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Emmanuel Macron prononce un discours lors de la présentation du plan d'investissement "France 2030" à l'Elysée, le 12 octobre 2021.
Emmanuel Macron prononce un discours lors de la présentation du plan d'investissement "France 2030" à l'Elysée, le 12 octobre 2021.
©LUDOVIC MARIN / PISCINE / AFP

Industrie

Emmanuel Macron est en visite officielle dans le département de la Loire, ce lundi 25 octobre, à Saint-Etienne et Montbrison. Il serait illusoire de vouloir réindustrialiser la France sans accepter le principe d’une industrialisation intégrant l’ensemble des possibilités offertes par la révolution numérique et par la recherche scientifique. Emmanuel Macron acceptera-t-il de n’être que le rédacteur de la page française de l’histoire de la mondialisation ?

Gaël Perdriau

Gaël Perdriau

Gaël Perdriau est maire de Saint-Etienne et vice-président du parti Les Républicains. 

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Peu de gens sont réellement conscients de ce que Saint-Étienne a été pour la révolution industrielle en France. Un des tous premiers territoires à porter cette industrie nationale naissante au XVIIème siècle et qui contribua à la prospérité par ses houillères, sa sidérurgie, ses filatures, sa manufacture d’armes et sa capacité à innover. Forcément, lorsqu’on est maire de cette grande ville on connaît la valeur de l’industrie ainsi que sa richesse humaine (Le mutualisme est né, tout comme la formation professionnelle, à Saint-Étienne) et on mesure le coût des ravages de la désindustrialisation de la France depuis près de cinquante ans.

Un mouvement conçu comme inéluctable par des grands économistes, tels Jean Fourastié, et qui voyait en chaque fermeture d’usine la preuve qu’une nouvelle marche avait été gravie sur le chemin du progrès. L’histoire avait une logique et celle-ci excluait, de fait, les usines qui ne devaient être qu’un stade intermédiaire entre l’ère agricole et celle des services. Ce modèle avait déjà largement échoué et contribué à la lente montée d’un chômage nécessitant un engagement sans cesse croissant de l’État pour maintenir une couverture sociale fidèle à nos valeurs mais dont le coût s’est avéré si exorbitant qu’il n’est pas étranger au mouvement de délocalisations des entreprises causé par la hausse des prélèvements obligatoires.

Dans cette vision néolibérale, l’État remplissait son rôle, en creusant les déficits et en s’endettant, d’autant plus facilement que la politique monétaire veillait au maintien d’une inflation aussi basse que possible. Les entreprises ne devaient plus produire des richesses et des services, pour l’économie, mais créer de la valeur pour les marchés financiers. Peu importe que chaque emploi industriel puisse générer trois emplois dans les services. Ce qui comptait était de produire de la valeur avec un minimum de personnes, les autres étant renvoyées à la règle, devenue dogme, de l’adaptabilité, souvent synonyme de néant social.

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Au-delà de la diminution de l’emploi industriel en France, cette politique a rendu l’homme superflu dans le processus de production et ce d’autant plus que la révolution numérique a profondément modifié la notion même de travail. Aujourd’hui, faisant suite à la pandémie, nous avons pris conscience des fragilités profondes de notre système productif. Le président de la République en a profité pour engager un plan ambitieux destiné à réindustrialiser la France qu’il faut soutenir à condition de se poser, aussi, les bonnes questions. Au premier rang desquelles il faut placer la compréhension des mutations profondes du travail.

Nous commençons à comprendre que la révolution numérique, dont la crise des Gilets Jaunes est sans doute la première manifestation sociale d’ampleur, induit des besoins en main d’œuvre en nette diminution. Demain, nous produirons autant, voir d’avantage, avec de moins en moins de personnes dont le niveau de qualification, en revanche, ira croissant. Aussi, les évolutions nous obligent à penser un nouveau modèle de société intégrant le rôle de l’État, non plus comme simple agent, depuis les années 80, au service des entreprises, mais comme promoteur de services publics de qualité, adaptés aux besoins réels. Ce qui pose aussi la question du périmètre de son action, de celui des collectivités, appelées à être des acteurs majeurs de ce mouvement, de la fiscalité mais aussi de l’intégration des enjeux du développement durable.

Ainsi, il serait illusoire de vouloir réindustrialiser la France sans accepter le principe d’une industrialisation intégrant, de manière significative, l’ensemble des possibilités offertes par la révolution numérique et par la recherche scientifique que nous devons doper pour la porter de 2,2% à 3% minimum du PIB. Les conséquences sur le travail, donc sur notre modèle social et sur la société même que nous souhaitons bâtir, seront réelles puisque le processus classique de destruction-création peine à se vérifier avec la révolution numérique. Pourtant, la réindustrialisation du pays doit se faire essentiellement à partir de technologies nouvelles et non pas en rapatriant des fabrications relevant de technologies anciennes. C’est le pari que nous avons fait, à Saint-Étienne, depuis 2014 en renforçant les capacités de nos start-ups en veillant à créer un écosystème aussi favorable que possible avec les entreprises industrielles locales.

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Le président de la République ne mesure pas à quel point en embrassant la cause de la réindustrialisation il pose, en définitive, la question de la société à laquelle nous aspirons réellement. Voulons-nous d’une vision néo-libérale acceptant toutes les évolutions de la mondialisation ou bien souhaitons-nous moderniser notre modèle républicain fondé sur un universalisme plaçant l’homme au cœur de nos politiques ?

Emmanuel Macron choisira-t-il alors d’écrire une nouvelle page de l’Histoire de France ou acceptera-t-il de n’être que le rédacteur de la page française de l’histoire de la mondialisation ?

Gaël Perdriau

Maire de Saint-Etienne – Président de Saint-Etienne Métropole

Vice-Président Les Républicains

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