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Libye : mais où sont donc 
les avions arabes ?
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L’aviation de Kadhafi pilonne les insurgés à bout de souffle. Les pays occidentaux hésitent à intervenir : mais est-ce bien à eux de le faire ? Les États arabes tergiversent : mais pourquoi n’interviennent-ils pas ?

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Dans le ciel de Libye on entend le bruit des avions. Ils bombardent, tuent, et sèment la terreur. Il est vrai que les avions, tous les avions, sont faits pour ça, pour bombarder et pour tuer. Mais au dessus du sol libyen, le seul bruit qu’on entend est celui des avions de Kadhafi. Ils font leur métier et la mort est leur métier.

Pas d’autres avions pour les abattre ou les clouer au sol. Le conseil de sécurité de l’Onu se perd en palabres. La communauté européenne discute, l’Otan réflechit et Sarkozy menace. Et puis ? Et puis rien, ou si peu de choses. Certains s’en indignent, amoureusement séduits par le souffle chaud des révolutions arabes. Que fait la France ? Que fait Obama ? Que fait l’Otan ?

"Le fardeau de l'homme blanc"

Pourtant les hésitations occidentales sont parfaitement compréhensibles, légitimes et en tout cas excusables. En effet, pourquoi les avions supposés mater Kadhafi devraient-ils prioritairement porter les couleurs américaines, anglaises, ou françaises ? Sauf, bien sûr, à considérer comme Rudyard Kipling, chantre inspiré du colonialisme européen, que c’est « le fardeau de l’homme blanc », son devoir impérial donc, que de porter la bonne parole et le feu des armes dans de lointaines contrées à civiliser…

Partirions nous seuls pour la Libye, sans un petit panachage d’avions égyptiens, saoudiens, politiquement corrects, qu’aussitôt une partie et agitée et agissante des peuples arables s’insurgerait contre la croisade de l’Occident.

D’autres, moins nombreux, fous d’Allah et du Jihad, promettraient de terribles vengeances pour laver l’affront fait à la terre musulmane par des avions « chrétiens », car comme chacun sait, Benoit XVI dispose d’une redoutable flotte aérienne qu’il peut faire décoller à tout moment de la place Saint Pierre de Rome…

Que fait l'Arabie Saoudite ?

Il y a pourtant d’autres avions que les nôtres. Des centaines, des milliers. A quelques minutes de vol de la tragédie libyenne. Les avions des pays de la Ligue Arabe. A elle seule, l'Égypte, pays frontalier de la Libye aligne 567 appareils de combat et des centaines d’hélicoptères. La Tunisie voisine dispose d’une armée de l’air efficace. Quant à l’Arabie Saoudite, elle est tout simplement dotée de la plus puissante armée du monde arabe. Pour ne citer que ces trois là…

Pourquoi ces avions n’ont-ils pas décollé ? Pourquoi ne décollent-ils pas ? Pourquoi n’y a t-il pas dans les rues du Caire, de Damas, d’Aman ou de Tunis des centaines de milliers de manifestants criant leur solidarité avec le peuple frère de Libye.

Élargissons le débat. Pourquoi est-ce la Communauté Européenne qui est le principal contributeur financier de l’enclave souffrante de Gaza, et non pas l’Arabie Saoudite, suintante de pétrodollars, ou Bahrein, qui à coup de milliards s’est acheté Zidane et l’organisation de la Coupe du monde de football ?

Où se cache l'unité arabe ?

Pourquoi les musulmans de Bosnie et du Kosovo, sauvés les uns par des livraisons d’armes, les autres par des raids des avions occidentaux vivent-ils sous perfusion européenne et non pas arabe ? Oui, pourquoi les avions arabes ne se sont-ils pas rendus maîtres du ciel libyen, alors que contrairement aux appareils occidentaux, ils n’avaient, eux, nul besoin d’un cache-sexe diplomatique ou d’une bénédiction onusienne ? Oui, pourquoi n’agissent-ils pas ?

Manifestement, il leur est plus facile d’organiser la colère des foules contre les caricatures de Mahomet. Ça ne mange pas de pain et c’est bon pour l’unité nationale et l’unité arabe. Ça n’a pas été tellement bon pour les milliers de cadavres qui pourrissent sur le sable libyen. Dans les westerns classiques et anciens, il y avait toujours une scène indispensable dans un saloon.  Ça dégainait, ça tirait de toutes parts… Mais le pianiste, les doigts rivés sur ses touches, continuait à jouer. Sur un mur au dessus de lui, l’écriteau bien connu « ne tirez pas sur le pianiste, il fait ce qu’il peut ! ».

Les gouvernements arabes sont des virtuoses du piano.

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