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La retenue "à la source" va rejoindre la cohorte des réformes manquées.
La retenue "à la source" va rejoindre la cohorte des réformes manquées.
©revolution.cityzencar.com

Editorial

La retenue à la source, qui devait simplifier le système de prélèvement de l’impôt et aurait dû être votée avant l’été, devrait figurer maintenant dans le prochain budget établi cet automne pour entrer en vigueur le 1er janvier 2018. Mais les obstacles qui se dressent sur sa route lui donnent très peu de chances de voir le jour.

Michel Garibal

Michel Garibal

Michel Garibal , journaliste, a fait une grande partie de sa carrière à la radio, sur France Inter, et dans la presse écrite, aux Échos et au Figaro Magazine.

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Un nouveau projet de loi suivi d’une nouvelle marche arrière, précédant un abandon. Tel est aujourd’hui le lot de toutes les initiatives gouvernementales. Après la loi travail, progressivement mise en charpie, c’est maintenant le tour de la retenue à la source qui devait simplifier le système de prélèvement de l’impôt et aurait dû être votée avant l’été : elle devrait figurer maintenant dans le prochain budget établi cet automne pour entrer en vigueur le 1er janvier 2018, mais les obstacles qui se dressent sur sa route lui donnent très peu de chances de voir le jour. Une fois de plus le scénario implacable se produit : un nouveau texte sort du chapeau de l’exécutif, dans le cadre des promesses faites par François Hollande lors de sa campagne électorale. Généralement bâclé, parce que conçu dans la précipitation, il débouche sur un projet de loi qui suscite immédiatement une série de critiques et de contestations. Rapidement tout se bloque : les syndicats font des réserves avant que les parlementaires le réduisent en miette. L’Etat fait alors la preuve qu’il est incapable de conduire les réformes, ce qui conduit à la désespérance des citoyens.

Le cas de la retenue à la source en fournit une fois de plus une illustration criante. Car le gouvernement a voulu mettre la charrue avant les bœufs. Sous prétexte que ce système est en vigueur dans la plupart des grands pays industrialisés, le pouvoir s’est mis en tête que son adaptation à la France pourrait se faire assez facilement. Sans réfléchir au fait que depuis des décennies, l’idée d’y recourir à été avancée sans que l’on ait pu accomplir le moindre progrès. Car le système fiscal est d’une telle complexité qu’il empêche tout changement tant que l’on ne remet pas à plat l’ensemble du dispositif. Il faudrait commencer par simplifier les règles qui demeurent totalement illisibles en raison de la multiplicité des niches, des régimes particuliers, des dérogations, des avantages fiscaux liés aux situations personnelles ou familiales, aux mesures en faveur de l’environnement, aux économies d’énergie. L’application brutale de la retenue à la source conduirait bien vite à une nouvelle usine à gaz, faisant au demeurant des chefs d’entreprise de nouveaux collecteurs d’impôt dans un univers où la notion du travail change à grande  vitesse, avec la multiplication des contrats courts, des changements d’activité, qui placeraient les contribuables dans une situation d’instabilité permanente en raison des ajustements incessants auxquels ils devraient procéder.

De plus, pour appâter les contribuables, Bercy avait fait savoir que les salaires de 2017 ne seraient pas imposés, puisqu’on allait rompre avec la tradition de payer l’impôt avec une année de retard, mais  comment ferait-on avec les revenus exceptionnels, ceux qui sont  à cheval sur deux exercices, ou encore les dividendes, certaines primes, etc ? Avec le risque d’être accusé par le Conseil institutionnel de ne pas respecter le principe d’égalité, puisque le changement de régime aboutirait à taxer certains contribuables plus que d’autres.

Au demeurant, les syndicats, tout comme le patronat, sont vent debout contre le nouveau projet dont le texte devrait être rédigé d’ici l’été. Les chefs d’entreprise réclament un report d’un an, en espérant qu’un changement de majorité lors des prochaines élections puisse conduire à un abandon pur et simple… en attendant une vraie réforme en faisant mentir les propos pessimiste de Jacques Attali selon lesquels "les candidats à l’élection présidentielle proposent seulement des baisses d’impôt et la protection de certains intérêts catégoriels". La mosaïque fiscale française a la vie dure.

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