Présidentielle 2022 : le simulateur qui montre que votre voix peut faire la différence même si vous êtes convaincu du contraire <!-- --> | Atlantico.fr
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La Fondation pour l’innovation politique (Fondapol) propose un tout nouveau simulateur permettant de constater les évolutions sur les reports de voix pour l'élection présidentielle de 2022.
La Fondation pour l’innovation politique (Fondapol) propose un tout nouveau simulateur permettant de constater les évolutions sur les reports de voix pour l'élection présidentielle de 2022.
©Fred TANNEAU / AFP

Vote

La Fondation pour l’innovation politique propose un nouveau simulateur électoral sur les reports de voix pour l'élection présidentielle de 2022. Dans des scénarios relativement proches, les résultats finaux varient réellement, démontrant que chaque voix compte.

Dominique Reynié

Dominique Reynié

Dominique Reynié est professeur des Universités en science politique à l’Institut d’études politiques de Paris et directeur général de la Fondation pour l'innovation politique (Fondapol).

Il est l'auteur de nombreux ouvrages dont Populismes : la pente fatale (Plon, 2011).

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Atlantico : Alors qu’une part non négligeable des électeurs qui déclarent avoir l’intention de s’abstenir lors de ces élections présidentielles expliquent qu’ils ont l’impression que leur voix ne comptera pas, vous avez mis au point un simulateur de report de vote. Quelle est la pertinence de cet outil ? 

Dominique Reynié : Nous avions créé un outil similaire lors des élections présidentielles de 2012, puis de 2017. C’est un outil éprouvé qui a été utilisé par la Fondapol pour les législatives, les municipales … C’est à la fois un instrument de compréhension de mécanismes qui président à la production d’un résultat mais également un outil qui permet une interprétation de ce résultat. On remarque bien que les deux finalistes peuvent être à la fois battus ou élus, en fonction du transfert des voix. Grâce aux fonctionnalités de cet outil, on peut faire varier les hypothèses du transfert de voix et on remarque où se trouvent les hypothèses réalistes et les impossibilités politiques. On remarque également dans quelle mesure l’abstention et le vote blanc sont des acteurs importants de cette élection. 

On constate que le fait de ne pas aller voter ou à l’inverse d’aller voter au lieu de s’abstenir change les résultats de façon certaine. En somme, le fait de ne pas aller voter produit un effet de même importance que d’aller voter. Le meilleur exemple de ce constat s’est produit le 21 avril 2002, avec 28% d’abstention. Ce phénomène résultait purement d’une agrégation de décisions individuelles. Pourtant, cela a provoqué l’élimination de Lionel Jospin, contre toutes attentes. Des électeurs modérés ont, en se retirant du jeu, provoqué la baisse du niveau électoral de Jospin, ce qui a contribué à son élimination avant le second tour. L’abstention est donc un comportement électoral qui peut avoir de lourdes conséquences. 

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Vous avez montré sur Twitter que dans des scénarios relativement proches en termes de transferts de voix, les résultats finaux ne seront pas du tout les mêmes. Dans l’hypothèse d’un second tour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, un léger changement des reports de vote peut-il entraîner un résultat complètement différent ?

Absolument, cela fait partie des intérêts de cette matrice. On voit bien que dans le cas où les résultats du premier tour semblent relativement serrés, une légère évolution des hypothèses de transfert des voix produisent des résultats opposés. Le constat est identique en ne changeant pas les hypothèses de transfert des électorats, mais simplement le taux de participation entre les électeurs de tel ou tel candidat. 

Cela veut-il dire que, comme on l’entend souvent, chaque voix compte ?

Tout à fait. On peut avoir l’impression que c’est un mot de mobilisation ou un argument philosophique, et cela est vrai, mais en réalité chaque voix compte.

L’élection à venir est-elle particulièrement ouverte par rapport à d’autres ? Des changements notables peuvent-ils avoir lieu sur des décisions marginales, comme en 2002 ? 

