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Philo pour les nuls : la morale à l'école est-elle immorale ?
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Zone franche

L’école peut être le lieu où l’on parle d’honnêteté, de franchise et de fraternité sans déboussoler nos chères têtes blondes (mais au risque de les enquiquiner, évidemment).

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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C’est curieux, mais les critiques les plus radicales de la réintroduction de la morale en primaire viennent généralement des plus enclins à se réclamer des « valeurs républicaines » et de ses « hussards noirs » ― ces curés laïques formés au séminaire de l’école normale…

Que la nostalgie un peu cucul véhiculée par « Les choristes » ne fasse pas rêver tout le monde, c’est légitime. L’instit à moustaches en guidon de vélo et lorgnons inscrivant son « Bien mal acquis ne profite jamais » au tableau noir devant une troupe de poulbots en galoches, ce n’est pas exactement l’image que l’on se fait d’une France à l’aise dans son siècle.

Mais qu’il revienne au maître du CM2, entre une leçon de calcul et une dictée, d’expliquer ce qu’est exactement une « société » n’a rien d’hallucinant. Et encore moins de réactionnaire.

De fait, pour pas mal de gosses, c’est même le seul endroit où ils en entendront parler, de ce qui se fait et de ce qui ne se pas entre citoyens.

On peut d’ailleurs difficilement défendre la gratuité de la cantine pour les plus modestes au prétexte qu’ils y font parfois leur seul repas de la journée et prétendre que ce petit supplément d’âme est déjà, lui, au menu de tous les foyers…  Discuter de tolérance, d’honnêteté, de justice, de fraternité, de courage, de loyauté, de franchise, etc. ― soit les principes énumérés par la circulaire publiée hier par le ministère de l’Éducation nationale ―, on dira qu’au grand minimum, ça ne peut pas faire de mal.

Piquer une bagnole ? C'est mal. Aider la vieille dame à traverser ? C'est bien.

Une seconde critique à l’égard de cette initiative, c’est le recours à des notions « délicates », comme le bien et le mal, le vrai et le faux. Tellement délicates, en fait, que certains en feraient presque des notions « relatives ». Qu’on se rassure : le cours de morale en question ne sera pas un cours de philo pour grands débutants, explorant le refus nietzschéen d'une morale conduisant à la servilité (si on va par là, la morale chatélienne serait plutôt kantienne et resterait sur le terrain du « devoir impératif »).

Non, bien et mal au CM2 feront surtout appel à la vision assez standard selon laquelle piquer une bagnole c’est mal, mais aider une vieille dame à porter son cabas c’est bien. De quoi gonfler les kids, certes, mais pas de les entraîner sur le chemin d'un ordre réminiscent des « heures les plus sombres de notre histoire » (puisqu’on sait désormais que l’histoire de France ne compte que deux périodes : Vichy et ce présent qui lui ressemble tant).

Ah, il y a aussi l’idée que ce gouvernement de malfaisants n’est pas le mieux placé pour faire la leçon aux petits nenfants, avec toutes les casseroles qu'il trimbale et font du bruit lorsqu’il se promène dans les rues. Possible, mais on se demande lequel  de nos leaders aurait été légitime dans le rôle du père la morale idéal : celui qui fait vraiment ce qu’il dit, dit vraiment ce qu’il fait et n’est jamais mis en examen pour quoi que soit...

Mendès, peut-être, mais il n'a duré que trois semaines et ça lui a suffit pour devenir une légende. Et de toute manière, à son époque, il y avait la morale à l’école et personne ne s’en formalisait…

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