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Coptes condamnés à la décapitation par l'Etat islamique en Libye.
Coptes condamnés à la décapitation par l'Etat islamique en Libye.
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Blackout

Nous vivons sous la dictature émotionnelle et instantanée de l’image. Mais pourquoi certaines photos ne sont-elles jamais montrées ?

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Le corps noyé d’un petit garçon, Aylan, a ému la terre entière et transformé le drame des migrants en une tragédie planétaire. Tous les gouvernants, qu’on n'entendait pas auparavant sur une question pourtant bien connue d’eux, y sont allés de leurs larmes et ont mis la main à la poche. “Je prends tant de migrants”. “Et moi tant”. "Et moi aussi mais un peu moins”.

Il y a, et c’est ainsi depuis longtemps, des photos qui font sens dans l’Histoire. Le petit gamin juif du ghetto de Varsovie. La fillette vietnamienne brûlée au napalm, une image qui poussa l’Amérique à se désengager de la guerre du Vietnam. Le petit Mohamed Al Dura mourant dans les bras de son père lors d’un échange de tirs entre Israéliens et Palestiniens : un cliché qui marqua au fer rouge l’état hébreu même s’il s’agissait d’une balle perdue identifiée sans preuve par France 2 comme étant israélienne.

On ne jouera pas ici les pleureuses passéistes. Les spectateurs qui voient et comprennent le monde à travers les réseaux sociaux et les télés veulent des images et des vidéos. Les mots pour eux ne sont d’aucun poids, comparés au choc des photos. Comment ne pas leur en donner ? Comment refuser la loi, même si c’est la pire, du plus grand nombre ?

Mais, il y a des photos qu’on ne verra pas, qu’on ne verra jamais. Certaines parce qu’elles sont abominables. D’autres par respect pour les victimes et leurs familles (vous remarquerez à ces propos que la photo du petit Aylan n’a posé aucun problème à son père). Mais beaucoup d’autres pour des raisons inavouables et donc inavouées.

Un site helvétique à connotation anti-islamique affirmée est poursuivi par la justice française pour avoir publié la photo de la tête coupée d’Hervé Comara décapité par un djihadiste de chez nous. Les motivations de ce site n’ont rien à voir avec celles des assassins de Daesh qui inondent la toile avec des images de décapitations et d’égorgements susceptibles, à leur yeux, de susciter des vocations combattantes.

Le site suisse entendait avec cette image, montrer l’horreur dont étaient capables ceux qui nous promettent, à nous autres mécréants et infidèles, la mort. Une photo morbide à coup sûr. Mais fallait-il poursuivre pour autant ? Et est-on bien sûr que la justice française, en l'occurrence le parquet soumis aux consignes de la Garde des sceaux, ait été animé d’intentions aussi pures que le “respect de l’intégrité d’un cadavre” ou “le respect de la douleur d’une famille” ?

Il y a des choses que l’on ne veut pas montrer, parce qu’on refuse de les voir. Il y a des choses qui doivent rester cachées, pas parce qu’elles sont insupportables pour notre regard, mais parce qu’elles mettent en cause la religion au nom de laquelle des horreurs sont commises. Hypocrisie que tout cela. On montre des otages à genoux suppliant sous la contrainte leur gouvernement d’accepter les exigences des fanatiques islamistes. On ne montre pas leurs corps décapités. Hypocrisie que de se dissimuler derrière des propos convenus sur la pudeur, la décence et la volonté de ne pas tomber dans le macabre.

Le sujet certes n’est pas simple. Il n’est pas évident de publier l’image d’une tête coupée, sinon cela aurait été fait ici même. Mais, il faut en pesant bien les choix ne pas dissimuler le visage barbare de l’adversaire. Pas pour faire peur. Pour réveiller les consciences. Pour inciter au combat, puisque celui qu’on nous livre est sans pitié. Pour que justice et vengeance soient faites.

En 1945, le célèbre magazine américain “Life”, fit une couverture restée dans les annales. C’était quelques mois avant la capitulation du Japon. On y voyait un pilote américain prisonnier et agenouillé. Derrière lui, un soldat nippon brandissant un énorme sabre de samouraï, s'apprêtait à lui trancher la tête. Et ce titre : “nous n’oublierons jamais”. Les Etats-Unis étaient alors en guerre contre le Japon. Et nous, nous ne sommes pas en guerre ?

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