Les auto-entrepreneurs gagnent-ils vraiment mieux leur vie qu’en tant que salariés ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Depuis sa création, on observe des profils très différents qui se lancent sous le statut d'auto-entrepreneur.
Depuis sa création, on observe des profils très différents qui se lancent sous le statut d'auto-entrepreneur.
©Reuters

Self-made man

Dans un article publié sur La Tribune, une auto entrepreneur déclare "Je gagne mieux ma vie qu’en étant simple salariée". Une telle chose est techniquement possible, mais semble concerner une frange très limitée. Quid de la majorité d'entre eux ?

Pascal Nguyên

Pascal Nguyên

Pascal Nguyên est journaliste-pigiste et auteur avec Gilles Daïd du « Guide pratique de l’auto-entrepreneur ».

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Atlantico : Dans un article publié sur La Tribune, une auto entrepreneur déclare « Je gagne mieux ma vie qu’en étant simple salariée » (voir ici). Compte tenu du salaire minimum en France (1432,22 euros) et du plafond de revenu du statut d’auto entrepreneur (32 600 pour les services, 81 500 pour les achats/ventes), cela est techniquement possible, mais est-ce généralisé ? Les auto-entrepreneurs qui peuvent se dire mieux rémunérés que lorsqu’ils étaient salariées ? Ces cas sont-ils légion ? Pourquoi ?

Pascal Nguyên : Sur cette question-là, il n'existe aucune statistique. Ce qui est certain, c'est que les personnes passant en activité principale ont intérêt à avoir un bon chiffre d'affaires pour en vivre. Avoir des données sur ce sujet n'aurait de toute façon que peu d'intérêt, car si une personne quitte son poste salarié pour créer une auto entreprise, on suppose que c'est pour gagner au moins ce qu'elle gagnait en tant que salarié. Mais elle peut également gagner moins et s'en satisfaire : un banquier gagnant très bien sa vie peut vouloir devenir vendeur de produits bio, gagner moins mais vivre plus heureux.

Des salariés touchent moins de 1200euros bruts par mois, quand ce n'est pas moins de 600 euros pour ceux qui sont à un tiers ou un quart de temps partiel. Or, certains auto-entrepreneurs touchent 2000 euros nets par mois. On ne peut donc pas avancer que le salariat ou l'auto-entrepreneuriat permettent de gagner plus ou moins bien sa vie. Aucun régime ne favorise dans l'absolu de meilleurs revenus qu'un autre.

Ce qu'on peut dire en revanche du régime de l'auto-entrepreneur, c'est qu'il est moins protecteur, au sens où l'on ne dispose pas d'allocations chômage puisqu'on ne cotise pas pour ces dernières. Lorsqu'on est sous le régime du salariat, on est protégé par le Code du travail ; on bénéficie d'une protection en matière de chômage mais aussi d'indemnités journalières en cas de longue maladie, qui sontbeaucoup plus développées que pour l'auto-entrepreneur.

Les discussions autour du projet de loi ont-elles permis de montrer qu’il existe plusieurs profils d’auto entrepreneurs ? Si oui, quels sont-ils ?

Ce n'est pas ce débat qui a montré la diversité des profils. Depuis sa création, on observe des profils très différents qui se lancent sous le statut d'auto-entrepreneur, justement parce qu'il permet cette liberté de profils. Grâce à sa gratuité de mise en œuvre, il permet à des gens de se lancer dans de petites activités annexes ou complémentaires. Chose impensable auparavant. Il peut également pour certaines personnes servir de tremplin dans le monde de l'entrepreneuriat.

Pour la moitié d’entre eux l’activité d’auto-entrepreneur est essentielle à leur subsistance (selon les chiffres de l’Union des auto-entrepreneurs). Comment l’interpréter ? Faut-il y voir un « pansement », une activité par défaut, ou au contraire un tremplin professionnel… ?

Dans cette catégorie, il est important de distinguer deux sous-catégories de personnes dont l'activité d'auto-entrepreneur est essentielle à leur subsistance : celles qui en ont fait leur activité principale, et celles qui ont de petits salaires et qui pour le compléter se génèrent un revenu supplémentaire.

Beaucoup d'auto-entrepreneurs dont c’est l’activité principale « vivotent » grâce à elle. Si, conformément au projet du gouvernement, elles sont obligées de passer sous un autre régime, elles risquent de ne pas pouvoir faire face à leurs charges. Ces personnes vont-elles venir grossir les rangs des inscrits à Pôle emploi ?

Il est compliqué de prévoir. Ce qui est sûr, c'est que pour beaucoup de personnes ce statut est simple à gérer, et il n'est pas trop cher. S'ils doivent passer à un régime dit "normal", ils arrêteront leur activité, notamment ceux pour qui cette dernière est un complément de revenus. Si par exemple on demande à une personne qui génère 200 à 300 euros de chiffre d'affaires par mois de passer à une entreprise individuelle classique et de payer les charges sociales qui y sont liées, elle s'arrêtera, car il n'y aura plus d'intérêt économique.

La question se pose de savoir si le gouvernement a l'intention de généraliser cette limitation dans le temps. D'après le rapport qu’il a lui-même a commandé à l'IGF et l'IGAS, il est déconseillé de toucher au régime, sauf si le but est de l'améliore, notamment en ce qui concerne la Contribution foncière des entreprises, qui a tant fait couler d'encre.

Propos recueillis par Gilles Boutin

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