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Des soldats ukrainiens marchent parmi les carcasses de blindés russes, le 2 avril 2022.
Des soldats ukrainiens marchent parmi les carcasses de blindés russes, le 2 avril 2022.
©Genya SAVILOV / AFP

Sainte (et pauvre) Russie

Et c’est l’âme damnée de Poutine qui le dit.*

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Alexandre Douguine est proche du chef du Kremlin. Il le voit, lui parle et l’inspire. C’est un fou de Dieu, un fou de l’orthodoxie et de la sainte Russie où, selon lui, le Christ a élu domicile après avoir abandonné Rome la perverse.

Pour lui, la démocratie est une « idiotie » contraire à toutes les traditions russes. Pour lui encore, les émanations de ce qu’il considère comme une putréfaction sont Bernard-Henri Lévy, George Soros, évidemment l’Ukraine qu’il convient de purifier de sa souillure occidentale. C’est ce que son ami Poutine appelle « dénazification ».

Douguine, quoi qu’on puisse penser de ses propos hallucinés (« la démocratie c’est l’antéchrist », dit-il), n’est pas fou. Juste un imprécateur comme la Russie en connait depuis toujours. Et il faut bien sûr connaitre l’histoire russe pour savoir d’où il vient.

Depuis des siècles, la Russie autocratique a été traversée par deux courants : les panslavistes et les occidentalistes. Ces derniers regardaient vers l’Ouest en quête de modernité.

Le tsar Pierre le Grand qui voulait réformer la Russie fit bâtir une ville à laquelle il donna le nom (allemand et pas russe) de Saint-Pétersbourg. Il fit couper les barbes des boyards. Les vieux croyants protestèrent : des têtes roulèrent sur le billot. La tsarine Catherine II accorda l’hospitalité à Voltaire. Une présence qui révolta les traditionnalistes russes.

Tout au long du XIXe siècle, les occidentalistes furent pourchassés car on les soupçonnait de porter atteinte au pouvoir absolu de l’autocrate qui régnait sur toute les Russies. Dostoïevski, le grand Dostoïevski, le fit avec un talent que n’a pas Douguine.

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De l’Occident, la Russie importait tout : le télégraphe, le train, les voitures, l’électricité, le téléphone, puis les avions. Tout sauf la démocratie car celle-ci pouvait corrompre l’âme simple et pure des moujiks qui devaient rester prosternés devant dieu et le tsar.

Un des modèles de Douguine et de tous les nationalistes russes fut le baron von Ungern-Sternberg. Il fut le dernier chef blanc à résister aux bolchéviques après la révolution de 1917. En Sibérie, il leva une armée de Mongols, de Bouriates, de Kalmouks et de Tibétains. Fait prisonnier par les rouges, il fut fusillé.

Dans les textes qu’il a laissés, on trouve des pages où résonne l’appel du sang. La démocratie, les gratte-ciels américains, l’argent, le capitalisme doivent être éliminés comme des fruits pourris. Et pour régénérer ce monde qu’il haïssait, le sanglant baron comptait sur les sabres des cavaliers asiates. Ungern-Sternberg était eurasiste. Douguine proclame qu’il l’est également. Il a de qui tenir. Nicolas II avait Raspoutine comme âme damnée. Le Raspoutine de Poutine s’appelle Alexandre Douguine.

*Nous empruntons quelques-unes de ces citations à nos amis de Causeur.

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