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Les Suisses ont voté en faveur de l’allongement de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans.
Les Suisses ont voté en faveur de l’allongement de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans.
©Fabrice COFFRINI / AFP

Scrutin

Les Suisses viennent de voter en faveur de l’allongement de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans.

François Garçon

François Garçon

Auteur de France défaillante, Il faut s’inspirer de la Suisse, Ed. L’Artilleur, 2011, prix Aleps du livre libéral 2022. François Garçon a rédigé plusieurs ouvrages sur les mérites de la Suisse (Le modèle Suisse, Perrin – Le Génie des Suisses – Tallandier) , et a enseigné pendant plusieurs années à la Sorbonne.

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Nada, rien, pas un mot ! Alors que la France se couche et se réveille tous les jours au son de la réforme des retraites, alors que patrons, ministres et syndicalistes se succèdent devant les micros pour dénoncer les projets en cours, au point que rares sont ceux qui comprennent ce qui les attend, alors que l’on nous bassine de réformes paramétrique ou systémique et d’âge pivot, personne en France n’a noté qu’en Suisse, dimanche 25 septembre, le peuple, dans les isoloirs, a tranquillement voté pour porter l’âge de la retraite des femmes de 64 à 65 ans, âge aligné sur celui des hommes. Pas un mot, pas même une brève de trois lignes sur cette votation dans Le Figaro, Le Monde, Libération, Le Parisien.  Nada ! 

L’enjeu suisse

La réforme suisse « vise à garantir les rentes sur les dix prochaines années environ ; elle mise à la fois sur des économies et sur une augmentation des recettes » ; la réforme, toujours selon les autorités, « permettra également plus de flexibilité : les assurés pourront fixer librement le moment de leur départ à la retraite, entre 63 et 70 ans, et réduire progressivement leur activité lucrative ».

Pourtant approuvée par une large majorité d’élus au Parlement fédéral (125 oui, 67 non, 1 abstention au Conseil national ; 31 oui, 12 non au Conseil des Etats), cette loi sur la réforme des retraites a cependant fait l’objet d’un référendum révocatoire, dit facultatif, lancé par les partis, syndicats et associations qui s’y opposaient. Considérant cette loi pénalisante pour les femmes, un comité référendaire s’est ainsi constitué, puis a collecté 50 000 signatures, glanées une par une sur des pétitions.Au terme de cette entreprise – la collecte de signatures ne peut s’étendre sur plus de cent jours - , les autorités, après vérification de la sincérité des paraphes, ont été dans l’obligation de soumettre la loi à l’approbation de l’ensemble de la population. La lutte fut âpre. Au final, les partisans d’un alignement de l’âge de départ à la retraite l’ont emporté par 50,6%, vote populaire qui ratifie donc le vote des parlementaires. 

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Le même jour, lors du même scrutin et à propos du même objet (l’alignement des âges de départ à la retraite), les autorités soumettaient au peuple suisse un passage de la TVA de 7,7% à 8,1%. Impliquant une révision de la Constitution suisse, cette augmentation de la TVA obtenait, elle aussi, l’approbation des électeurs : 55,1% de oui. Double victoire donc de l’exécutif et des parlementaires. 

Le 25 septembre, les Suisses ont ainsi voté sur des questions d’une grande importance. Cinq semaines avant le scrutin, 5 500 000 électeurs avaient reçu dans leur boîte aux lettres une épaisse enveloppe contenant leur bulletin de vote, l’enveloppe retour ainsi qu’une brochure de 80 pages, où figuraient, dans d’égales proportions, la recommandation du Conseil fédéral et du Parlement (favorable à la modification de la loi fédérale sur l’assurance vieillesse et survivants, AVS 21), et la recommandation du comité référendaire, qui en préconisant le rejet. 

Une France provinciale et nombriliste

Alors que les élites scolaires françaises ne cessent de déplorer l’immaturité politique d’une population biberonnée à l’aide sociale, il se trouve donc, à nos portes, un autre peuple, discret qui nous montre comment les grandes réformes peuvent être abordées sans recourir à des expédients de républiques bananières, comme l’est le 49.3. Certes, il est peu probable que, du jour au lendemain, les Français se montrent aussi posés et intelligents que le sont les Suisses. Mais il n’est écrit nulle part qu’à force de consultations, d’abord au niveau communal, puis régional, puis national, les Français continuent de se montrer hostiles à tout ce qui leur est proposé. Parions même que si les Français étaient en capacité d’arbitrer sur certains gaspillages (ronds-points, dépenses somptuaires, cadeaux clientélistes), ils se prononceraient au nom du bien commun. Les Suisses nous montrent encore que, contrairement à ce que l’on entend régulièrement sur les ondes françaises, démocratie représentative et démocratie participative peuvent coexister, et mutuellement s’enrichir. Et qu’au final, tout le monde (citoyens et entreprises) se porte beaucoup mieux. 

Au menu de ce même scrutin, les Suisses étaient invités à se prononcer sur une initiative populaire contre « l’élevage intensif » (rejeté) et sur une modification de la loi fédérale sur l’impôt anticipé. Dans trois mois, les Suisses voteront sur d’autres objets. Ca fonctionne ainsi depuis 170 ans.

François Garçon

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