Le quinquennat de François Hollande est-il déjà terminé ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Consommation
Il est beaucoup trop tôt pour estimer l’impact de l’impopularité actuelle de François Hollande sur les élections de 2017
Il est beaucoup trop tôt pour estimer l’impact de l’impopularité actuelle de François Hollande sur les élections de 2017
©Reuters

Quinquennus interuptus

Hausse continue du chômage, croissance en berne, prévisions budgétaires à revoir ... le président risque d'être rattrapé par la réalité malgré les tentatives d'efforts sur des problématiques sociétales. A l'horizon, élections municipales et européennes pourraient encore geler les maigres marges de manoeuvre du gouvernement.

Josée Pochat et Jérôme Sainte-Marie

Josée Pochat et Jérôme Sainte-Marie

 

photo3.jpg

Josée Pochat est chef du service politique de Valeurs actuelles.

 

picture-5581.jpg

Jérôme Sainte-Marie est Directeur du Département Opinion de l'institut de sondage CSA.

Voir la bio »

Atlantico : La croissance n'est pas venue, la courbe du chômage continue son ascension : le gouvernement va avoir le plus grand mal à tenir ses engagements avant de devoir se lancer dans la course électorale de 2014. Devons-nous définitivement faire le deuil des réformes structurelles - qui ne sont jamais venues ?

Josée Pochat : Moins d’un an après son début, il n’est pas possible de dire que le temps utile d’un mandat présidentiel est terminé car les élections intermédiaires existent toujours et penser le contraire voudrait dire que le système est foutu. Cependant, il aurait été bon de rentrer plus vite dans ce quinquennat sans quoi il ne sera effectivement utilisé à rien. Le problème est que ce mandat a commencé en étant dirigé par un président de la République captif de sa campagne électorale. Quand on promet de « réenchanter le rêve français », il est difficile de siffler la fin de la récréation juste après la fin des législatives. Il a donc bien fallu que François Hollande tienne quelques promesses impliquant des dépenses publiques comme l’augmentation du nombre de professeurs. Cela a donc empêché la mise en place des réformes structurelles nécessaires au sauvetage de notre économie qui pour autant, celles-ci devront être mises en place mais pas du fait d’une initiative de la gauche. La réalité va tout simplement s’imposer à nous et si nous ne prenons pas ces mesures, la France sera attaquée par les marchés et nous nous retrouverons avec une rigueur à l’espagnole dans laquelle les Français en baveront réellement. Depuis trente ans, nous dépensons entre 3 et 4 point de PIB de plus que ce que nous recevons comme recettes. Les chiffres sont têtus et si nous ne nous ne sommes pas capables de mettre à plat nos dépenses sociales, tout va exploser sans le moindre doute.  

En quoi la situation est-elle aujourd'hui particulière  et comment pourrait-il en être autrement ?

Josée Pochat : La situation n’est pas si particulière dans le sens où en France les campagnes présidentielles se font une baguette magique dans une main et un chéquier dans l’autre tant nous sommes accros à la dépense publique. Le fait que Hollande se plie à quelques promesses plutôt que de faire les bonnes réformes n’a donc rien de bien différent de ses prédécesseurs. Ce qui change vraiment, c’est que nous arrivons à la fin d’un système et que François Hollande aurait donc dû avoir le courage d’un discours de vérité plutôt que de taire, comme Nicolas Sarkozy, pendant toute la campagne, les 600 milliards que nous dépensons, mal, chaque année pour notre système social. Les candidats auraient dû s’adresser aux Français avec honnêteté, en prenant les choses de manière globale, et en leur expliquant qu’il est temps de payer nos dépenses sociales avec du vrai argent et plus avec de la dette.  

Jérôme Sainte-Marie : Tout comme pour les précédents mandats présidentiels, il y a une indexation de la popularité de l’exécutif sur les résultats économiques du pays, et plus particulièrement sur l’emploi, première préoccupation des Français. La promesse de François Hollande d’inverser la courbe du chômage a pu surprendre les Français. Cette promesse a présenté un double
désavantage, d’une part elle a consisté à parier sur un avenir tout à fait incertain et d’autre part le scepticisme généré par cet engagement a contaminé la perception par l’opinion de l’ensemble du discours gouvernemental.

