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La compétitivité de l'économie française en perdition
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Menaces sur le triple A

Le président de l'Autorité des marchés financiers Jean-Pierre Jouyet, déclarait encore récemment que le maintien du triple A français "tiendrait du miracle". Mais ça n'est pas forcément la situation de la dette qui explique les menaces qui pèsent sur la notation tricolore.

Christian Saint-Etienne

Christian Saint-Etienne

Christian Saint-Etienne est professeur titulaire de la Chaire d'économie industrielle au Conservatoire National des Arts et Métiers.

Il a également été membre du Conseil d'Analyse économique de 2004 à juin 2012.

Il est également l'auteur de La fin de l'euro (François Bourin Editeur, mars 2011).

 

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La perte du triple A de la France sanctionne une double crise : une crise de gouvernance européenne et une crise de compétitivité française.

Si l'on prend le déficit de l'ensemble de la zone euro en 2011, il n'est que de 4% du PIB de la zone contre 9% au Royaume-uni et 10% du PIB aux États-Unis. De plus, la balance courante des paiements de la zone est à l'équilibre alors que le déficit courant atteint 3% du PIB aux États-Unis et au Royaume-Uni. La crise européenne n'est pas une crise économique mais une crise de gouvernance. L'euro a été mis en place sans les trois éléments nécessaires à son succès : un gouvernement économique, un budget fédéral pour redistribuer la prospérité et faire face aux crises imprévues, une meilleure coordination en matière fiscale et sociale. Le sommet du 9 décembre 2011 a instauré une "règle d'or" pour les États membres de la zone, comme c'est le cas pour 49 des 50 États américains. Mais les États-Unis disposent d'un budget fédéral pour faire face aux crises et instaurer une dynamique de développement pour l'ensemble du pays. Sans un accord sur les trois conditions de la pérennité de l'euro, la crise européenne va perdurer et nous coûter très cher en termes de croissance.

Mais la perte du triple A sanctionne également la crise de la compétitivité française. La France a perdu 40% de ses parts de marché à l'export entre 1998 et 2011. Elle a laissé dériver ses finances publiques depuis 1992 au point que sa dépense publique est supérieure de 8% du PIB à la moyenne de la zone euro hors France. Le déficit anticipé à 5% du PIB en 2012 est trop lourd d'au moins deux points de PIB.

La dégradation de la note française est le fruit amer de ces deux dérives. A ce point du diagnostic, de deux choses l'une :

  • soit la France est dégradée comme les autres États de la zone euro ayant encore un triple A, et ce sera une crise de la zone euro,
  • soit elle dégradée plus que les autres États qui perdraient leur triple A et ce sera une gifle pointant nos dérives internes.

La dégradation de notre rating va être coûteuse si elle ne conduit pas à une forte correction des dérives de nos finances publiques et de nos coûts de production. Dans l’immédiat, elle se traduira par une dégradation de toutes les signatures opérant à partir de la France. L’Etat devrait payer des taux d’intérêt plus élevés pour ses emprunts, mais cette hausse des taux se répercutera également sur nos entreprises et sur les ménages. A court terme, la hausse devrait être modeste. Si nous montrons notre détermination à enrayer les dérives, on pourrait même assister à une petite baisse des taux, mais qui peut croire à l’expression de la détermination nécessaire ?

La dégradation de la note de la France entraînera également celle du Fonds européen de stabilité financière et compliquera la gestion de la crise européenne. Elle permettra peut-être à quelques fonds vautours d’enregistrer quelques gains en spéculant sur la dette française, mais il apparaît de façon aveuglante que cette dégradation, qui met l’accent sur les faiblesses de l’économie française et sur la crise de gouvernance européenne, fera essentiellement des perdants en France et en Europe. Et il est difficile de penser que le reste du monde peut être gagnant à une aggravation de la crise européenne. 

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