Lutte contre la pauvreté : quand les entreprises se mobilisent, ça peut marcher<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Lutte contre la pauvreté : quand les entreprises se mobilisent, ça peut marcher
©IAN LANGSDON / POOL / AFP

Plan de lutte

"Le Président de la République doit proposer en septembre un plan de lutte contre la pauvreté. La France a l’occasion de montrer l’exemple d’une économie plus responsable et de proposer un nouveau dispositif de mobilisation des entreprises contre la pauvreté : la Dotation d’Action Territoriale".

Denis Metzger

Denis Metzger

Deniz Metzger est Président de Break Poverty Foundation, un fonds de dotation dont le siège est basé à Paris. Créé par Denis Metzger, Président d’un des principaux fonds d’investissement européens, Chequers Capital, et Président d’Honneur d’Action contre la Faim. 

 

 

Voir la bio »

Les clignotants sont au rouge. Alors que le niveau de pauvreté avait baissé de manière continue au lendemain de la seconde guerre mondiale et ce jusqu’au début des années 2000, la tendance s'est inversée. Le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté en France a augmenté de près d’un million au cours des 10 dernières années (2005-2015). C’est un renversement historique.

Quelques chiffres pour rappeler le caractère insoutenable de cette situation : selon l’INSEE, la France compte 8,9 millions de pauvres et 26% des ménages dont la personne de référence a moins de trente ans sont pauvres. 3,8 millions de personnes sont sans toit ou vivent dans des conditions indignes. 21% des moins de 25 ans sont au chômage. Les bidonvilles sont réapparus dans notre pays et 36% des occupants de ces habitats de fortune sont des mineurs.

Partout en France les acteurs du social innovent et inventent de nouvelles approches pour répondre à l’ampleur des défis. Mais faute de moyens, leurs actions restent d’une portée limitée. Toute une nouvelle génération pleine d’énergie et de désir d’entreprendre souhaite contribuer plus activement au bien-être social et à la réduction des inégalités. Le moment est venu de créer les conditions d’un changement et de réinventer notre modèle social.

Pour un nouvel engagement des entreprises  

Le Président de la République doit proposer en septembre un plan de lutte contre la pauvreté. La France a l’occasion de montrer l’exemple d’une économie plus responsable et de proposer un nouveau dispositif de mobilisation des entreprises contre la pauvreté : la Dotation d’Action Territoriale.

Cette Dotation d’Action Territoriale prendrait la forme d’une allocation volontaire pouvant aller jusqu’à 2% du résultat net de l’entreprise, affectée à des programmes de lutte contre la pauvreté et contre l’exclusion des jeunes, sur le territoire même de l’entreprise.

2%, parce qu’une telle proportion permettrait de financer des actions concrètes dans l’environnement de l’entreprise, et donnerait tout son sens à l’impératif de responsabilité sociale.

Volontaire, car il n’y aurait pas d’obligation. Il sera simplement demandé à l’entreprise de communiquer chaque année sur les dépenses qu’elle a réalisées dans le cadre de cette Dotation et les résultats visés localement. Si elle choisit de ne pas verser cette Dotation, elle devra simplement l’indiquer.

Les entreprises les plus fragiles et les plus petites ne seront pas tenues de s’engager dans le dispositif. 

La particularité de cette dotation est que l’entreprise déciderait elle-même de son allocation sur des projets de son choix, sur son territoire, à destination des plus vulnérables, notamment les jeunes : aide alimentaire, soutien médical, amélioration des conditions d’hébergement, accès aux éléments fondamentaux d'éducation indispensables à l’insertion sociale, accompagnement individuel, retour à l’emploi, soutien aux personnes handicapées, insertion par le sport ou la culture.
Cette dotation bénéficierait des avantages fiscaux prévus par la loi Aillagon, qui permet aux entreprises de profiter d’une réduction d’impôt de 60% du montant de leur don. Le coût pour l’entreprise serait donc seulement de 0,8% de leur résultat net.
Break Poverty Foundation, à l’initiative de ce concept de Dotation d’Action Territoriale, a testé le dispositif sur un territoire, la ville de Romans sur Isère, où les statistiques de la pauvreté (22% de la population, 30% sur les moins de 30 ans) sont près de deux fois supérieures à la moyenne nationale. Avec le soutien du Maire, les principales entreprises de ce territoire ont été mobilisées. Les résultats de ce projet pilote parlent d’eux-mêmes. Sur les 21 entreprises contactées, 15 ont annoncé qu’elles soutiendraient un ou plusieurs programmes parmi ceux qui leur ont été proposés. Et quelques semaines après le lancement de ce projet pilote, près de 200 000€ ont déjà été collectés pour financer ces programmes à Romans, une ville de 33000 habitants. Sur 3 ans, avec le concours de la Mairie, c’est un million d’euros qui pourrait être levé pour offrir une chance à plus de 1 000 jeunes parmi les plus vulnérables. On imagine alors aisément l’impact que pourrait avoir une telle initiative si elle était menée à l’échelle nationale.
Ce nouvel engagement social de l’entreprise correspond à une attente croissante des ‘millénials’, cette génération de jeunes diplômés et de jeunes entrepreneurs animés d’un même désir de changement et souhaitant rejoindre une entreprise dont le projet ne se résume pas à la seule création de richesses économiques.
Loin d’être une charge pour les entreprises, la Dotation d’Action Territoriale doit être perçue comme un investissement dans l’avenir de leur territoire.
Nulle entreprise ne gagne dans un monde qui perd. Face à la paupérisation croissante de la société française, de ses jeunes et de ses banlieues, la Dotation d’Action Territoriale permettra de mobiliser les entreprises et de favoriser de nouvelles alliances locales pour éradiquer la pauvreté. 

Le sujet vous intéresse ?

À Lire Aussi

Les entreprises seront elles les nouveaux gouvernements ? La volonté de pousser l’investissement sociétal des entreprises démontre t-elle la fin du politique ?Crise du capitalisme : retour sur le déclin préoccupant des petites entreprises américaines depuis les années 1980 Nicolas Bouzou : “Nos entreprises entrent dans l’ère du capitalisme cognitif avec le management du 20ème siècle. Elles risquent de le payer cher”

Mots-Clés

Thématiques

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !