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Couples sous tension : les sites et les applications de rencontre en ligne sont-ils en train de faire faire voler en éclat la monogamie ?
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1+1=3 ?

Helen Fisher, une anthropolgue et célèbre spécialiste du couple, aux Etats-Unis, se base sur l'histoire d'une femme adultère pour démontrer que l'adultère permet de faire perdurer son couple. Mais, de manière générale, les gens mariés s'efforcent de rester fidèles pour leur bien et celui de leur conjoint, même si cela demande des efforts.

Florence Escaravage

Florence Escaravage

Florence Escaravage fonde Love Intelligence® en 2007 après deux ans de travail avec un comité d’experts de renom pour répondre à une demande grandissante des personnes, célibataires ou en couples, qui souhaitent une aide éclairée lors de certaines périodes de leur vie amoureuse. 

Pour s’épanouir à deux : www.love-intelligence.fr

Pour trouver sa moitié en 5 clés : www.methode-florence.fr

 

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Dominique Lefèvre

Dominique Lefèvre

Dominique Lefèvre est psychologue sexologue clinicienne, experte en analyse de pratiques professionnelles en groupe et sur les questions intimes individuelles ou conjugales. Elle exerce ses activités de sexothérapeute depuis 5 ans au CHU Henri Mondor de Créteil et donne des consultations privées sur Paris et en région Est Île de France (bureau basé à Nogent sur Marne) ainsi qu'en national et international par Skype. Dominique Lefèvre est aussi docteure en droit.
 
 
 
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Jean-Roger Dintrans

Jean-Roger Dintrans

Jean-Roger Dintrans est psychiatre, chargé de cours à Paris V et à Paris VII.

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Atlantico. Aujourd'hui, le couple n'est plus la seule préoccupation depuis l'essor de l'importance d'avoir une "carrière" et d'autres centres d'intérêts. Dans quelle mesure cela peut-il remettre en cause l'importance du couple dans l'équilibre personnel ?

Dominique Lefèvre. Le couple est une formule de survie, me dites-vous, mais historiquement il a été renforcé au 19ème siècle avec cette notion d'amour qui consoliderait les liens sacrés du mariage inventé au 13ème siècle afin de canaliser les pratiques sexuelles décousues (cf George Louis Tin : "l'invention de l'hétérosexualité"). Il n'est plus question de survivre à 2 mais de survivre et de vivre tous et toutes ensemble. 

Comme le libertinage qui peut renforcer les liens de couple, l'adultère peut en faire de même. Cela dépend de la qualité du couple. Dans les journaux on retrouve les termes de cataclysme, de business plan, d'émotions contradictoires entre excitation, plaisir et colère et jalousie. La pression et le stress que la société impose est souvent détournée par  la transgression des normes. La sexualité est aussi impliquée dans ce désir de libération sans culpabilité. L'exposition au risque de désirabilité sociale peut être mis à l'épreuve de manière intime. 

Il s'agit peut-être de dissocier le mot infidélité du mot adultère. 

Les personnes sont renvoyées à leur propres valeurs de respect, de prise en compte de l'autre dans le désir, l'excitation, la jouissance. La femme s'est libérée en prenant sa place dans la société, dans les espaces publics, hors du foyer. La médiatisation et la connaissance du corps sexuel orgasmique de la femme sont largement diffusées bien que l'on puisse encore trouvé dans certains pays le refus de représenter le clitoris ou une vulve complète dans les livres de médecine.

Le plaisir de la femme peut être infini et la complétude est-elle nécessairement la multiplication des passages à l'acte charnels ? En présumant que la durabilité d'un couple s'appuie sur l'épanouissement sexuel, se pose les questions conjugales de l'entente sexuelle, des émotions contradictoires, de la protection de soi et des partenaires (MST/IST). A partir d'un bilan sexuel individuel et de couple, le sexologue évalue avec le consultant ce à quoi correspondent ces actes adultérins et les précautions à prendre. La balance des risques et avantages se calcule aussi bien pour la femme, l'homme, le couple et les partenaires épisodiques.

