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Mondial de football : comment ça, on ne peut pas manifester contre le gouvernement avec un ballon ?
©LUCAS BARIOULET / AFP

Vent de révolte sur la toile

La dernière tendance la mode, sur les réseaux sociaux, est de cracher verbalement, non pas sur le football, sport que chacun est en droit de ne pas aimer, mais simplement sur « les gens » qui s’y intéressent, accusés des pires des maux : le laisser-faire.

Guillaume Bailly

Guillaume Bailly

Rédacteur sur un site Internet, spécialiste du funèraire, blogueur, et écrivain en quête d'un éditeur.

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La dernière tendance la mode, sur les réseaux sociaux, est de cracher verbalement, non pas sur le football, sport que chacun est en droit de ne pas aimer, mais simplement sur « les gens » qui s’y intéressent, accusés des pires des maux : le laisser-faire. 

Ne vous y trompez pas : je n’aime ni le football, ni le président Macron. Ceci dit à l’attention de ceux qui pensent que, si l’on n’est pas dans la rue à manifester contre lui, c’est qu’on est dans son camp. Que nenni, de Jupiter ici, point de dithyrambe. 
Scrutons les murs de Facebook et les gazouillis de Twitter : c’est un vrai déferlement de messages hostiles au mondial de football, parce que, pendant ce temps là, tout augmente et le président Macron fait passer des mesures « antisociales ». Ne jetons point la pierre sur le camarade militant, quand c’est antisocial, il perd son sang-froid. 
Qu’est-il reproché aux français qui aiment le football ? De ne pas être dans la rue à manifester contre la politique du gouvernement. C’est fort commode, mais il ne me semble point, avant le coup d’envoi du Mondial, avoir vu plus de manifestants hostiles. « Ils attendaient le Mondial » rétorquera-t-on aussitôt. Si tôt ? Ces footeux sont encore pire que les supermarchés qui distribuent les catalogues de rentrée scolaire fin juin. Ce n’est bien entendu pas crédible une seconde. 
Il y a plusieurs points dans cette colère qui la rendent illégitime. Le premier étant : les gens (nous utiliseront ce vocable par commodité, « les gens », parce que c’est celui qui semble faire consensus) ont bien le droit de se détendre, non ? Et si ils aiment le football et y voient un prétexte pour se retrouver et faire la fête (ou se consoler) entre amis, où est le problème, exactement ? Qu’ils ne se consacrent pas à la politique, pendant ce temps ? C’est insultant, condescendant et un tantinet dictatorial. 
Insultant, parce que cela sous-entend que les gens n’ont pas les capacités intellectuelles pour se consacrer à plusieurs choses à la fois. Si ils célèbrent la fête du football, alors leur cerveau n’est pas capable d’assimiler que, dans leur pays et le monde, il se passe d’autres choses, selon vous. Un rapide tour des réseaux sociaux, voire une simple conversation réelle dans la rue avec un gens (ah, au singulier, ça ne fonctionne pas, il semble que les gens ne valent qu’au pluriel. On ne devrait pas dire plutôt « la masse » ou « le troupeau », pour mieux cerner votre pensée?) pour se rendre compte qu’il n’est pas totalement monomaniaque. Vous êtes finalement injuste, vous qui consacrez la totalité de vos pensées à la lutte sociale. 
Condescendant, et un tantinet dictatorial, puisque vous semblez estimer que vos slogans sont tellement universels que tous devraient se ranger derrière et que vos modes d’action soient les seuls qui vaillent. 
Mais il faut vous faire à l’idée que les gens sont divers. Certains sont favorables à la politique du président Macron, d’accord, ils sont de moins en moins nombreux chaque jour, mais quand même, il en reste encore beaucoup. Et d’autres y sont opposés, mais ne soutiennent pas plus l’alternative que vous leur proposez. 
Parce que, soyons clairs : ce qui vous agace le plus, ce n’est pas le fait que les gens s’intéressent, un mois tous les quatre ans, au football. Ce n’est qu’un prétexte, parce que votre véritable exaspération, c’est que les gens ne se rangent pas tous derrière les bannières de l’ultra-gauche, la CGT et Mélenchon. Là est le fond du problème, selon vous. 
Or, la majorité des gens, même s’ils n’aiment pas le président Macron, n’ont pas envie, pour cette raison, de légitimer Mélenchon (ou Poutou, ou inscrivez ici le nom de votre leader anticapitaliste préféré). Ils n’ont pas envie de manifester et ainsi grossir les rangs de l’extrême gauche, n’ont pas envie de se mêler à ces défilés qui condamnent les black blocs tout en les laissant agir, ou bien ne croient tout simplement pas que ce type d’action soit efficace. 
Peut-être qu’il y a des gens qui aiment regarder le football après une dure journée de labeur, et qui croient aussi en lé démocratie, planifiant à la prochaine occasion de déposer un bulletin dans l’urne pour faire savoir au gouvernement qu’ils ne sont pas d’accord et ne veulent plus de lui. Ils n’ont pas tort, au fond : le président actuel est à sa place grâce à des petits bulletins déposés dans une urne, pas des slogans braillés dans la rue. 
Aussi, vilipender les gens qui regardent le Mondial de football ne leur causera pas un électrochoc. Ils ont leurs convictions, elles sont respectables, et si elles ne sont pas conformes à ce que vous attendez, ce n’est pas qu’un ballon rond les empêche de penser et d’adopter votre point de vue, c’est juste qu’ils n’aiment pas ce point de vue. Pardon d’en rajouter à votre peine, vous qui semblez en avoir déjà beaucoup. 
Et puis… Et puis tout ces français qui soudain se reconnaissent dans la même communauté, qui se rangent derrière ces joueurs qui arborent le drapeau sur leur maillot et chantent la Marseillaise avant de jouer, avouez, ça ne vous plaît pas, non ? 
Rassurez-vous, c’est fini. Enfin, cette obsession du ballon rond prend fin, et, enfin, on verra si les gens se rangent en masse derrière vos bannières. Dans le cas inverse, j’ai hâte de voir les bous-émissaires que vous désignerez, cette fois. 

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