgares.

Devant ces atermoiements et cette incapacité à générer un leadership rénové, c’est donc sans surprise que ceux qui étaient les mieux organisés et les plus habitués à se déployer dans la clandestinité, les islamistes, se sont immédiatement positionnés lors des grandes échéances électorales qui ont suivi, décrochant presque partout au Maghreb la majorité.

Leader de l’assemblée constituante en Tunisie, le parti Ennahdha, longtemps interdit sous le régime de Ben Ali, a fait figure d'ouvreur de piste pour les frères musulmans égyptiens et leurs inquiétant coreligionnaires Salafistes, qui ont réussi à rafler la majorité. 

Même au Maroc, ou un processus de révolution "douce" à travers une réforme constitutionnelle  avait  permis de canaliser les demandes populaires qui s’étaient exprimées à travers le "mouvement du 20 février", les islamistes du PJD ont réussi à réunir près de 27% des suffrages aux législatives, ce qui les a conduit à diriger le gouvernement actuellement en formation.

Pour autant, cette "poussée verte" au Maghreb ne doit pas être interprétée comme un échec de la réforme née avec le printemps arabe, mais plutôt comme une phase transitoire pour des démocraties en devenir qui cherchent encore le modèle le plus adapté à leurs réalités socio-économiques et à leur tissu culturel. En effet, le désir de changer de modes de gouvernance a généré un effet de bascule qui a profité à ceux qui incarnaient le mieux l’ordre moral. Gagnés par la peur que la révolution ne leur échappe et installe durablement le désordre, les révolutionnaires du "printemps arabe" ont, dans un réflexe de repli, confié les clefs de la maison aux islamistes. Reste à espérer qu’ils en fassent bon usage.

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