Libération, c’est comme la gauche : ça meurt...<!-- --> | Atlantico.fr
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Les actionnaires du journal veulent le transformer en réseau social
Les actionnaires du journal veulent le transformer en réseau social
©Reuters

De profundis

Le glas a sonné pour ce quotidien emblématique. Ses actionnaires veulent faire du journal un "réseau social". Et de ses locaux, un lieu de vie.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Nul ne peut se réjouir de la mort d’un journal. La presse est là pour donner à voir, à lire et à réfléchir. Et cela quelles que soient ses orientations politiques et idéologiques. Tout un chacun est libre d'acheter, ou de ne pas acheter, tel ou tel journal, tout comme on est libre de voter, ou de ne pas voter, pour tel ou tel parti.

Depuis sa création dans les années 60, Libération fut un fidèle compagnon de la gauche. Un compagnon heureusement indocile et rebelle qui préférait le poil à gratter aux câlins amoureux. Ainsi furent-ils liés – pacsés, dirait-on aujourd’hui – pour le meilleur et pour le pire. Et quand le rose de la gauche devenait trop pâle à ses yeux, Libération voyait rouge aux sens propre et figuré. Le journal fut de tous les combats de la gauche, y compris les plus absurdes. Violemment anti-giscardien, il trouva quelques qualités à VGE quand sa ministre, Simone Veil, fit adopter la loi sur l’avortement. Le journal, pourtant pas très chaud à l’égard de Mitterrand, et lorgnant parfois vers son adversaire Michel Rocard, pleura de joie en mai 1981 quand, pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, un président de gauche accéda à la magistrature suprême.

Libération – gauchisme oblige – fut frénétiquement anti-israélien et aima d’amour la Palestine.Libération accompagna avec passion et talent le combat de Solidarité en Pologne. Libération, héritier d’une tradition d’extrême gauche et donc anticommuniste, ou antistalinienne, versa des larmes de bonheur quand la révolution de velours tchèque libéra Prague et quand Ceausescu fut renversé en Roumanie.

Le journal, après avoir beaucoup aimé Mao, aima (un peu moins quand même) les Khmers rouges. Le journal prit le deuil quand Salvador Allende se suicida à Santiago du Chili. Le journal fut la lanterne qui éclaira les grandes manifestations étudiantes et lycéennes de 1986. Et sur toutes ses Unes, il cria « non » quand en 2002 Jean-Marie Le Pen fut qualifié pour le deuxième tour de la présidentielle. Et c’est la mort dans l’âme qu’il se résolut à appeler au vote utile pour Jacques Chirac. La mort dans l’âme, c’était déjà un peu la mort...

Depuis, Libération ne cessa de décliner. Doucement, lentement et avec une subite accélération ces dernières années. Le journal crut à une rémission après l’arrivée de Nicolas Sarkozy au pouvoir. Ah qu’il était bon de haïr ce fasciste, ce réactionnaire, ce fils de Pétain ! Et des lecteurs imbéciles revinrent, attirés par l’odeur du sang, pour participer au festin du lynchage. Libération avait déjà de multiples rides, tout comme la gauche. Et se donna l’illusion d’une nouvelle jeunesse avec un rictus de haine.

Puis vint Hollande, un peu de chair fraîche pour un journal qui avait subi tous les outrages du temps. Et là, ce ne fut plus de l’amour mais de la rage. Un moulin à prières pour psalmodier sans cesse les louanges de saint François. Libération versa dans le sirupeux le plus poisseux et ses articles hollandolâtres furent tous accompagnés de bâtonnets d’encens. Et c’est ainsi que le journal, victime d’une étreinte mortifère désirée, suivit Hollande dans sa descente aux enfers. Libération meurt faute de lecteurs. La gauche se meurt faute d’électeurs.

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