D'après Helen Fisher, anthropologue américaine, le couple pourrait perdurer si l'homme et la femme sont adultères, quel est votre avis ? Est-ce une réalité ?

Jean-Roger Dintrans. Tout dépend s'ils le savent. La question est de savoir si l'un et l'autre savent qu'ils se trompent, peut-on avoir un couple bâtit sur cette notion ? Ca peut exister, mais c'est rarement bien vécu longtemps. Parfois, comme ça m'ait arrivé avec un patient, son épouse lui reproche d'avoir eu cette vie, au bout de quarante de vie commune, alors qu'elle aussi a eu des amants. C'est souvent au dépend de l'un des deux. Des relations adultérines secrètes sont plus fréquentes. Sacha Guitry disait : "Les chaînes du mariage sont si lourdes qu'il faut être souvent trois pour les porter, parfois quatre." Un adultère révélé est presque toujours déflagrateur et destructeur, entraînant des blessures narcissiques, de l'image de soi.

Florence Escaravage. On est autant programmé pour être fidèle que pour être adultère mais comme on est a un cerveau, on va choisir ce qui nous fait du bien. Pour certains, ce sera l'adultère, pour d'autres la monogamie. Le point fondamental, c'est que pour tous ceux qui sont dans l'adultère, leur couple est forcément détruit, notamment quand l'autre le sait et désinvesti dans tous les cas. On peut aimer deux personnes à la fois. On peut aimer son mari et son amant, un temps, mais forcément un moment cela créé un déséquilibre et cela créé un cynisme. Dès que la relation adultère dépasse un certain nombre de semaines, ça désinvestit le couple. Car il y en a forcément un qui est dans le mensonge. Des couples à la Simone de Beauvoir il n'y en a pas. Elle a énormément souffert des relations adultères de Sartre.

Qu'est-ce que les gens mariés recherchent en étant adultères ?

Jean-Roger Dintrans. Cela dépend du profil psychologique. Il y a des gens qui ont des pathologies de la séduction et qui ne peuvent pas s'empêcher de séduire. De manière générale, chez les hommes ce soit plus souvent l'envie de nouveauté et de diversité. Chez les femmes, c'est plus souvent le résultat de l'insatisfaction liée à leur couple, de  déception, d'ennui, d'un éloignement ou éventuellement la recherche de nouveautés.

Il y a aussi les rencontres inopinées, que l'on n'a pas prévues. On peut faire la rencontre qui déclenche des émotions jamais connues, alors que l'on ait aussi attaché à sa femme. Un de mes patients, par exemple, ne souhaitait pas être adultère, mais il a fait une rencontre qui l'a bouleversée.

Florence Escaravage. Le couple est une question de projet. C'est  pour cela qu'il faut vérifier cela avant de faire un enfant, de s'engager avec quelqu'un. Il faut que ce soit une valeur intrinsèque. C'est naturel d'avoir envie. On est programmé un peu plus pour être fidèle, mais si on écoute nos aspirations  de liberté, on est attiré vers l'adultère. Donc, au final tout est une question de projet de vie. Est-ce qu'on passe à côté de soi lorsque l'on n'est pas adultère ? Pas sûr...

Des sites spécialisés, de plus en plus nombreux, existent aujourd'hui et proposent de rencontrer d'autres personnes mariées, est-ce la preuve que les couples d'aujourd'hui y ont vraiment recours ou est-ce une nouvelle offre ?

Jean-Roger Dintrans. C'est la preuve que nous sommes dans une société de consommation où on consomme le sexe voire les sentiments come un steak ou les hamburgers. On est conduit savoir moins faire d'efforts y compris les efforts pour la stabilisation ou la pérennisation d'un couple. Et on a tendance à rechercher le plaisir immédiat. Au lieu de faire les efforts pour dépasser une phase de routine, de vide, d'insatisfaction, de déception, il y a une tendance générale à rechercher une jouissance personnelle. Il existe un véritable consumérisme amoureux.