Cette élection n’est pas comparable avec d’autres. Selon les sondages, il y aura un second tour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. En 2002, il n’était pas question que Jean-Marie Le Pen soit un candidat consistant, raison pour laquelle Chirac ne voulait même pas débattre avec lui. En 2017, Marine Le Pen avait fait 34% alors que son père avait fait 20% quinze ans plus tôt. C’est quand même 14 points de plus. Lors des élections de 2022, on est désormais convaincus que cet écart sera beaucoup plus serré. Certains sondages considèrent même que cet écart est si faible qu’il correspond à la marge d’erreur et qu’il n’est pas possible de prédire l’issue du scrutin. Ces élections sont donc sans précédent. Depuis 1965, il y a toujours eu des candidats du gouvernement au second tour et il n’y a jamais eu d’hypothèses de victoire crédibles pour un candidat contestataire.

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Lors de la pré-campagne, nous avions le sentiment que l’issue du scrutin serait jouée d’avance pour Emmanuel Macron. Est-ce une erreur de raisonner ainsi ? 

C’est une règle d’or lors d’une campagne électorale. On peut être favori mais ce n'est pas au candidat de donner ses pensées. S’il est difficile d’être un challenger, il est également dangereux d’être favori pendant une trop longue période car il peut y avoir une usure de cette position. Lorsque les acteurs politiques et les politologues peuvent considérer qu’ils connaissent en avance les sentiments des électeurs, ce sentiment peut être désagréable chez les citoyens puisque cela peut revenir à dire qu’une candidature est largement supérieure aux autres, qu’elle s’imposera quoi qu’il arrive. En somme, cela revient à préjuger des décisions des citoyens. Cela donne le sentiment qu’on méconnaît une règle fondamentale, c’est que ce sont les électeurs qui décident, pas les « experts » ou même les sondés. Tout comportement, commentaire ou attitude qui semble indiquer que la partie est gagnée d’avance favorise la démobilisation.

Vous avez également publié les détails de votre étude sur « 2022, présidentielle de crises ». L’un des graphiques traite de la faiblesse de l'affiliation des électeurs à des partis politiques. Le fait qu’une affiliation politique est relativement faible explique-t-il le contexte dans lequel nous sommes ou chaque voix à son importance ? 

Tout à fait. Le discrédit des partis politiques est tout à fait constatable, c’est d’ailleurs un problème car il n’y a pas de démocratie sans partis politiques. C’est la raison pour laquelle le général de Gaulle a voulu introduire l’existence de ces partis dans la Constitution. Ce sont des organisations qui sélectionnent des candidats, fabriquent des programmes et mobilisent des électeurs. La crise des partis que l’espace politique français connaît actuellement provoque une sorte de liquéfaction sur le comportement électoral, à travers l’abstention et la participation. Or c’est aux partis de contribuer à la formation d’une décision électorale grâce aux meetings, aux affiches … Les résultats sont pourtant de plus en plus inattendus car les électeurs sont de moins en moins sollicités. Ce qui va les tenir au contact seront donc les discussions entre amis, entre collègues de travail, les réseaux sociaux … De plus, l’image des partis, comme celle des hommes politiques, est dégradée. Dès lors, comment inciter les électeurs à aller voter ? C’est très compliqué et je pense que nous allons le sentir dimanche prochain. Les partis de gouvernement, à l'exception de la République en Marche, seront éliminés dès le premier tour. Pour beaucoup d’électeurs, cela signifie qu’il est possible de participer à cette élection grâce à l’abstention ou par la contestation. 

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Dans votre étude, vous parlez d'éléments positifs à la politisation négative, sont-ils trop faibles, trop peu importants ? 

Si les éléments que nous avons identifiés comme étant possiblement positifs sont confirmés comme tels, ces effets ne se feront pas ressentir maintenant. Nous sommes dans une phase transitoire. Nous pouvons voir émerger des ressorts qui seraient de nature à atténuer un portrait problématique de la France politique, mais les nouvelles générations prennent la relève et il faudra du temps avant qu'elles commencent à régénérer la vie politique par leurs idées, leurs engagements … On a pu constater un tel engagement lors de cette élection, avec la mobilisation d’un électorat très jeune en faveur d’Eric Zemmour. C’est un phénomène tout à fait nouveau et cela m’a beaucoup frappé. C’est une sorte de retour à la politique, mais il faudra attendre pour voir si cela se perpétue.

Pour retrouver le simulateur de reports de voix de la Fondation pour l'innovation politique dans le cadre de l'élection présidentielle : cliquez ICI 

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