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Le transport de malades : fraudes par voie express
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Bonnes feuilles

Explosion des dépenses de santé, gaspillages, lobby des labos, dégradation de la médecine libérale, hôpital public en détresse, inadéquation des politiques de santé… Le système de santé français, réputé dans le monde entier, est victime de son succès. Le pays s'enlise et aucune réforme ne parvient à endiguer la lente dégradation qui ronge notre modèle social. Extrait de "Santé, le grand fiasco" (2/2).

5 millions d’individus, notamment des personnes âgées et des malades chroniques, se déplacent chaque année aux frais de l’assurance maladie pour se faire soigner ou hospitaliser. Pour l’accès aux soins, le dispositif est incontournable. En constante augmentation, ces transports correspondent à la moitié des remboursements des consultations des médecins généralistes. Le dispositif explose et la facture s’envole pour atteindre les 3,5 milliards d’euros. Or, on y constate maints abus.

Mal contrôlé, mal sanctionné et surtout mal piloté en amont, le système est faillible et voit chaque année près de 9 millions d’euros passer à la trappe pour des trajets médicalement injustifiés, voire des transports qui n’ont jamais été effectués. Les abus en matière de transports sanitaires sont légion. Preuve en est, les trans- ports sont paradoxalement bien plus élevés dans les agglomérations, spécifiquement en Île-de- France, que dans des coins plus isolés, comme à la campagne ou à la montagne ! Un excès de voyages en ambulance ou taxi, ruineux, savamment manipulé par certains transporteurs professionnels qui falsifient les prises en charge pour facturer ces fameux trajets fantômes. Au-delà des cas, rares, d’escroqueries en bande organisée qui peuvent représenter des sommes vertigineuses, ce sont surtout les pratiques abusives des médecins comme des assurés sociaux qui plombent le système.

Le chiffre de la fraude évoqué, aussi important soit-il, serait même en deçà de la réalité, selon la Cour des comptes qui l’estime « très sous-évalué par rapport à certains constats locaux ». Les économies possibles sont donc immenses : 450 millions d’euros par an selon la Cour. Et ce sans mettre en péril l’accès aux soins.

Mais reprendre en main un système troué de partout va être compliqué, avant tout parce qu’il faudrait s’attaquer aux pratiques des médecins.

Près de 90 % des dépenses de transport sont prises en charge à 100 %, dont quasiment les trois quarts correspondent à des frais remboursés à des assurés en affection de longue durée (ALD). Les médecins ont la fâcheuse habitude de considérer le transport de certains de leurs patients comme relevant du 100 % même si les soins n’ont aucun rapport avec l’ALD. Certains hôpitaux ne sont pas en reste, qui font rentrer les malades chez eux au frais de la Sécu, même si ce n’est pas toujours médicalement justifié. Les ARS (Agences régionales de santé) ayant le dossier en charge peuvent en effet signer de nouveaux contrats types d’amélioration de la qualité et de l’organisation des soins avec les CPAM et les établissements de santé. Mais vu les intérêts économiques en jeu, difficile de changer la donne du jour au lendemain. Le gouvernement a d’ailleurs stoppé toutes expérimentations en la matière en annulant le lancement d’appel d’offres par les agences régionales de santé ou par les hôpitaux, pour le transport de malades. De quoi rassurer les taxis, dont 90 % du chiffre d’affaires en zone rurale provient du transport de patients. Après avoir fait grève, ils ont réussi à faire entendre leurs voix, notamment sur les risques de voir ces appels d’offres bénéficier aux grosses sociétés au détriment des taxis.

Extrait de "Santé, le grand fiasco", Véronique Vasseur et Clémence Thevenot (Editions Flammarion), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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