Florence Escaravage. C'est une offre d'arnaques, j'ai eu des centaines de confirmations en neuf d'expérience. Et c'est une offre uniquement dédiées aux hommes. Elle vient caresser l'idée magique que, finalement l'adultère c'est facile, qu'un 5 à 7, tout en gardant une vie de couple saine, c'est possible. Ces sites promettent une relation avec une femme qui ne s'engage pas, qui ne nous attend pas ni ne fait de scène, sur le même mode de vie. Au bout d'un moment, il y a forcément l'un des d'eux qui bascule, l'un des d'eux veut forcément plus. 

Est-ce que les hommes ne sont pas faits pour être monogames ? 

Jean-Roger Dintrans. Oui, bien sûr. Si on prend du point de vue éthologique, dans tout le règne animal lorsqu'il y a un dimorphisme sexuel (différence poids et taille moyenne) entre homme et femme c'est qu'il existe une compétition intra-sexuelle entre les mâles pour les femelles. Les mâles ont tendance à avoir plusieurs femelles. Il y a aussi une notion de désir. Mais la norme reste la monogamie

Florence Escaravage. Pour celui qui l'a décidé, il parvient à être monogame, par contre celui pour qui ce n'est pas une valeur, il ne le sera jamais. Si la personne comprend que la fidélité est ce qui va lui permettre d ene pas sombrer, de ne pas tout casser, il fera les efforts. Il ne faut pas crroire que ceux qui sont infidèle, le sont par facilité. C'est difficile. Mais cela en vaut la chandelle. Pour eux, il y a des valeurs de la famille, d'une femme épanouie, ils n'ont pas envie de briser tout cela. C'est trop dangereux.

Aujourd'hui, le statut des hommes et celui des femmes a évolué, est-ce que l'adultère montre une évolution du couple par rapport à notre société ?

Jean-Roger Dintrans. Ça révèle une moindre capacité à faire des efforts.Le couple est un idéal et rare sont ceux qui durent sont que l'un n'ait été, un jour, adultère. Mais c'est une chose d'en faire un constat a posteriori, c'en est une autre d'en faire un principe à encourager. Le couple est une des meilleures façons de pouvoir donner un équilibre affectif, de permettre une cellule de protection des individus les uns par rapport aux autres. Ça s'inscrit dans le long terme et le long terme demande des efforts, chacun souffrant de perdre l'exclusivité de l'amour de l'autre.

Florence Escaravage. Il n'y a pas de vrai changement, ce sont surtout les médias qui en parlent le plus pour faire sensation. Ils veulent parler des couples avant-gardistes. On peut donc avoir la sensation d'être ringard à 50 ans parce que l'on n'a jamais été infidèle. Dans les amitiés masculines, les hommes parlent peu de ces choses-là en général, mais ils se confient entre eux sur les maîtresses. J'ai l'impression que l'adultère a toujours existé, mais aujourd'hui c'est plus facile. Ce ne sont pas tant les sites comme Tinder que la structure professionnelle. Vous avez une émulation très forte avec vos relations telles les fournisseurs et autres clients, et surtout vos collègues. En effet, celui qui s'est inscrit sur un site a déjà réfléchi à une démarche de tromperie, tandis que celui qui a envie d'être fidèle, mais qui, parce qu'il a trop bu trompe son conjoint. 

Les femmes s'autorisent plus aussi parce qu'elles sont autonomes.

Pour conclure je dirai que le petit couple c'est celui qui n'échange pas beaucoup ou seulement sur le plan logistique (les vacances, les enfants...). Le grand couple, lui, est celui qui est en travail permanent et qui veut grandir. Il faut donc qu'ils échangent et se fassent confiance et donc l'adultère n'y a pas sa place. L'adultère réduit le couple à sa plus petite portion congrue malheureusement. Et réduit les échanges, il y a toujours un mensonge. Ce n'est plus un couple, mais une PME.

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