Face à l’échéance électorale de 2014 et l’impossibilité d’agir sur les indicateurs économiques, quelle serait la solution la plus à même de crédibiliser la majorité de gauche : l’immobilisme ou les questions de société ?

Jérôme Sainte-Marie : Traiter des questions de société permet au gouvernement de tenir des promesses de campagne et de remobiliser l’électorat de gauche. Par ailleurs, cela met indirectement au second plan les questions économiques alors que les derniers chiffres et les perspectives sont moroses. Cependant, ce temps politique consacré aux débats de société ne peut durer indéfiniment au risque de donner le sentiment aux Français que leurs préoccupations ne sont plus au cœur de l’action gouvernementale. Tout est donc une question de dosage et d’équilibre.

Quel est l’impact potentiel des différentes élections de 2014 sur la liberté d’action du gouvernement? Qu’impliquerait une victoire massive ou à l’inverse une défaite cuisante ?

Josée Pochat : Au-delà de la question idéologique, il est probable que la droite récupère naturellement des villes car les élections intermédiaires sont toujours mauvaises pour le pouvoir en place. Dans les années à venir, la vie politique sera de toute façon dominée par des catastrophes économiques à tous les niveaux dans un pays qui produit mille chômeurs par jour. Peu importe donc que la droite récupère dix, vingt ou trente villes, cela ne changera rien du tout à la politique de la gauche car ce dont nous avons besoin c’est du courage et de la vérité. De la même manière, un plébiscite municipal de la gauche, peu probable, n’encouragera en rien François Hollande à aller de l’avant. En effet, l’élection qu’il est nécessaire de gagner pour faire des réformes c’est l’élection présidentielle, il l’a déjà gagnée et n’en fait pas grand-chose. Un sursaut dû aux municipales me parait donc bien optimistes. Peu probable que cela lui fasse pousser soudainement des ailes.

Après les municipales, la perspective de la présidentielle de 2017 va apparaître dans le débat public. Cela va-t-il totalement paralyser la gauche ou peut-elle tenter de passer certaines grandes mesures en vue de créer un sursaut politique ? 

Josée Pochat : Une fois dans la période pré-électorale, il est certain que le temps utile du mandat sera consommée. Il est très peu probable que le gouvernement fasse passer des réformes économiques puisque celles-ci sont trop douloureuses et n’ont des effets visibles que trop tard pour apporter un quelconque retour électoral. Les mesures populistes, ou populaires, impliquant de grandes dépenses n’ont pas beaucoup plus de chances de voir le jour car si la France venait à être incapable de rembourser la charge de sa dette se serait encore pire en terme électoral. Cela mettrait la France en position d’être attaquée par les marchés et nous serions probablement sujet à une augmentation des taux d’intérêt de six ou sept points. L’opinion ne le pardonnerait pas à la gauche et elle n’en prendra pas le risque. Il est donc clair que la paralysie sera complète dans cette période puisque les grandes mesures comme la loi contre le licenciement boursier ne touche que peu de Français pour un risque de colère proportionnellement trop important. Les Français ne s’en préoccupent pas. Ils n’accordent d’importance qu’à savoir qu’ils pourront boucler leur mois et si leurs enfants trouveront du travail, pas simplement un stage non rémunéré. Et ils ont raison.

Un maintien de l’impopularité gouvernementale changera-t-elle quelque chose dans l’action de la gauche à l’horizon de cette présidentielle ?

Jérôme Sainte-Marie : Nous sommes à quatre ans des prochaines présidentielles : il est beaucoup trop tôt pour estimer l’impact de l’impopularité actuelle de François Hollande sur les élections de 2017. Aujourd’hui, la cote de popularité du gouvernement est faible, notamment en raison du contexte socio-économique. Une telle impopularité n’est néanmoins pas exceptionnelle : le précédent quinquennat a également été marqué par une faible popularité de Nicolas Sarkozy. Au contraire, choisir d’assumer une impopularité passagère peut aussi être le signe d’un gouvernement prêt à relever les défis qui se posent au pays.

Propos recueillis par Jean-Baptiste Bonaventure

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !