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Pendant que les politiques et les médecins diffusent la peur, les marchés financiers achètent la sortie de crise et anticipent même une reprise euphorique
©Johannes EISELE / AFP

Atlantico Business

Il existe un vrai clivage entre les responsables politiques qui diffusent la peur pour justifier un nouveau confinement, et les investisseurs qui ne nient pas pour autant la gravité de l’épidémie et les risques, mais préfèrent jouer la sortie et la reprise pour la fin de l’année.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

Il est aussi l'auteur du blog http://www.jeanmarc-sylvestre.com/.

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Il faut le reconnaître, l’ensemble de la communication au niveau de l’exécutif est tellement incertaine, hésitante et contradictoire qu’elle n’arrive qu’à diffuser de la peur et du stress. Le président de la République n’annoncera sans doute pas le durcissement du confinement pour cette semaine, alors que certains de ses ministres, le Premier d’entre eux Jean Castex et le ministre de la Santé Olivier Véran, plaident pour un nouveau confinement. Les médecins, de leur côté, inondent les plateaux de télévision et les sites internet de leur courbe ascendante du variant anglais. Depuis le dernier week-end, la presse relaie les informations catastrophes et décrit les scénarios, plus anxiogènes les uns que les autres. Que ce soit le projet de fermer les frontières une nouvelle fois, l’hypothèse sérieuse d’un encombrement probable dans les hôpitaux ou celle de ruptures d’approvisionnement en vaccins.

La France est en train de sombrer dans un climat dominé par la peur et la conviction qu’il faudra vivre avec ce virus encore longtemps, compte tenu de l’arrivée des variants à priori encore plus dangereux.

Emmanuel Macron va donc prendre la parole, sans doute vers la fin de la semaine ou alors au tout début de la semaine prochaine, pour annoncer ce que tout le monde sait déjà, puisqu’on l’a appris jour après jour par les experts du conseil scientifique et par les ministres.

Cette communication de la peur est parfaitement rodée depuis plus d’un an. On lâche les experts infectiologues et soignants dans la jungle médiatique et ils parlent. Alors, une moitié des médecins se déclare favorable à un durcissement des dispositifs de confinement. L’autre moitié s'y oppose en expliquant que ça va couter très cher à l’économie, mais comme ces derniers n’ont pas de solutions alternatives, le président finira pas se ranger à l’avis de ceux qui veulent confiner. Il attendra un peu mais on n’y échappera pas.

Le prochain discours du président de la République, comme les précisions de Jean Castex, sont donc connus d’avance.

L’évolution de l‘épidémie, avec l’arrivée galopante des variants, va nous obliger à resserrer à nouveau le couvre-feu etc… Pour une période relativement courte, ce qui nous permettra ensuite de voir le bout du tunnel.

Les Français, résignés, accepteront en grognant les mesures de protection. Sauf que sans une vaccination générale, rapide et efficace, après cette 3e vague, il faudra sans doute se préparer à gérer la 4e vague et pourquoi pas la 5e vague. On voudrait organiser une asphyxie générale du moral des Français qu’on ne s’y prendrait pas autrement.

Le comble dans cette situation, c’est qu’à côté de cette France qui s’enfonce dans la résignation, nous avons une France qui continue de travailler, des investisseurs qui font des plans de redressement et des marchés qui ne mollissent pas. Mieux, beaucoup d’acteurs sont convaincus qu’on sortira de la crise et qu‘il faut d’ores et déjà s’y préparer. Certes, il y a quelques rêveurs, quelques philosophes utopistes. Mais comme dit André Comte Sponville, « la crise pourrait nous rendre intelligent et l’optimisme n’a rien d’une maladie mortelle ». En tous les cas, l’optimisme responsable nourrit la résilience.

Les raisons qui devraient nous permettre d’écouter les prophéties plus optimistes que celles de certains experts médicaux sont très simples et cash.

1er point, les vaccins existent et s’il y a un peu de retard à la vaccination dans certains pays (la France par exemple), il y a tellement d’avance dans la mise au point de ces vaccins que c’est une bénédiction. On ne peut pas se plaindre de ces retards. Personne dans le monde aurait parié un euro sur la rapidité de mise au point de ces vaccins. Donc, les campagnes de vaccination de masse vont marcher parce que dans les jours qui viennent, on finira par retirer au ministère de la Santé la charge d’assurer l’organisation pour la confier à des professionnels de la logistique et de la distribution. Des vrais. Comme pour les masques et les tests, les acheteurs (sourceurs) des grands hypermarchés, les transporteurs feront le travail. On ira même plus loin, on finira par acheter les licences de vaccin pour les fabriquer en France dans des usines qui existent. C’est ce que Sanofi va commencer à faire dans ses usines françaises.

La moitié des Européens seront donc vaccinés l’été prochain et si la moitié sont protégés, on pourra commencer à espérer l’immunité collective et la reprise de la vie normale.

La France a été incapable de mettre en place une stratégie efficace de testing, tracage et isolement des cas positifs ou des cas contact, ce qui aurait été un moyen de protéger l’activité. On peut espérer qu’avec les progrès de la vaccination et la mise en place d’un passeport vaccinal, la France acceptera de desserrer la règlementation pour tous ceux qui seront protégés ou par le vaccin ou par l’immunité naturelle acquise par tous ceux qui ont été contaminés.

2e point : Il y a de l’argent à mettre dans les machines. Comme au lendemain de la guerre, on va voir sortir des masses d’épargne qui vont servir à calmer les frustrations de la consommation et financer les investissements de production. Il faut reprendre ses manuels d’histoire et retrouver ce qui s’était passé au lendemain de la première guerre dans les années folles et à la Libération, après la deuxième guerre mondiale, au début de ce qui est devenu les Trente glorieuses. Trente années de prospérité galopante.

3e point : ce réveil des activités va donc faire régner un formidable climat d’euphorie encore plus exubérant, parce que, par rapport aux deux dernières guerres, la crise de la Covid n’a pas détruit des actifs matériels de production ou de mobilité. Elle n’a surtout pas détruit des forces vives par millions comme en 1914 ou en 1940. Ensuite, tout comme lors des sorties de crises mondiales précédentes, nous allons bénéficier de mutations qui vont révolutionner les systèmes de production et de création de richesse : la révolution numérique, la transition écologique et la mondialisation vont servir de moteurs incroyablement puissants.

Ces mécanismes de reprise sont partagés par une majorité des investisseurs financiers, et pas seulement ceux qui travaillent dans la galaxie des Gafam, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle les marchés financiers ne s’effondrent pas.

Les spécialistes de la dette du côté de la BCE s’agitent pour trouver des solutions afin d’éviter qu’une crise de l’endettement ne viennent troubler le mécanisme de relance. Ils trouveront.

La vraie question aujourd’hui qui se pose serait de savoir pourquoi aucun homme politique n‘est capable de justifier sa demande d’effort par la présentation d’un scénario de reprise. Peut-être parce qu’il n’en connaît pas la date. Mais peut-être aussi parce qu’aucun n’a le courage de fixer un agenda.

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